LIVRE BLANC ![0_image_0.png](0_image_0.png) SUR LA DÉFENSE NATIONALE TOME II LIVRE BLANC SUR LA DÉFENSE NATIONALE TOME II 1973 ![0_image_1.png](0_image_1.png) 1973 # Avant-Propos Le premier tome du Livre Blânc paru il y a six mois, en juin 1972, répond après un exposé sur notre politique générale de défense, aux grandes questions directement liées à son exécution : capacité de nos forces armées, service militaire universel, politique d'armement, finances. Dans ce second volume l'inslitution militaire est décrite telle qu'elle est organisée et telle qu'elle travaille. L'ensemble de cette publication vient à son heure. En un temps où l'esprit critique, à la fois renouvelé et altéré par la volonté de contestation, remet tout en cause, il était nécessaire de rappeler les données fondamentales de notre défense dont les forces armées constituent l'élément essentiel. En un temps où les nouveautés, qui provoquent souvent de véritables mutations, imposent un examen fréquent des structures en place et des règles en usage, il étali utile d'exposer l'effort considérable entrepris pour donner à notre institution militaire un visage neuf. Enfin, en un temps où l'on affecte de penser que la civilisation moderne fait disparaître la notion de patriotisme, Il était capital de rappeler selon quelles lois et dans quel esprit vivaient des personnels soumis, aujourd'hui, comme hter, pour le service de la Nation, à la grandeur, mais aussi aux servitudes de la fonction militaire. Ces deux volumes ont été rédigés, sous ma direction, par de proches collaborateurs qui se sont efforcés d'exprimer, pour un cercle de lecteurs aussi large que possible, l'ensemble que représente la Défense Nationale de la France. Il est juste de lier cet effort d'information ef d'explication à celui qui a été entrepris et mené à bien, avant tout à l'adresse de l'opinion parlementaire, pour la présentation dy budget de la défense, selon les méthodes dites de « rationalisation des choix budgétaires ». Mais alors que la présentation du budget est annuelle, on ne peut envisager la rédaction, chaque année, d'un livre blanc. Toutefois, je souhaite que le premier livre blanc, en deux volumes, soit considéré comme un début. Il me semble utile de prévoir désormais, à des intervalles de trois à cinq ans, une refonte complète de cet important travail. La défense est nationale parce que c'est la Nation qui, en cas de péril, est appelée à se défendre. Les Françaises ei les Français doivent s'intéresser à la défense et la connaître parce qu'ils sont et font la Nation. Michel DEBRÉ, Ministre d'Élat chargé de la Défense Nationale. # Avertissement Au Lecteur Le deuxième volume du Livre Blanc, annoncé en juin 1972 lors de la parution du premier, traite comme il était prévu de l'organisation des forces, de l'administration de la défense, de la fonction militaire, de l'enseignement militaire et de la recherche scientifique et technique militaire. Il est apparu opportun de faire une place particulière à deux sujets auxquels l'actualité s'est intéressée récemment à divers titres, à savoir la médecine militaire et la politique domaniale et immobilière. C'est pourquoi le présent volume comprend en définitive sept chapitres : I. - L'organisation permanente des forces armées el du commandement. II. - L'administration de la défense. III. - La fonction militaire. IV. - L'enseignement militaire. V. - La médecine militaire. VI. -- La politique domaniale et immobilière de la défense: VII. - La recherche scientifique et technique militaire. # L'Organisation Permanente ## Des Forces Armées Et Du Commandement L'organisation de la Défense Nationale a été conçue autour de deux principes : la permanence et la généralité. La permanence de la défense est, ainsi qu'il a été exposé dans le premier tome du Livre Blauc, une nécessité du monde moderne qui, de la guerre froide au conflit limité, de la détente à la crise, a rendu caduque l'opposition tranchée, naguère justifiée, entre la guerre et la paix. Aussi la défense est-elle permanente dans son organisation et susceptible d'être activée par degrés en fonction de l'évolution de la situation internationale. Par ailleurs, les formes d'agression concevables se sont largement diversifiées et vont aujourd'hui du conflit nucléaire à la guerre économique en passant par l'intimidation et la subversion. C'est pourquoi la notion de défense présente un caractère général qui ne se réduit pas à ses aspects proprement militaires. L'organisation de la défense revêt un caractere interministériel marqué. Chacun des ministres y trouve une part de responsabilité, et la coordination des mesures de défense revient au Premier Ministre quand celui-ci n'en délègue pas le soin à un Ministre chargé de la Défense Nationale. Il n'en est pas moins clair que le Ministre chargé des Armées, même quand il n'a pas en outre qualité de Ministre de la Défense, assume dans ce domaine la responsabilité ministérielle la plus lourde au seul titre de sa mission de préparer les armées au combat et de pourvoir, le cas échéant, aux besoins de leurs opérations. L'ordonnance sur la défense du 7 janvier 1959 et ses textes d'application définissent bien dans cet esprit les niveaux supérieurs de responsabilité en matière de défense et de mise en œuvre des forces. Les responsabilités suprêmes sont celles du Président de la République, chef des Armées. Elu du suffrage universel et seul juge de l'emploi éventuel des forces nucleaires, le Président de la République détient en propre le pouvoir de décision et le contrôle de l'engagement des armées en cas de guerre. Il décide aussi personnellement des gestes significatifs de toute manœuvre du temps de crise que constituent, par exemple, les démonstrations voire les déploicments de forces. C'est qu'il n'est plus concevable aujourd'hui que le Gouvernement s'en remette à un généralissime de la conduite de la guerre : les frontières de la guerre et de la paix s'estompent; en même temps, la manœuvre militaire et le maniement politique des crises se confondent. Il y a là un phénomène universel dans le monde moderne qui est celui de l'atome et aussi celui de l'information instantanée qui donne à l'événement -- en le dramatisant parfois -- une interprétation politique immédiate. C'est donc le Président de la République lui-même qui arrête la politique de défense en Conseil des Ministres, les plans d'emploi des forces, les mesures de défense et, le cas échéant, la conduite de la guerre en Conseil ou en Comité de Défense. Mais il appartient au Gouvernement de mettre en œuvre les décisions ainsi arrêtées, et d'abord au Premier Ministre, ou en cas de délégation, au Ministre chargé de la Défense Nationale. La portée interministérielle de ces décisions justifie l'existence d'un organisme de synthèse, extérieur aux Armées. C'est le Secrétariat Général de la Défense Nationale, créé par décret du 18 juillet 1962, dirigé par un officier général du rang le plus élevé et dont, pour l'essentiel, la mission peut se résumer ainsi : II assure le secrétariat des Conseils et Comités de Défense. A ce titre, il prépare leurs délibérations et le Secrétaire Général, après approbation, des dossiers par le Ministre chargé de la Défense Nationale, les présente au Premier Ministre et au Président de la République, puis soumet les décisions à la signature de cette haute autorité. Il est associé à la préparation et au développement des négociations et réunions internationales intéressant la défense. Il joue un rôle de premier plan dans l'organisation et l'exploitation du renseignement gouvernemental : d'une part, il assure le secrétariat des Comités appropriés de niveau gouvernemental; d'autre part, en matière d'exploitation, il établit les synthèses de renseignement nécessaires au Gouvernement et se tient en étroite liaison avec les différents organismes de documentation scientifique et technique. Il assiste enfin le Premier Ministre et, par délégation, le Ministre chargé de la Défense Nationale pour tout ce qui concerne les activités interministérielles de défense. Il reste, on l'a dit, qu'en matière d'application de la politique de défense, le Ministre charge des Armées a la plus lourde tache. Responsable de la préparation des Armées et de leur soutien, il doit faire face à une yaste entreprise, d'une importance vitale pour la nation et rendue plus difficile par la diversité des forces et la spécificité de leur milieu d'intervention et de leur mode d'action, comme par l'importance des armements dans la stratégie moderne, alors que s'accélère le progrès technologique mais que eroissent la complexité, les coûts et les délais de la réalisation des systèmes d'armes et de la formation de leurs servants. Aussi, l'organisation adoptée par retouches successives depuis treize ans vise-t-elle à faciliter la tâche ministérielle grâce à une répartition fonctionnelle des responsabilités internes au ministère entre quelques grands subordonnés. Ainsi le Ministre est-il assisté : - en matière d'études, de recherche et de fabrication d'armement par un Délégué Ministériel pour l'Armement; - en matière administrative, financière et sociale par un Secrétaire Général pour l'Administration; · - en, matière d'étude de plans et de directives intéressant · l'organisation générale et la mise en œuvre des Forces Armées, par un Chef d'Etat-Major des Armées, dont le rôle a été précisé par deux décrets de décembre 1971, et qui a notamment vocation à devenir en cas de crise le Chef d'Etat-Major Général, c'est-à-dire le chef militaire de l'ensemble des opérations décidées par le Gouvernement. Les deux mêmes textes de décembre 1971 ont confirmé le rattachement direct au Ministre des trois Chefs d'Etat-Major d'Armée, auxquels incombe la préparation des forces de leur armée respective en vue de leur mise en œuvre, et qui ont en cas de crise vocation à devenir les adjoints opérationnels du Chef d'Etat-Major Général. Le Directeur de la Gendarmeric et de la Justice Militaire est également directement rattaché au Ministre; en cas de crise, il est cependant amené à placer certaines unités de gendarmerie sous les ordres du Commandement opérationnel interarmées. Les inspecteurs généraux de chaque armée et de la Gendarmerie - dont un décret de juillet 1972 a précisé les attributions - dépendent directement du Ministre et sont ses conseillers permanents pour tout ce qui concerne leur armée. Enfin le Contrôle Général des Armées dont les compétences s'étendent plus spécialement aux domaines administratif et financier, est à la disposition du Ministre pour toute mission d'enquête et de contrôle que celui-ci lui confie. Le Ministre dispose également pour l'éclairer sur les questions interarmées du Comité des Chefs d'Etat-Major réuni normalement chaque mois, et, sur les questions propres à une armée, du Conseil Supérieur qui en réunit les officiers généraux les plus anciens. Les Chefs d'Etat-Major exercent leur autorité sur tous les organismes, forces militaires ou services, qui appartiennent en propre aux Armées. C'est dire dès l'abord - en faisant ainsi référence aux services - que leurs responsabilités ne sont pas toutes de commandement, au sens strictement militaire du terme. Mais c'est en même temps affirmer un principe essentiel, celui de la subordination des services au commandement. Seuls, y échappent les « services » qui par leur dimension, leur importance, leur vocation, ont été érigés en organismes distincts placés sous l'autorité directe du Ministre, à savoir essentiellement la Délégation Ministérielle pour l'Armement et le Secrétariat Général pour l'Administration, le Contrôle Général des Armées occupant quant à lui et par essence la place à part d'un organisme indépendant à la disposition du Ministre pour le contrôle de l'activité d'ensemble du Ministère. Les « services », qu'il s'agisse des plus grands relevant directement de l'autorité du Ministre, ou des moins grands, relevant de celle de tel ou tel des Chefs d'Etat-Major, feront l'objet du chapitre suivant. Les développements qui vont suivre sont donc centrés sur l'analyse de la chaîne de rattachement des forces au Ministre, qui passe bien évidemment par l'intermédiaire des Chefs d'Etat-Major. La première question qui vient dès l'abord à l'esprit touche au nombre des Chefs d'Etat-Major. Il y a trois armées, l'Armée de Terre, la Marine, l'Armée de l'Air, et l'on conçoit aisément qu'un chef unique soit placé à la tête de chacune. Sans autre coordination qu'au sein même du Gouvernement, les trois armées ont été pendant très longtemps placées sous l'autorité de trois ministres différents. C'est en 1959 qu'un seul ministre a définitivement pris autorité sur l'ensemble, d'abord assisté de trois Secrétaires d'Etat, un par armée. La nécessité de mettre sur pied une force nucléaire stratégique, par hypothese interarmées, n'a fait que précipiter un mouvement, qui se dessinait à l'époque dans le monde entier, en provoquant la création en 1962 de l'Etat-Major des Armées. Même en dehors du fait, au demeurant déterminant, que la force nucléaire imposait un tel Etat-Major, celui-ci devenait indispensable à un double point de vue : la défense militaire est globale et chacune des armées a pour vocation de lui fournir des moyens le plus souvent complementaires et parfois alternatifs; la défense est, comme on l'a déjà souligné, permanente et son organisation du temps de paix doit être apte, au prix de modifications mineures et rapides, à faire face sans délai à la crise qui surviendrait brusquement, qu'en soit l'ampleur. Mais fallait-il que le Chef d'Etat-Major des Armées - autorité désignée pour la conduite des opérations - non seulement prenne le pas sur les Chefs d'Etat-Major de chaque armée, mais les couvre de son autorité en tout temps et dans tous les domaines ? Cette question s'est posée aux armées du monde entier dans les vingt dernières années; elle a reçu 4 5 des réponses diverses, quelquefois positives sans restrictions (comme au Canada), le plus souvent nuancées comme en France. En effet, s'il est vrai que la notion de l' « interarmées » est essentielle pour ce qui concerne l'emploi des forces, voire e pour l'arbitrage du choix des moyens alternatifs relevant d'armées différentes mais ayant le même objet opérationnel, une fois ce choix effectué, cette notion s'efface quelque peu devant la spécificité de la préparation de chaque armée à ses missions. Il est donc apparu judicieux d'affirmer la responsabilité sans partage du Chef d'Etat-Major des Armées dans le domaine de l'emploi et sa prééminence dans celui des choix interarmées, mais préférable de confirmer nettement la responsabilité propre des Chefs d'Etat-Major d'Armée pour ce qui concerne la vie courante et la mise en condition de leur armée respective. Après quelques retouches au fil des années, ce sont bien ces principes qu'énonce le dernier décret relatif au partage des responsabilités entre les Chefs d'Etat-Major, publié en décembre 1971. La hauteur de vues du Chef d'Etat-Major des Armées, sa situation au cœur de la décision militaire, la responsabilité finale de l'emploi qui est la sienne en font sans doute le collaborateur militaire privilégié du Ministre, mais celui-ci ne saurait se désintéresser des lourdes tâches de chaque Chef d'Etat-Major, attaché à forger son armée pour qu'elle répondé au mieux à ce que la nation et le gouvernement attendent d'elle. C'est pourquoi les trois Chefs d'Etat-Major d'Armée sont placés, comme le Chef d'Etat-Major des Armées, sous l'autorité directe du Ministre; c'est pourquoi également les grands problèmes interarmées sont débattus régulièrement au sein du Comité des Chefs d'Etat-Major que le Ministre préside en personne et réunit fréquemment, en principe une fois par mois, Le Chef d'Etat-Major des Armées, sous l'autorité du Ministre, est donc responsable en tout temps de l'emploi des forces, il en exerce le commandement opérationnel et préside à leur organisation générale. Il en établit les plans d'emploi. Ses attributions prennent toute leur ampleur quand, en période de crise, il devient Chef d'Etat-Major Général et couvre alors de son autorité l'action des trois Chefs d'Etat-Major d'Armée, ceux-ci pouvant d'ailleurs dépendre partiellement de lui én tout temps dans la mesure où des fonctions opérationnelles lèurs sont confiées. Dès le temps de paix, il exerce son autorité dans le domaine opérationnel sur les commandants des forces (Forces Nucléaires Stratégiques, 1e Armée, Forces Aériennes Tactiques, Défense Aérienne, Escadres, etc.) et détient un pouvoir permanent d'inspection sur les Armées qui lui permet d'apprécier leur aptitude à l'emploi. Il dispose dans son Etat-Major d'une division « Organisation » et d'une division « Emploi ». Là est le cœur de sa mission. Mais celle-ci doit être entendue largement. Si son action est commandée par cette responsabilité essentielle et première, clle couvre nécessairement un large domaine, dans lequel il est assisté par son Etat-Major ou par des inspections spécialisées. · C'est ainsi qu'il dispose, pour l'exercice de ses attributions d'inspection et de contrôle de la capacité des forces de Défense Opérationnelle du Territoire, de l'Inspecteur Général de ces forces même si, en cas de crise, le Chef d'Etat-Major de l'Armée de Terre a vocation à prendre leur commandement direct en qualité d'adjoint au Chef d'Etat-Major Général. Lui est également rattaché l'Inspecteur des Forces extérieures, créé par décret du 24 octobre 1972. Celui-ci exerce son pouvoir d'inspection sur ·les forces et les services des trois armées stationnés outremer, et sur les éléments métropolitains qui ont vocation à constituer éventuellement une force interarmées d'intervention. Le commandement d'une opération déterminée peut lui être confié. : « d'Etudes Générales » qui l'assiste dans l'appréciation des menaces militaires qui commandent l'évolution de nos forces, d'une division « Plans-Programmes » qui l'assiste dans l'exercice de ses responsabilités dans le domaine de la plauification et de la programmation des moyens. Sans doute, sauf pour des problèmes interarmées dont il est spécifiquement chargé, ces attributions relevent-elles pour une large part des Chefs d'Etat-Major de chaque armée qui détiennent l'initiative des propositions à faire au Ministre pour le choix des programmes d'armement et la détermination de leurs spécifications militaires. Mais, à l'évidence, entre le souhaitable et le possible, des options sont à prendre et, l'avis du Chef d'Etat-Major intéressé étant naturellement essentiel, le Ministre doit cependant recourir, pour préparer ses décisions, à une autorité militaire interarmées en mesure de classer les besoins et les demandes selon des priorités opérationnelles qui dépassent la spécificité de chaque armée. C'est pourquoi, sans pour autant s'immiscer dans l'exécution, l'Etat-Major des Armées doit pouvoir assurer la cohérence des travaux de planification et de programmation au regard de l'emploi et en fonction des ressources financières prévisibles. Pour les mêmes raisons et dans le même état d'esprit, il participe à la préparation du budget annuel à deux titres : filtre des besoins présentés par les services communs aux armées, il suit les travaux budgétaires de chaque armée et donne son avis au Ministre sur la répartition des ressources au regard des missions assignées aux forces. Enfin sa vocation à l'emploi et son caractère d'autorité militaire interarmées ont tout naturellement conduit à confler au Chef d'Etat-Major des Armées la responsabilité de la coopération militaire outre-mer, la tutelle des missions militaires à l'étranger et la direction de l'exploitation du renseignement militaire, ainsi qu'un rôle privilégié d'harmonisation à l'égard des services communs aux trois armées, dont les objectifs sont fixés pour ce qui l'intéresse par chaque chef d'Etat-Major bénéficiaire de leurs activités. Au titre des deux premiers domaines cités, l'action du Chef d'Etat-Major des Armées s'exerce dans le cadre d'une action concertée avec le Ministère des Affaires Etrangères et mérite des développements particuliers. Le Bureau des Relations Internationales de l'Etat-Major revêt de ce fait une importance qui justifie sa réorganisation et son extension, actuellement à l'étude. La coopération militaire outre-mer est une composante importante de la politique de la France à l'égard des pays africains et malgache auxquels elle est liée par des accords. La mise en œuvre de cette politique est assurée par le Secrétaire d'Etat auprès du Ministère des Affaires Etrangères, chargé de la Coopération, mais il appartient au Chef d'Etat-Major des Armées de mettre en place les moyens militaires correspondants. Ainsi, tandis que 1100 cadres de ces Etats amis sont formés tous les ans dans nos écoles civiles et que nos écoles militaires sont ouvertes à leurs officiers et sous-officiers, l'Assistance Militaire Technique met à leur disposition 450 officiers et 900 sousofficiers auxquels il faut ajouter 900 officiers (dont 800 médecins) et 1 000 sous-officiers dans des emplois non militaires relevant le plus souvent de la santé publique. Quant aux missions militaires à l'étranger, intégrées à nos missions diplomatiques, elles leur apportent le concours de nos Attachés militaires, conseillers militaires de l'Ambassadeur, porte-parole de notre armée auprès des armées étrangères, et agents du rayonnement à l'étranger de notre politique et de notre capacité militaire, technique et opérationnelle. En dépit de l'amélioration spectaculaire des moyens de communication, à l'image des missions diplomatiques dans leur ensemble, nos missions militaires sont d'un très grand intérêt, car rien ne vaut l'observateur au contact direct des hommes et des événements. Le réseau de nos attachés s'étend au monde entier; il intéresse 83 pays sur tous les continents. Réparti en 56 postes - dont 25 ont été créés dans les quatre dernières années - il comporte un effectif de 90 officiers. Aux Etats-Unis, en Grande- Bretagne et en République Fédérale d'Allemagne, la fréquence et l'importance de nos échanges en matière d'armement justifient en outre l'existence de missions techniques permanentes qui travaillent en liaison étroite avec les Attachés militaires, mais dépendent comme il se doit de la Direction des Affaires Internationales de la Délégation Ministérielle pour l'Armement. La vie de leur armée et sa mise en condition, tels sont les soucis premiers, on l'a dit, des Chefs d'Etat-Major de l'Armée de Terre, de la Marine, de l'Armée de l'Air. Leurs tâches sont lourdes et multiples et leur responsabilité essentielle. Tout ce qui concerne leur armée les regarde, qu'il s'agisse de la planification et de la programmation de ses moyens, de la préparation de son budget, de la doctrine d'emploi de ses armes et de l'entraînement de ses unités, du développement et de la fabrication de ses matériels, de sa logistique et de son infrastructure, enfin du recrutement, de la formation ct de la carrière de ses personnels. Dans leurs multiples charges, ils sont assistés d'un Etat- Major et de Directions Centrales. Dans tous leurs secteurs d'intérêt, ils ont un rôle de conception et d'exécution des décisions, qu'elles soient de leur niveau ou de celui du Ministre, qu'elles intéressent leur seule armée ou qu'elles aient une portée plus large et intéressent de ce fait le Chef d'Etat-Major des Armées. Le seul secteur qui fasse exception à cette régle est celui, fort important il est vrai, du développement et de la fabrication des matériels dans lequel les responsabilités exécutives appartiennent au Délégué Ministériel pour l'Armement, la position des Etats-Majors étant alors celle de l'utilisateur et du « client », étroitement associé à la définition des matériels comme à leur expérimentation, Les plus importantes des Directions Centrales, les Directions des Personnels ont été rattachées récemment aux Chefs d'Etat-Major par le décret de décembre 1971. Ces directions dépendaient auparavant directement du Ministre qui n'a conservé à son niveau que l'administration des officiers généraux. Cette modification, fort importante, a donné aux Chefs d'Etat-Major la possibilité d'assurer eux-mêmes la meilleure harmonie entre la gestion des personnels de carrière et la satisfaction des besoins de leur armée, entre les nécessités de l'instruction et du perfectionnement des hommes et celles de la disponibilité permanente des unités. Pour la logistique et l'infrastructure, les Chefs d'Etat-Major disposent de services spécialisés, qu'il s'agisse de l'Intendance ou des Commissariats, des Directions de Matériels ('), des Directions Centrales du Génie, du Génie de l'Air, ou des Travaux Maritimes. Pour leurs autres charges, ils sont assistés par leur Etat-Major placé sous les ordres directs d'un Major Général. La responsabilité des Chefs d'Etat-Major dans l'établissement de la doctrine d'emploi des armes et de l'entraînement des unités appelle une analyse particulière parce qu'elle illustre leur interdépendance avec le Chef d'Etat-Major des Armées. En effet, c'est ce dernier qui est responsable de l'établissement des plans d'emploi des forces et de leur emploi éventuel. A cet égard, les Chefs d'Etat-Major de chaque armée font figure de fournisseurs de moyens au Chef d'Etat-Major des Armées. Encore faut-il et c'est leur responsabilité, qu'ils mettent à la disposition du Chef d'Etat-Major des Armées et des commandants opérationnels qui en dépendent des unités formées et équipées de matériels dont elles dominent le maniement. Il est bien certain que cet entraînement, et la nature même des matériels sont étroitement liés à l'emploi des forces tel que l'envisagent le (1) Dans la marine, c'est la Direction Technique des Constructions Navales qui joue le rôle de la Direction des Matériels des autres armées, C'est pourquoi, pour cette mission particulière, elle dépend du Chef d'État-Major de la Marine et non du Délégué Ministériel pour l'Armement comme dans sa mission d'étude et de construction. gouvernement sur le plan politique et le Chef d'Etat-Major des Armées sur le plan « technique ». Mais il est vrai aussi que, chargé de l'emploi des forces, le Chef d'Etat-Major des Armées, s'il doit en vérifier la valeur notamment par des manœuvres ou des inspections, n'a pas à assurer leur mise en condition qui relève de la responsabilité des Chefs d'Etat-Major de chaque armée. Tout en marquant la nécessité d'une concertation permanente, ce partage d'attributions exprime nettement la distinction entre l'emploi interarmées des forces et la spécificité par armée de leur constitution. Il introduit au double rattachement des unités de combat. Le commandèment des forces, en effet, s'exerce à travers deux chaînes de responsabilité, la chaîne organique et la chaîne opérationnelle. La chaîne organique, qui aboutit au Chef d'Etat-Major de chaque armée, est celle qui couvre la préparation, la mise et le maintien en condition des éléments des forces. Elle est responsable du bon emploi des ressources humaines et matérielles dont elle dispose à cette fin. Chacun des maillons de cette chaîne exerce des responsabilités administratives plus ou moins étendues. Celles-ci peuvent, pour certains maillons, prendre une grande ampleur si le commandement organique assume en outre des responsabilités territoriales. La chaîne opérationnelle, qui aboutit au Chef d'Etat-Major des Armées, a dès le temps de paix le rôle essentiel de la préparation et de la tenue à jour des plans d'opérations. Elle couvre les manœuvres combinées entre éléments de force, souvent d'armées différentes. Le commandement opérationnel peut s'appliquer à une armée, une escadre, un groupement d'unités; il peut aussi couvrir une zone geographique (théâtre d'opérations, zone d'opération, zone de défense). Mais les deux chaînes, organique et opérationnelle, se confondent le plus souvent, des unités élémentaires jusqu'à un niveau élevé dans la hiérarchie. Le commandant de la force ou de la zone cumule le plus souvent en tout temps le rôle organique et le rôle opérationnel, la chaîne opérationnelle qui le relie au Chef d'Etat-Major des Armées n'étant d'ailleurs activée en permanence que s'il détient un commandement de la force nucléaire stratégique. Comme pour toutes les forces, la structure 11 organique est fondée sur des critères liés à la mission opérationnelle, l'activation de la chaîne opérationnelle est possible dans les délais les plus brefs et n'exige que des adaptations mineures. La fonction territoriale revêt une grande importance : on l'a mentionnée à propos de la chaîne organique et à un autre titre à propos de la chaîne opérationnelle. Elle appelle des développements particuliers. Le territoire métropolitain est divisé en sept régions militaires et quatre régions aériennes, le litforal en trois régions maritimes. Les sept régions militaires comprennent vingt et une divisions militaires. Les Généraux commandant les régions militaires ont des charges très étendues dans le domaine de l'administration et du soutien des forces qui sont stationnées sur leur territoire. Ils sont ainsi responsables des liaisons avec l'autorité civile régionale et locale, du recrutement et de la gestion des réserves, de la mobilisation; ils exercent leur autorité sur les services locaux (établissements de l'intendance et du matériel, etc, et sur les écoles et centres d'instructions), ils administrent le domaine immobilier militaire et assument les charges de contentieux. En matière judiciaire, ils décident de l'opportunité des poursuites devant les Tribunaux Permanents des Forces Armées. Enfin, ils exercent et c'est essentiel, le commandement organique des forces de Défense Opérationnelle du Territoire (DOT) stationnées dans leur région. La région maritime, à la tête de laquelle on- trouve un Amiral Préfet Maritime, est constituée essentiellement d'un espace maritime et d'un ou plusieurs complexes portuaires, industriels, logistiques et administratifs adaptés au soutien des forces qui y sont basées. Le Préfet Maritime a, mutatis mutandis, les mêmes charges d'administration et de soutien que les Généraux commandant les régions militaires. Responsable de la police de la navigation, et du respect de la domanialité maritime, il doit entretenir des liaisons étroites avec les administrations civiles ayant une activité maritime. II a autorité sur les directions et services locaux, y compris les arsenaux et les écoles et centres d'instruction militaires. Il exerce en outre le commandement organique des forces navales de sûreté des approches maritimes. En cas de crise, son Les Régions Militaires. | REGIONS | SIÈGES DES RÉGIONS | DIVISIONS | SIEGE DES DIVISIONS | |--------------------------------|----------------------|-------------------|-----------------------| | PARIS | 12 | PARIS | | | | 18 | TOURS | | | LILLE | 21 | LILLE | | | | 22 | AMIENS | | | | 23 | ROUEN | | | RENNES | 81 | RENNES | | | | 32 | CAEN | | | | 33 | NANTES | | | BORDEAUX | 41 | BORDEAUX | | | | 42 | POITIBRS | | | | 48 | LIMOGES | | | | 44 | TOULOUSE | | | LYON | 51 | LYON | | | | 52 | CLERMONT-FERRAND | | | METZ | 61 | NANCY | | | | 62 | STRASBOURG | | | | 63 | CHALONS-SUR-MARNE | | | | 64 | DIJON | | | | 65 | BESANCON | | | MARSEILLE | 71 - | MARSEILLE | | | | 72 | MONTPELLIBR | | | Les Régions Aériennes. | | | | | REGIONS | ÉTENDUE | SIEGE | | | 6. Région Militaire | METZ | | | | 1re, 2e, 3e Régions Militaires | PAHIS | | | | 4e Région Militaire | BORDEAUX | | | | 5e, 7e Regions Militaires | AIX-EN-PROVENCE | | | | REGIONS | ETENDUE | SIRGE | ARRONDISSEMENTS | |-----------------------------------|---------------------------------|-----------|-------------------| | 110 | Manche (moins la côte bretonne) | CHERBOURG | BREST | | 20 . | Atlantique | BREST | ROCHEFORT | | (plus côte bretonne de la Manche) | LORIENT | | | | จิต | Méditerranée | TOULON | | ## Les Régions Maritimes. 12 13 commandement devient opérationnel et s'étend à l'ensemble des moyens navals des administrations civiles. Enfin, les Généraux commandant les régions aériennes exercent leur autorité sur les forces aériennes basées dans leur région dans le domaine de l'administration et du soutien, suivant des principes semblables à ceux de l'Armée de Terre, mais leur qualité de commandant de région n'entraîne aucune autorité organique sur les forces aériennes. En fait, celles-ci, où qu'elles soient basées, ont une mission à l'échelle nationale qui requiert un commandement centralisé. Les principes de rattachement des armées au Chef d'Etat- Major des Armées et à leur Chef d'Etat-Major respectif et les différents aspects, organique, régional, opérationnel du commandement ayant été décrits, il reste maintenant à présenter l'organisation même des forces, leur articulation et leur composition en les raccordant à leurs missions et à leurs capacités militaires, telles qu'elles ont été décrites dans le premier tome de ce Livre Blanc. Les forces nucléaires stratégiques comprennent les forces aériennes stratégiques (FAS) et la force océanique stratégique (FOST). Les forces aériennes stratégiques, placées sous les ordres d'un officier général de l'Armée de l'Air dont le poste de commandement est situé à TAVERNY, disposent de trois escadres de Mirage IV à trois escadrons chacune et du 1ª Groupement de Missiles Stratégiques articulé en deux unités de neuf missiles. Le 1er G.M.S. est, on le sait, implanté sur le Plateau d'Albion en haute Provence. La force océanique stratégique, placée sous les ordres d'un amiral dont le poste de commandement opérationnel est à Houilles dispose des sous-marins nucléaires à mesure de leur entrée en service. L'amiral commandant la FOST exerce, organiquement, son autorité sur la base des sous-marins nucléaires de l'Ile Longue et sur l'ensemble de la flotte sous-marine à propulsion classique par l'intermédiaire d'un de ses adjoints. Cette disposition est justifiée par l'importance pour la FOST de la formation de ses équipages assurée pour l'essentiel sur les sous-marins classiques. Elle montre en outre avec quelle souplesse, n'excluant nullement la clarté, on peut au besoin concevoir les liaisons entre l'opérationnel et l'organique. Dans les forces de manœuvre, essentiellement destinées à la défense aux frontières et dans leurs approches, à l'intervention en Europe et en haute mer, on peut ranger la Première Armée, la Force Aérienne Tactique, les Escadres de l'Atlantique et de la Méditerranée, le Commandement des sous-marins d'attaque. La Première Armée, dont le poste de commandement est installé à STRASBOURG, est articulée en deux Corps d'Armée. Le premier Corps dont le PC est à NANCY comprend trois divisions stationnées en France autour de VERDUN (4ª division), MULHOUSE (7º division) et CoMPIÈGNE (8º division), Le deuxième Corps, dont le commandant à BADEN-BADEN assume en outre les responsabilités territoriales correspondantes, comprend deux divisions stationnées en Allemagne, autour de TREVES (1" division) et FRIBOURG (3ª division). Ces cinq divisions engerbent quinze brigades, dix mécanisées et cinq motorisées. La Force Aérienne Tactique, dont le commandant, à METZ, commande également la 11e région aérienne - cette responsabilité passant à l'un de ses adjoints en cas de conflit - comporte six escadres vouées à la reconnaissance, l'attaque, la couverture et l'appui de la 1e Armée, qui sont réparties en deux commandements tactiques dont les sièges sont à MBTZ et NANCY (1er et 2º CATAC). L'Escadre de l'Atlantique (PC à BREST) et l'Escadre de la Méditerranée (PC à TouLon) sont articulées en divisions pour les batiments, en flottilles pour l'Aéronavale. En batiments de gros et moyen tonnage, elles regroupent à elles deux, deux porteavions et un porte-hélicoptère, deux frégates et un croiseur lance-engins, scize escorteurs d'escadre et quinze escorteurs rapides. Les Prefets Maritimes de BREST et TOULON, en cas de crise ou de conflit, peuvent être investis respectivement du Commandement en Chef pour l'Atlantique et pour la Méditerranée. Le Commandement des sous-marins d'attaque, enfin, a son PC à HouiLLES. Il dispose de deux escadrilles de sous-marins à propulsion classique, l'une basée à LORIENT, l'autre à Toulon. On a déjà signalé que, organiquement, ce commandement dépend du Commandement de la Force Océanique Stratégique, en raison du rôle majeur des sous-marins d'attaque pour la formation 15 des équipages de sous-marins nucléaires lance-engins. Si l'aspect opérationnel du commandement des sous-marins d'attaque devait être activé, il le serait dans la dépendance directe du Chef d'Etat-Major des Armées, Dans les forces de sûreté chargées de la défense du territoire national, de son espace aérien et de ses approches maritimes et en particulier de la défense des points sensibles, on peut ranger le commandement des Forces de Défense Aérienne, le commandement de la DOT, et, pour une part de leurs responsabilités, les Préfectures Maritimes. Le commandement des Forces de Défense Aérienne dispose des escadres de l'aviation d'interception, et des moyens de détection et d'identification de la menace aérienne répartis entre les quatre « Zones Aérienne de Défense », correspondant aux quatre Régions Aériennes. Pour emploi, lui seront également rattachées les unités terrestres de défense , aérienne des points sensibles (en cours de constitution). En cas de conflit, il coordonne l'action des Commandants des Zones Aériennes de Défense à qui il délègue la conduite des interceptions dans leur zone. Le commandement de la Défense Opérationnelle du Territoire (DOT), est au niveau le plus élevé, on l'a déjà signalé, assuré en cas de crise par le Chef d'Etat-Major de l'Armée de Terre. En tout temps, ce commandement est préparé par l'Inspecteur Général des Forces de DOT et son Etat-Major. Au niveau régional, ce sont les généraux Commandants de Région Militaire qui ont vocation à devenir Commandants de Zone de Défense et à exercer le commandèment opérationnel de la DOT dans leur région. Les Commandants de Région Militaire prennent d'ailleurs une dimension interarmées. Leur sont directement subordonnés les généraux commandant les divisions militaires, les amiraux commandant les secteurs de défense de BREST et TOULON, le général commandant le secteur de défense du Plateau d'Albion, ainsi que les forces de la Gendarmerie Nationale participant aux missions de la DOT. Les trois Préfets Maritimes, pour leur part, sont responsables de la surveillance et de la défense des eaux côtières et disposent des forces correspondantes, y. compris l'Aéronavale basée à terre. Le Préfet Maritime de BREST assure en outre la protection des sous-marins nucléaires lance-engins dans leur base. de l'Ile Longue et aux approches pour les départs en patrouille et à leur retour. Les Forces de présence outre-mer et d'intervention assurent noire capacité d'action outre-mer, les forces d'intervention étant en outre susceptibles d'être utilisées en métropole. Les forces de présence dans les départements et territoires d'outre-mer sont placées sous les ordres directs de Commandants Supérieurs Interarmées qui ont, en cas de crise, vocation à devenir les Commandants des Zones de Défense investis par le Gouvernement des pouvoirs militaires et civils nécessaires à . l'accomplissement de leur mission. Le concept de zone de défense s'applique donc aux départements et territoires d'outremer qui en constituent cing : Antilles-Guyane, Océan Indien, Nouvelle Calédonie, Polynésie, Territoire français des Afars et des Issas. Ce concept ne peut naturellement s'étendre aux pays étrangers liés à la France par des accords de coopération militaire. Mais les forces françaises présentes dans ces pays, si elles devaient agir en vertu des accords, le feraient sous l'autorité des Commandants Supérieurs dont elles dépendent en permanence et selon les directives du gouvernement. - Quant aux forces d'intervention, qui font intervenir des éléments des trois armées, elles sont stationnées en France et dotées de commandements organiques dont la mise en mouvement serait coordonnée par le Chef d'Etat-Major des Armées et, tout particulièrement, par l'Inspecteur des Forces Extérieures qui dépend de lui, et l'action sur place dirigée par les Commandants Supérieurs. Organiquement, ces forces d'intervention comprennent, pour l'Armée de Terre, la 11º Division Parachutiste dont le PC est à PAU, articulée en deux brigades parachutistes (TOULOUSE et TARBES), la 9º Brigade aérotransportable dont le PC est à SAINT-MALO, spécialement entraînée pour les actions amphibies, enfin le groupement opérationnel de la Légion Etrangère (ORANGE et CORSE). La Marine peut intervenir par le groupement des fusiliers-marins commandos, elle dispose en outre des moyens de transport, de débarquement et d'appui naval et aérien nécessaires, pour l'essentiel à prélever sur les escadres de l'Aflantique et de la Méditerranée. L'Armée de l'Air, quant à elle, peut assurer l'appui feu des troupes engagées outre-mer par prélévement sur le 2º CATAC. Elle assure en outre l'acheminement des troupes par les moyens du Commandement du Transport Aérien Militaire (COTAM) dont le PC est à VILLACOUBLAY. 16 17 Mais ce dernier a une vocation générale à effectuer les transports aériens, de matériels et de personnels, utiles à toutes les forces, qu'elles soient nucléaires, de manœuvre, de sûreté du territoire ou d'intervention. De cette revue rapide de l'organisation des forces à ses différents points de vue, organique, régional, opérationnel, il faut retenir la souplesse et l'aptitude à faire face sans délai à la crise. A travers certaines différences spécifiques de chaque armée, de son milieu d'élection et de ses missions, on trouve des principes constants : En tout temps, les unités appelées à combattre ensemble relèvent d'un commandement propre, le commandement organique. En tout temps, les tâches de liaison avec les autorités civiles et de soutien des unités sont, au niveau de la région, remplies par un Commandant de région ou un Préfet Maritime. Ceux-ci assument en outre le commandement organique des forces à vocation régionale implantées ou basées sur leur territoire. Enfin, on temps de crise, les commandements organiques prennent valeur opérationnelle. Sauf pour la FNS, la chaîne du commandement opérationnel n'est pas activée en tout temps, mais dès le temps de paix les titulaires désignés des grands commandements opérationnels sont, pour la préparation de leur mission du temps de guerre, en relation directe avec le Chef d'Etat-Major des Armées, tout en étant dans l'exercice quotidien de leur commandement placés sous les ordres du Chef d'Etat-Major de leur Armée. Avant de clore ce chapitre, il faut présenter succinctement l'organisation de la Gendarmerie. Ainsi qu'on l'a dit plus haut, une fraction de la Gendarmerie, vouée à la Défense Opérationnelle du Territoire (DOT), est placée sous les ordres des Commandants de zone de défense en cas de crise, mais en raison de ses caractères particuliers qui sont d'être opérationnelle en tout temps et d'être vouée à des missions quotidiennes ou occasionnelles qu'elle ne partage avec aucune autre armée, la Gendarmerie dépend directement du Ministre. Sous son autorité, un haut magistrat civil, le Directeur de la Gendarmerie, assisté de deux officiers généraux de Gendarmerie, est chargé de déterminer la doctrine d'emploi de cette Arme et l'orientation générale à donner à ses activités; il assure également la direction du Service de la Justice Militaire, En outre, l'Inspecteur Général de la Gendarmerie est le conseiller permanent du Ministre pour tout ce qui a trait à l'organisation, la préparation et l'emploi de ses unités. Constituée pour l'essentiel de personnels de carrière, mais renforcée par des militaires du contingent accomplissant en tant que gendarmes auxiliaires les obligations du service national, elle comprend, en métropole, la Gendarmerie départementale, la Gendarmerie mobile et la Garde Républicaine de Paris. Un certain nombre de formations spécialisées sont en outre rattachées administrativement au Directeur de la Gendarmerie, mais mises pour emploi à la disposition d'autres autorités; ce sont : - la Gendarmerie Maritime, chargée d'assurer l'ordre et la sécurité dans les installations de la Marine; - la Gendarmerie de l'Air, chargée de la même mission dans les bases et établissements de l'Armée de l'Air; -- la Gendarmerie de l'Armement, en cours de création, qui assurera la sécurité des établissements relevant de la DMA; - la Gendarmerie des Transports Aériens, à qui incombe la fâche d'exercer la police des aérodromes civils importants; - le Groupe Spécial de Sécurité, constitué à partir de personnel de la Gendarmerie Mobile, inclus dans le dispositif de Sécurité des Forces Nucléaires Stratégiques. La Gendarmerie départementale, chargée d'assurer la sécurité et l'ordre publics est articulée en groupements (département), compagnies (arrondissement) et brigades (canton); unités élémentaires, ces brigades territoriales sont au nombre de 3 600. A ces unités polyvalentes s'ajoutent des formations plus spécialisées, telles que brigades motorisées vouées à la police de la route, brigades des recherches et brigades des fichiers pour la police judiciaire, brigades de montagne, brigades fluviales, etc. Force spécialement destinée à assurer le maintien de l'ordre, réserve générale placée en tout temps à la disposition du Gouvernement, complétant en outre l'action de la Gendarmerie départementale, la Gendarmerie mobile est articulée en 18 10 groupes d'escadrons et escadrons. Au nombre de 125, ceux-ci peuvent être des escadrons portés, des escadrons d'automitrailleuses ou de chars AMX 13, ou encore des escadrons parachutistes. Particulièrement chargée d'assurer des services d'honneur et de sécurité dans la capitale, la Garde Républicaine de Paris comporte deux régiments l'un d'infanterie, l'autre de cavalerie et plusieurs éléments spécialisés. ···· · Ces formations ainsi que les organismes administratifs et techniques qui les supportent sont regroupés au sein de commandements territoriaux, qui s'exercent à deux niveaux : Au niveau des Régions Militaires, les Commandements · Régionaux de Gendarmerie (CRG), auxquels sont rattachés une section d'hélicoptères et un centre de renseignements judiciaires. Au niveau des Divisions Militaires, les Commandements des Circonscriptions Régionales de Gendarmerie (CCRG), auxquels sont directement rattachées les unités de surveillance autoroutière. Le chapitre I consacré à l'organisation des forces et de leur commandement a dû négliger, à tous les niveaux, les fonctions de soutien, dans le sens le plus général du terme, qui sont nécessaires à la vie des Armées comme à la préparation de leur avenir. L'ensemble des unités de gendarmerie implantées dans une circonscription régionale forme Corps. Les formations hors métropole comprennent la Gendarmerie des Forces Françaises en Allemagne qui, sous les ordres d'un officier général, assure le Service prévôtal aux Armées, et les unités stationnées outre-mer. Celles-ci appartiennent à trois catégories : Ia Gendarmerie des Départements et Territoires d'Outre- Mer qui y remplit les missions normalement dévolues à la gendarmerie, les détachements d'assistance technique mis à la disposition d'Etats étrangers qui en font la demande et les détachements prévôtaux dans les bases françaises établies dans certains pays liés à la France par des accords de coopération militaire. Ainsi qu'on l'a signalé, trois de ces fonctions en raison de leur étendue et de leur importance sont en charge de hauts fonctionnaires collaborateurs directs du Ministre; il s'agit de la fonction « Armement » confiée au Délégué Ministériel pour l'Armement, de la fonction d'administration générale conflée au Secrétaire Général pour l'Administration et de la fonction de contrôle confiée au chef du Contrôle Général des Armées. Les autres fonctions de soutien, posent des problèmes de moins vaste ampleur, mais sont quotidiennement impliquées dans le fonctionnement de chaque armée, notamment en cas de conflit. Elles sont conflées à des services interarmées ou propres à chaque armée. En résumé, traduisant l'originalité de sa mission, l'organisation de la Gendarmerie présente trois caractéristiques qui lui sont propres, à savoir : une complète identité entre les chaînes de commandement organique, territorial, et opérationnel, une étroite adaptation de ses structures à l'organisation administrative du pays, enfin une extrême dispersion de ses unités sur l'ensemble du territoire, Le présent chapitre consacré à l'administration de la défense traitera done d'abord des grands organismes rattachés directement au Ministre, ensuite des Services à proprement parler, interarmées ou non. Enfin, il rendra compte des efforts de déconcentration des responsabilités administratives entrepris depuis quelques années pour alléger le fonctionnement de l'ensemble de l'organisation et en optimiser l'efficacité. # Ministration De La 21 ## 1,1 La Délégation Ministérielle Pour L'Armement. L'importance, déjà soulignée, des armements dans la stratégie moderne a justifié, en 1961, la création de la Délégation Ministérielle pour l'Armement. Chargé d'assister le Ministre en matière d'études, de recherche et de fabrication d'armement, le Délégué Ministériel rassemble, depuis cette date, sous son autorité, des Directions et Services qui, au nom d'une compétence étendue à la totalité de l'armement d'une seule armée, relevaient auparavant d'autorités différentes. Les raisons qui militaient en faveur de cette réorganisation sont nombreuses et étroitement liées à l'évolution accélérée des techniques et singulièrement à l'apparition du fait nucléaire. Face aux programmes d'une ampleur sans précédent de la Force Nationale Stratégique, il importait que les Services de l'Armement soient rassemblés pour concevoir et réaliser, tous moyens réunis, les systèmes d'armes complexes, faisant largement appel aux techniques nouvelles les plus variées, dont devaient dorénavant être dotées les Forces Armées Françaises. Par ailleurs, les techniques communes prenant une place croissante dans les programmes d'armement, les cloisonnements antérieurs entre Services techniques ne pouvaient être maintenus sans qu'il en résulte des doubles emplois et une dispersion des crédits. Enfin, la préparation et la conduite de la politique industrielle et de la politique de recherche ne pouvaient s'accommoder d'une dispersion des centres de responsabilité et de décision. Bref, la création de la Délégation Ministérielle pour l'Armement répondait à une analyse que le rapport de présentation du décret du 5 avril 1961 résumait ainsi : « Une politique rationnelle des fabrications d'armement -- et notamment la fabrication des armes les plus modernes - exige une concentration de l'autorité et des moyens qui favorise un meilleur emploi des hommes, un rendement plus élevé de l'infrastructure industrielle, une utilisation plus efficace des crédits ». Les missions de la Délégation Ministérielle pour l'Armement sont - comme cela a été expliqué dans le premier volume du Livre Blanc -- de deux natures fondamentalement différentes : les missions étatiques dans l'exercice desquelles la Délégation intervient en tant que « puissance publique », missions qui ne peuvent être le fait que d'organismes d'Etat; les missions industrielles dans l'exercice desquelles la Délégation intervient au même titre que des entreprises nationales ou privées. ## Missions Étatiques. Schématiquement, ses missions étatiques peuvent être regroupées sous trois rubriques : 1º Participer à la définition des besoins d'armement des trois Armées. Les besoins en armements des Armées sont étudiés par les Etats-Majors et la D.M.A. travaillant en étroite liaison, l'expression des besoins militaires étant l'affaire des premiers et la Délégation agissant comme Conseiller Technique chargé en particulier de transformer les besoins opérationnels en spécifications techniques, de mettre en évidence la « faisabilité » des demandes exprimées et l'incidence des performances recherchées ainsi que des aléas acceptés sur les délais et les coûts. 2º Fournir les systèmes d'armes et les matériels nécessaires aux Armées. En ce domaine, la D.M.A. agit comme une « Agence d'Approvisionnement », intermédiaire entre les constructeurs ct les Armées; elle doit notamment veiller à la qualité (performances et flabilité) des armements fournis et au respect des prix et délais. Cette mission d'approvisionnement implique les tâches suivantes : - établissement des spécifications techniques de fabrication; - choix des fournisseurs, passation des contrats; - surveillance et contrôle du développement et des fabrications; - essais et réception des matériels de série; - suivi des matériels en service. 3º Préparer l'avenir par une politique à long terme d'adaptation des moyens de production et de recherche aux besoins de la Défense Nationale. Les besoins militaires et les techniques d'armement évoluent dans le temps ainsi que les moyens financiers que le 22 pays peut consacrer à ses armements; la D.M.A. doit veiller à ce que le potentiel national reste en mesure de faire face aux problèmes techniques, scientifiques et industriels que nos programmes d'armement seront susceptibles de lui poser. Ceci implique en particulier : - la définition et le lancement de programmes de recherche permettant l'acquisition de techniques nouvelles; - la création ou le maintien à un niveau convenable de bureaux d'études, de laboratoires ou de centres de recherches compétents; - l'adaptation des moyens de production aux besoins prévisibles par une politique d'investissement ou, au contraire, de reconversion; -- la recherche des structures industrielles optimales, par le moyen, par exemple, de fusions ou de concentrations, en vue d'améliorer le rendement industriel. Les industries d'armement, qui emploient actuellement près de 280 000 personnes, occupent une place importante dans notre économie. L'évolution de ces industries ne peut donc être conduite en fonction des seuls besoins de la Défense Nationale, mais doit s'intégrer aussi harmonieusement que possible dans la politique économique d'ensemble du pays. La D.M.A. exerce, pour le compte du Ministre, la tutelle de l'industrie aérospatiale dont il est responsable. Dans les autres secteurs, la D.M.A. mêne sa politique industrielle en liaison avec le Ministère de tutelle, soit, pour les secteurs de la mécanique, de l'électricité et de l'électronique, avec le Ministère du Développement Industriel et Scientifique. ## Missions Industrielles. · La D.M.A. agit comme un véritable industriel dans les secteurs où elle dispose en propre - souvent pour des raisons d'ordre historique -- de moyens d'étude et de fabrication, c'est-à-dire essentiellement dans le domaine des armements terrestres et des constructions navales et, à un degré moindre, dans celui des réparations de matériels aéronautiques. Le premier volume du Livre Blanc a exposé en fonction des inconvénients d'une trop grande imbrication des missions étatiques et industrielles, les raisons qui ont motivé les efforts entrepris pour marquer une séparation nette entre les tâches qui découlent de ces deux types de missions, séparation qui se traduit ou se traduira dans la pratique aussi bien sur le plan de l'organisation des Services et du Commandement que sur le sur le plan comptable et administratif. Pour assurer l'exécution de ses missions, le Délégué Ministériel pour l'Armement dispose de deux catégories d'organismes à vocation fondamentalement différente : ## Les Directions Techniques. Quatre Directions Techniques (ou « opérationnelles ») ont la charge de piloter les études, les essais techniques, les fabrications et le suivi des matériels dans les domaines respectifs de l'armement terrestre, de l'armement aérien; de l'armement naval, des engins et des véhicules spatiaux, ce sont : - la Direction Technique des Armements Terrestres (D.T.A.T.) ; - la Direction Technique des Constructions Aéronautiques (D.T.C.A.) ; - la Direction Technique des Constructions Navales (D.T.C.N.); -- la Direction Technique des Engins (D.T.En.). Jusqu'en 1971 existait une cinquième Direction Technique, la Direction des Poudres; mais, depuis cette date, les activités industrielles de cette Direction ont été transférées à la Société Nationale des Poudres et Explosifs créée à cet effet, les missions étatiques à caractère militaire de cette Direction étant assurées, au sein de la D.M.A., par le Service Technique des Poudres et Explosifs, organisme jusqu'à présent placé sous l'autorité directe du Délégué et qui sera rattaché début 1973 à la Direction Technique des Engins. . Chacune des Directions Techniques reçoit mission de procéder soit commé Direction menante, soit comme Direction coopérante, à la réalisation, conjointement avec les autres Directions intéressées - la coopération interdirections étant dorénavant la règle - des systèmes d'armes dont la responsabilité lui est confiée ou auxquels elle est associée. Ces programmes d'armement doivent faire l'objet d'une saine gestion technique, industrielle et financière pour être menés à bonne fin à la satisfaction des Forces Armées. Une importance particulière s'attache à la phase de définition des 24 25 programmes qui précède le lancement proprement dit; c'est une étape peu onéreuse mais difficile et d'une importance capitale, car face à un besoin défini militairement il faut se garder de faire trop vite correspondre une solution technique avant d'avoir procédé à une analyse critique détaillée de toutes les solutions possibles. Avant d'engager des dépenses de développement et de production souvent très importantes, il faut présenter aux autorités appelées à en décider, un éventail de solutions chiffrées en coûts et en délais, correspondant à des caractéristiques plus ou moins ambitieuses. A ce stade, s'il est bon de procéder à un renouvellement technologique et de transférer les résultats des recherches vers des réalisations concrètes, le réalisme commande de prendre des précautions et le choix des solutions techniques doit notamment pouvoir s'appuyer sur les résultats de développements exploratoires et d'études de faisabilité. Les conclusions des études menées durant cette phase se concrétisent par l'établissement d'un document qui définit le programme et les conditions de son déroulement, en particulier en ce qui concerne les besoins financiers et le calendrier, et prend en quelque façon la valeur d'une charte entre la D.M.A. et l'Etat-Major intéressé. Une fois le lancement décidé, le respect des caractéristiques opérationnelles et techniques, des délais et des coûts, doit faire l'objet des soins les plus attentifs. C'est pourquoi, pour chaque programme majeur, le Délégué désigne un « Directeur de programme » responsable de la gestion tant au plan technique que financier, qui a pour tâche de veiller au fil du temps, parfois fort long, pendant lequel se concrétise un programme, au respect des objectifs prioritaires qui ont été fixés, d'alerter les autorités responsables et de proposer ou susciter des actions correctives, si l'on venait à s'en écarter. LES DIRECTIONS ADMINISTRATIVES (ou « fonctionnelles »). A ces Directions sont confiées un certain nombre de tâches générales intéressant l'ensemble de la D.M.A. Ces Directions sont : - la Direction des Personnels et Affaires Générales (D.P.A.G.) qui assure ou coordonne au sein de la D.M.A., le recrutement, la formation, le perfectionnement, l'administration et la gestion des personnels de l'Armement, la répartition des effectifs, la gestion des crédits de personnels et de fonctionnement; - la Direction des Programmes et Affaires Industrielles (D.P.A.I.) qui est un organisme de synthèse structuré en trois Sous-Directions : « Organisation », « Plans-Programmes », « Affaires Industrielles ». Elle centralise les projets de programme élaborés par les Directions techniques et participe pour l'ensemble des Directions et Services relevant de la D.M.A. à l'élaboration des plans financiers, des Lois de programme et des budgets correspondants. Elle assure les travaux de planification économique qui en résultent en précisant notamment l'impact des plans et programmes des Armées sur les différents secteurs de l'économie. Elle étudie les affaires domaniales et représente la D.M.A. en matière de décentralisation et d'aménagement du territoire. Elle élabore avec les Directions intéressées, la politique d'investissement et la politique industrielle concernant l'ensemble des entreprises du secteur public, parapublic ou privé travaillant pour la Défense Nationale. C'est donc la D.P.A.I. qui est chargée des études, de la préparation des décisions et de la mise en œuvre des mesures visant à adapter la structure des entreprises publiques ou privées aux programmes d'armement à moyen et long terme, adaptation dont le premier volume du Livre Blanc a exposé la finalité et les modalités. A la D.P.A.I. est rattaché le Service de la Surveillance Industrielle de l'Armement (S.I.Ar.) chargé du contrôle technique des travaux et fabrications, de la représentation de la D.M.A. auprès des autorités régionales civiles et militaires, ainsi qu'auprès des industriels et de l'information industrielle de la D.M.A .; - la Direction des Affaires Internationales (D.A.I.) est chargée d'animer et de contrôler les exportations d'armements et de coordonner les négociations relatives aux programmes d'armement exécutés en coopération internationale. Le double fondement, politique et économique, des exportations d'armement a déjà été évoqué. Quant à la coopération, si elle présente à l'évidence des aspects politiques, sa raison d'être tient au partage des coûts de développement : faute d'un tel partage, leur montant serait souvent excessif, considéré en lui-même, et surtout par référence au volume des séries de production qui le suivraient, si celles-ci reposaient uniquement sur des besoins nationaux; 27 - le Service Central des Télécommunications et de l'Informatique (S.C.T.I.) est charge de coordonner l'ensemble des affaires d'électronique et de définir et d'animer la politique industrielle dans ce secteur d'activité. A ce titre il est responsable de l'harmonisation des matériels et de la normalisation des composants électroniques militaires; il dirige les études et développements de certains matériels électroniques interarmées, dans le domaine de l'informatique en particulier où il a élaboré et animé le Plan Calcul Militaire; - la Direction des Recherches et Moyens d'Essais (D.R.M.E.) a comme son nom l'indique une double mission. En matière de recherche d'abord, elle a un rôle d'information, de programmation et de coordination, enfin d'exécution. C'est ainsi qu'elle se tient au courant des travaux réalisés en France et à l'étranger pour déceler les découvertes capables d'applications militaires, qu'elle élabore les programmes de recherche des Armées en fonction des directives ministérielles et veille à la cohérence entre les actions de recherché menées par les diverses Directions de la D.M.A., qu'elle fait exécuter hors des armées - ne disposant pas de laboratoires en propre -- la part du programme de recherches qui n'est pas prise en charge par les autres Directions. Elle assume les rapports quotidiens de la D.M.A. avec les Etablissements de recherche placés sous la tutelle de la Défense Nationale, à savoir l'Office National d'Etudes et Recherches Aérospatiales (ONERA) et l'Institut franco-allemand de Saint-Louis. En matière de moyens d'essais, elle coordonne pour l'ensemble de la Délégation le développement des moyens d'essais d'usage général, et elle assure la gestion des deux grands centres d'essais en vol d'engins : le Centre d'Essais des Landes et le Centre d'Essais de la Méditerranée. Enfin, le Délégué Ministériel pour l'Armement dispose d'un Chargé de mission Atome qui est, vis-à-vis du Commissariat à l'Energie Atomique, l'interlocuteur de la D.M.A. pour tout ce qui concerne la conception et la réalisation de l'Armement nucléaire national et des réacteurs nucléaires de propulsion navale. Par ailleurs, l'Inspection de l'Armement assume auprès du Délégué un rôle d'information, de réflexion et de conseil sur les questions qui sont d'intérêt général pour l'Armement, quelle qu'en soit la nature. L'Inspection joue un rôle particulièrement important dans le domaine des personnels. Il y a là l'effet traditionnel du souci général d'équité de l'Administration pour ses personnels, mais, en plus, l'effet de circonstances particulières à l'Armement. En effet la concentration des moyens techniques de l'armement au sein de la D.M.A. appelait des mesures de fusion des anciens corps d'ingénieurs militaires qui correspondaient en propre aux quatre Directions traditionnelles (la Direction des Poudres et les trois Directions de l'Armement terrestre, naval, aéronautique). Ces mesures étaient en effet nécessaires pour permettre la création d'équipes pluridisciplinaires appelées à constituer les nouvelles Directions fonctionnelles ou à conduire la réalisation des systèmes d'armes complexes. Depuis le 1er jauvier 1968, les onze corps anciens (cinq corps de direction et six corps d'exécution) ont été intégrés dans deux nouveaux corps - celui des ingénieurs de l'Armement et celui des ingénieurs des Etudes et Techniques d'Armement - que les ingénieurs hydrographes ont également rejoints le 1*r janvier 1969. Mais il va sans dire que cette réforme, préparée par la D.P.A.G. qui a pris un rôle accru dans la gestion des nouveaux corps et l'affectation des ingénieurs, ne va pas sans poser des problèmes d'harmonisation entre les carrières des ingénieurs issus des anciens corps. C'est là un domaine délicat où le Délégué requiert tout spécialement l'avis des Inspecteurs. Concentration des moyens, clarification des structures, définition précise et personnalisation des responsabilités, telles sont les idées directrices qui ont présidé à la création et à l'organisation de la D.M.A. et qui guident son action en vue de satisfaire au mieux les besoins des Armées, d'éclairer celles-ci dans les choix difficiles qu'elles ont à prononcer, de préparer l'avenir technologique et de concilier l'impératif de Défense et le souci économique et social. ## 1,2 Le Secrétaire Général Pour L'Administration. Le Chef d'Etat-Major des Armées et le Délégué Ministéricl pour l'Armement sont, on l'a vu, l'un dans le domaine du commandement des Armées, l'autre dans celui de l'Armement, deux collaborateurs privilégiés du Ministre. Leurs postes sont issus de la réforme qui a rassemblé au début des années 1960 29 les trois armées sous l'autorité d'un seul Ministre. Le poste de Secrétaire Général pour l'Administration a été créé en avril 1961 pour les mêmes raisons et dans le même esprit. Il répond, lui aussi, au souci de l'unité des Armées à l'échelon le plus élevé, cette fois dans le domaine de l'Administration. Son titulaire occupe, auprès du Ministre, une place également privilégiée. Les attributions du S.G.A. sont de trois ordres. Il exerce d'abord, sous l'autorité directe du Ministre, conformément à ses directives, la haute responsabilité des travaux effectués par la Direction des Services Financiers, la Direction des Affaires Administratives, Juridiques et Contentieuses, la Direction des Personnels Civils des Armées, le Service de l'Action Sociale des Armées et le Service des Pensions des Armées. Il est, d'autre part, investi de responsabilités qui lui sont propres et qu'il exerce par l'intermédiaire de commissions et comités, soit qu'il en ait la présidence ou la tutelle, soit qu'il participe à leurs travaux. Pour ne citer que les plus importants, notons la Commission Centrale de Modernisation Administrative, le Comité Interministériel du Domaine Militaire, la Commission de l'Informatique, le Comité des Archives des Armées, la Commission Paritaire Ouvrière, la Caisse Nationale Militaire de Sécurité Sociale, la Société de gestion immobilière pour les Armées, etc. La Commission de l'Energie Atomique, le Comité Technique des Programmes d'Armement méritent une place particulière dans cette énumération, car il s'agit d'une commission extérieure aux Armées et d'un comité interne aux Armées, où le Secrétaire Général pour l'Administration siège à côté du Délégué Ministériel pour l'Armement et du Chef d'Etat- Major des Armées, ce qui illustre en quelque sorte combien à eux trois, ces grands subordonnés du Ministre incarnent les compétences techniques, militaires et administratives nécessaires au fonctionnement du Ministère. Le Secrétaire Général pour l'Administration est, enfin, régulièrement chargé par le Ministre de missions particulières à caractère administratif, financier ou social. On peut dire qu'en ces matières, il est le collaborateur par excellence du Ministre. C'est à la lumière de cette observation que ses attributions doivent être appréciées. ATTRIBUTIONS EN MATIÈRE ADMINISTRATIVE. Dans l'ordre administratif, les fonctions du Secrétaire Général sont très étendues. Elles concernent les affaires juridiques et contentieuses, les affaires de personnel et l'administration generale. A ce dernier titre, on peut citer sa responsabilité en matière de modernisation administrative - et particulièrement en matière d'informatique -, sa compétence en matière de brevets d'invention concernant les Armées tant à l'étranger qu'en France, son rôle d'expert pour la mise en œuvre de la politique domaniale du Ministère, en liaison, d'une part, avec les Etats-Majors, la D.M.A. et le Contrôle Général des Armées, d'autre part avec le Ministère de l'Equipement, le Ministère des Finances (Service des Domaines), le Ministère de l'Agriculture et la Délégation à l'Aménagement du Territoire. Au titre des affaires juridiques et contentieuses, le Secrétaire Général dispose d'une Direction spécialisée qui suit notamment toutes les affaires engagées devant les tribunaux, administratifs et judiciaires, dans lesquelles le Ministère est partie. La préparation des textes législatifs et réglementaires, tant pour ce qui est de leur forme que pour l'examen du fond au regard du droit et de l'harmonie avec la réglementation existante, relève de sa responsabilité, ainsi que, le cas échéant, leur présentation au Conseil d'Etat. En matière de personnel, enfin, son rôle est très différent selon qu'il s'agit de personnel militaire ou de personnel civil. Les textes ou demandes intéressant les personnels militaires et portant sur leur condition, leurs statuts, leurs soldes et indemnités, lui sont soumis pour être étudiés du double point de vue de leur cohérence avec l'ensemble des textes qui régissent les personnels des armées et de la fonction publique, et de leur opportunité. La part prise par le Secrétaire Général pour l'Administration dans l'élaboration de la loi récemment votée sur le statut général des militaires comme celle qui lui revient dans la préparation et l'exploitation des travaux du Conseil Supérieur de la Fonction Militaire sont caractéristiques de la nature des responsabilités qu'il assume dans ce domaine essentiel. Pour les personnels civils son rôle va encore plus loin; il est, en effet, sous l'autorité du Ministre, directement responsable de la politique de gestion des fonctionnaires civils. S'agissant des quelque 100 000 personnels ouvriers des armées, la plus grande partie étant rattachée pour emploi à la Délégation Ministérielle pour l'Armement, et une autre partie aux Etats- Majors, le Secrétaire Général pour l'Administration est chargé d'harmoniser l'action de leurs employeurs directs pour l'application et la modernisation de la réglementation qui les concerne; il met en ceuvre la politique salariale et assure les négociations à haut niveau avec les organisations syndicales. 31 ## Attributions En Matière Financière. Elles s'exercent essentiellement par l'intermédiaire de la Direction des Services Financiers, qui est chargée de centraliser pour l'ensemble du département toutes les questions financières, de préparer le budget des armées, d'en suivre et d'en vérifler l'exécution, de tenir la comptabilité générale des crédits de paiement et des autorisations de programme et d'établir les règles relatives à la comptabilité générale des armées. De plus, sont menées dans le cadre de cette Direction les études générales à caractère économique et financier, comme est tenue la comptabilité économique des dépenses militaires qui permet d'élaborer les lois de programme et de procéder à leur intégration dans les plans nationaux de développement. Les tâches accomplies par cette Direction ne rendent pas intégralement compte du rôle économique et financier qui est celui du Secrétaire Général pour l'Administration. Sa participation personnelle aux travaux du Comité technique des programmes d'Armement et d'Infrastructure des Armées et à ceux du Comité de l'énergie atomique respectivement présidés par le Ministre de la Défense Nationale et le Ministre du Développement Industriel et Scientifique, son rôle de liaison avec le Ministère de l'Economie et des Finances, et spécialement la Direction du Budget, ainsi qu'avec le Commissariat au Plau, ses rapports avec la Cour des Comptes sont autant d'exemples significatifs de la nature et de l'étendue de ses responsabilités dans ces domaines. ATTRIBUTIONS EN MATIÈRE SOCIALE. Ces attributions sont très variées. Le rôle du Secrétaire Général en matière de politique du personnel le conduit à suivre de très près un certain nombre de problèmes liés aux avantages sociaux. Il exerce des responsabilités importantes par l'intermédiaire du Service des Pensions des Armées qui gère l'ensemble des dossiers des personnels militaires, fonctionnaires et ouvriers (1 200 000 dossiers) et egalement par le canal de l'action sociale des Armées qui a pour mission d'aider les ressortissants (300 000 militaires de carrière, 150 000 personnels civils, 280 000 appelés, soit 1 600 000 personnes avec les familles et les personnels retraités) à mieux s'adapter à leur milieu et à la vie en société, en aidant à remédier aux causes qui compromettent l'équilibre physique, psychologique, économique et moral de l'individu, de la famille et du groupe. De ce fait, son action doit assurer à l'ensemble des personnels de la Défense Nationale une meilleure disponibilité dans l'acconiplissement de leurs fonctions et constitue un des facteurs du moral et du rendement. La gestion des établissements sociaux et médicaux-sociaux et celle des fonds de prêts ou secours est assurée par l'Institut de gestion sociale des Armées. Par ailleurs, il incombe à la Mission de la Formation Professionnelle et de la Promotion Sociale de promouvoir, pour les engagés et les appelés, les actions socio-éducatives, ainsi que les actions de formation permanente destinées à faciliter le retour à la vie civile. Ges actions, largement menées en liaison avec les autres départements ministériels compétents, s'appuient au sein du Ministère sur la chaîne de commandement et les officiers-conseils et sur des centre spécialisés (Contre interarmées de formation d'animateurs d'ANGOULÊME, Centre militaire de formation professionnelle de FONTENAY-LE-COMTE). En outre, le Secrétaire Général pour l'Administration exerce, à la fois à titre personnel et de par son autorité sur le bureau compétent pour traiter de ces questions, un rôle important dans la définition et la mise en œuvre de la politique de l'habitat conduite par les Armées, directement et par le canal de la Société de Gestion Immobilière pour les Armées et les Administrations (SOGIMA). Enfin, il exerce la tutelle de la Caisse Nationale Militaire de Sécurité Sociale. Ainsi, les compétences du Secrétaire Général pour l'Administration, l'amènent-elles à exercer son action dans des domaines très divers et l'on peut dire que tout ce qui touche à la vie des armées, l'intéresse de quelque façon. En effet, les Directions et Services qui lui sont rattachés comme les différents organismes qu'il préside ou dans lesquels il siège sont, par rapport à l'ancienne organisation en trois armées, des institutions de synthèse et de coordination; elles appellent des rapports personnels d'autorité à autorité. C'est bien ce qui se passe dans la réalité comme l'illustre la nature des conditions d'excrcice de l'activité du Secrétaire Général. Son intervention, qu'elle soit hiérarchique sur les Services qui lui sont rattachés, ou fonctionnelle sur les problèmes dont il a à connaître, est toujours personnelle. Conseiller ou représentant du Ministre, 33 ambassadeur des Armées auprès d'autres département ministériels ou de grandes instances de l'Etat, avocat du budget de la Défense comme des causes intéressant, du point de vue statutaire, les personnels civils et militaires des Armées, négociateur au sommet avec les syndicats, dans tous les cas il exerce soit des fonctions d'animateur et de directeur, soit des fonctions de coordinateur et d'expert qui sont essentielles. Le Secrétaire Général pour l'Administration apporte ainsi, sur tous les problèmes exclusivement ou partiellement économiques, financiers, sociaux ou administratifs, des synthèses ou des points de vue, qui, confrontés aux avis et aux études du Délégué Ministériel pour l'Armement et des Chefs d'Etat-Major, permettent au Ministre d'atteindre plus aisément aux synthèses de globales indispensables à la conduite d'un grand ministère. ## 1,3 Le Contrôle Général Des Armées. Le Contrôle est une très ancienne institution, mais tout naturellement, son champ de compétence - autrefois limité à chaque armée - a pris dans la dernière décennie une dimension interarmées et, les trois corps de Contrôleurs de l'Armée, de la Marine et de l'Aéronautique ont été fondus en un seul corps du Contrôle Général des Armées. Le Contrôle Général ne dépend que du Ministre. Au sein même du Contrôle, le souci de l'indépendance de chacun est fortement marqué : chaque contrôleur mène les travaux qui lui sont conflés de la manière qui lui convient et leur apporte les conclusions qui lui sont personnelles. Il y a là, dans une société par ailleurs aussi hiérarchisée que la société militaire, un principe d'indépendance scrupuleusement respecté, justifié par la mission même du Contrôle. Chargé en effet de vérifier dans tous les organismes relevant du Ministre ou soumis à sa tutelle la bonne application des lois, des textes réglementaires et des instructions ministérielles qui en régissent l'organisation et le fonctionnement, le Contrôle Général des Armées assiste le Ministre en lui faisant part de ses observations et des suggestions qu'elles lui inspirent. Son action repose sur la sauvegarde du droit des personnes et des intérêts du Trésor. L'action du Contrôle Général des Armées prend les formes soit d'un contrôle a posteriori, soit d'un contrôle a priori, soit d'une surveillance continue. Le contrôle a posteriori, qui constitue sans doute la part à la fois la plus importante et la plus originale de son action, s'exerce par des missions efféctuées au nom et pour le compte exclusif du Ministre qui en fixe le programme annuel. Le champ des investigations du contrôle est étendu à tous les Etats-Majors, formations, établissements et Services dépendant du Ministre, à l'échelon central comme à l'échelon régional et local. Répartis en groupes spécialisés chargés respectivement de l'organisation générale des Armées, des Services industriels et des industries d'armement, du domaine et des Services immobiliers, de la comptabilité des matériels et des moyens modernes de gestion, des Services de soutien des matériels, des Services communs divers, des Services de soutien des personnels, de l'Inspection du travail, les contrôleurs disposent dans l'exécution de leurs missions de très larges pouvoirs d'investigation. Détenteurs d'une « Commission » signée personnellement du Ministre, ils sont amenés à s'entretenir avec les autorités centrales et régionales, à les informer de leurs constatations, à recueillir leurs avis, à étudier avec elles les mesures suceptibles d'améliorer le fonctionnement des organismes contrôlés. En effet, si le redressement des anomalies observées par rapport à la réglementation est la fâche du Contrôle la plus souvent évoquée, celui-ci conçoit son rôle d'une façon beaucoup plus dynamique : il est voué à la recherche permanente des mesures et des réformes propres à accroître le rendement des crédits engagés dans les activités militaires de toute nature. C'est pourquoi le Contrôle dispose d'un Service d'études générales qui joue un rôle éminemment moteur dans les études d'organisation, d'adaptation des Services et de modernisation des méthodes de gestion. Le contrôle a priori, ou contrôle préalable, porte sur les actes importants de l'Administration Centrale dans les domaines juridiques, économiques, financiers et d'organisation. Ainsi, le Contrôle Central est-il amené à donner son avis sur les projets de textes législatifs ou réglementaires. Chargé de veiller à l'application de la réglementation en matière de marchés publics, il étudie les projets de marchés importants et notamment les marchés d'armement; pour les besoins de ces études il peut être amené à suivre les négociations avec les titulaires, surtout si ces négociations présentent un caractère international. Enfin, dans le domaine financier, il contrôle le lancement des 85 programmes d'équipement et l'engagement de crédits correspondants. En toutes ces affaires, il formule les avis, observations et propositions qu'il juge utiles, quant à la régularité et quant à l'opportunité. Pour nécessaire qu'elle soit, la pratique du contrôle a priori, si elle devait s'étendre suivant un processus dont il ne faut pas se cacher qu'il est assez naturel, présenterait cependant des inconvénients graves du fait de l'allongement des délais administratifs et en diminuant le sens de la responsabilité des Directions du Ministère. Aussi est-il nécessaire de veiller à le limiter aux cas réellement importants, voire de restreindre au besoin son domaine - comme l'a fait une décision ministérielle de 1971 - pour éviter un accroissement inacceptable du volume des affaires qui y sont soumises. Au titre de la surveillance continue, certains contrôleurs assurent l'inspection du travail dans les établissements industriels des armées, jouant ainsi un rôle important en matière d'hygiène et de prévention des accidents. D'autres, et c'est capital, sont désignés par le Ministre pour remplir les fonctions de Commissaire du Gouvernement auprès des principaux fournisseurs de matériels d'armement. Ils ont accès dans les entreprises dont ils vérifient les comptes et apprécient la situation financière. Ils suivent l'exécution des marchés militaires passés avec ces entreprises, apprécient les éléments intervenant dans les prix de revient et dégagent la marge bénéficiaire réalisée. Le Contrôle Central, enfin, suit l'exécution du budget. Il exerce une surveillance sur les approvisionnements constitués par les Services et contrôle la comptabilité des matériels et celle des travaux. L'ensemble de ces activités, la vue synthétique qu'elles lui donnent du fonctionnement du Ministère, l'esprit d'objectivité qui le caractérise, font du Contrôle Général un groupe d'experts dont l'autorité morale est unanimement reconnue au sein des Armées et dont les avis sont extrêmement appréciés du Ministre. Cette réputation s'étend à l'extérieur des Armées d'abord parce que le Contrôle Général des Armées assure les liaisons du Ministère avec la Cour des Comptes, ensuite en raison des charges de Commissaire du Gouvernement remplies par certains contrôleurs, enfin par la part que prend le Contrôle à certaines négociations de marchés d'armement, notamment internationaux. ## Les Services A Vocation Interarmées. A côté des grands organismes qui viennent d'être évoqués, on trouve au sein des Armées des Services qui pour avoir un domaine de compétence plus restreint, n'en ont pas moins une vocation interarmées. Ce sont essentiellement le Service de Santé des Armées, le Service des Essences, le Service du Recrutement. Il se trouve que ces trois Services sont rattachés au Ministre par des voies différentes, ce qui illustre bien la souplesse de l'organisation et sa faculté d'adaptation aux caractéristiques propres de chaque Service. Le Service de Santé des Armées, en effet, est directement rattaché au Ministre, mais celui-ci, conservant le contrôle personnel des actions du Service tournées vers l'extérieur des Armées, a délégué au Chef d'Etat-Major des Armées le soin de contrôler les actions de soutien des Armées elles-mêmes, Le Service des Essences, doté d'une grande autonomie par son budget annexe, est rattaché au Chef d'Etat-Major des Armées. Quant au Service du Recrutement, parce que l'Armée de Terre est de loin la principale utilisatrice des appelés du contingent, c'est au Chef d'Etat-Major de l'Armée de Terre qu'il est rattaché. ## 2,1 Le Service De Santé Des Armécs. Ce Service est, comme la Délégation Ministérielle pour l'Armement, le résultat de la fusion des Services homologues des trois Armées. Cette fusion qui remonte à vingt ans sur le plan de l'organisation, n'a vu son achèvement total qu'en 1968 par la fusion des corps propres à chaque armée. Le Service de Santé réunit maintenant sous une même autorité 2 700 médecins, 250 pharmaciens, plus de 400 officiers d'administration et près de 2 000 personnels féminins spécialistes. Il accueille, en outre, les médecins et infirmiers du contingent. Le Service de Santé et les hommes qui servent dans ses rangs sont caractérisés à la fois par la compétence et le dévouement qui sont l'apanage des professions médicales et par le désintéressement et la disponibilité propres à la fonction militaire. Ces caractéristiques ont amené au fil des aunées le gouvernement à recourir largement au Service de Santé des Armées pour des missions nouvelles, qui s'ajoutent à ses missions traditionnelles et pèsent lourdement sur son organisation, mais donnent la mesure de ses qualités. 86 37 Eminemment représentative d'une conception moderne de la protection médicale des collectivités, la médecine militaire justifie des développements particuliers qui feront l'objet du chapitre V. ## 2,2 Le Service Du Recrutement. Le Service du Recrutement relève, on l'a dit, du Chef d'Etat-Major de l'Armée de Terre. Chargé d'élaborer la réglementation relative au recrutement des Armées et de mettre en œuvre cette réglementation, il intervient au profit des trois Armées en France métropolitaine et dans les départements et territoires d'Outre-Mer. Son champ d'action couvre la formation de la classe annuelle après recensement par les autorités civiles, l'affectation des appelés dans les Armées ou dans les Services de la coopération et de l'aide technique, l'affectation dans les réserves des . sous-officiers et hommes du rang quittant le service, la gestion des personnels soumis aux obligations de défense, enfln, l'information des jeunes gens sur la réglementation et les conditions d'exécution du Service National. Le Service du Recrutement comprend un Service central chargé de la conception, des méthodes, des statistiques et de la réglementation, et des organismes régionaux chargés pour l'essentiel de l'exécution. Chaque Région Militaire dispose d'une Direction Régionale, d'un ou plusieurs Bureaux de Recrutement et d'un ou plusieurs centres de Sélection. Les Burçaux de Recrutement sont chargés, sous l'autorité du Commandant de Région, de l'administration et de la gestion des personnels soumis aux obligations du Service National. Les personnels dégagés de cette obligation ainsi que les étrangers ayant servi dans l'Armée française sont rattachés à un Bureau Central de Recrutement établi en province. L'automatisation des tâches d'un Service qui gêre la situation militaire de plus de sept millions de personnes fait aujourd'hui l'objet d'études et de projets très avancés. Le Service du Recrutement est le point de contact par excellence entre les Armées et la quasi-totalité des citoyens. L'amélioration constante de son organisation comme la qualité des prestations qu'il fournit, tant au bénéfice des trois Armées qu'au profit des individus eux-mêmes, constitue un des soucis permanents de l'administration de la Défense. ## 2,3 Le Service Des Essences. Le Service des Essences des Armées est chargé d'assurer, conformément aux directives du Chef d'Etat-Major des Armées dont il relève, l'approvisionnement, le stockage et la distribution des carburants, lubrifiants, produits divers et combustibles liquides nécessaires aux Armées, à l'exception des combustibles liquides et lubrifiants associés destinés aux bâtiments de la Flotte, qui sont du ressort du Commissariat de la Marine. Le Service des Essences jouit de l'autonomie que lui confère un budget annexe. Fournisseur des Armées, il exerce à ce titre une fonction commerciale; chargé de l'entretien des infrastructures appropriées dont les Armées sont propriétaires, il est à ce titre pourvoyeur de Services; enfin l'extension de ses activités en cas de crise confirme sa vocation opérationnelle et, partant, son statut militaire. ## Les Services Propres A Chaque Armée. Subordonnés au Commandement, les Services des trois armées ont pour rôle essentiel de pourvoir aux besoins des forces qu'il s'agisse des personnels, des matériels ou de l'infrastructure. SOUTIEN DES PERSONNELS. Chacune des trois armées dispose d'un Service dont la mission principale est d'assurer, en liaison étroite avec le commandement, l'entretien des personnels dans les domaines de la rémunération, de l'alimentation, de l'habillement, du couchage et du casernement. Si leur finalité est identique, les structures et les modalités de fonctionnement de l'Intendance de l'Armée de Terre et des Commissariats de l'Air et de la Marine diffèrent quelque peu. Ces disparités découlent de l'indispensable adaptation des Services au caractère particulier des forces qu'ils soutiennent. L'Armée de Terre exige pour sa part une décentralisation de ses Services à l'image de la dispersion de son stationnement, elle aura donc recours à une organisation à tendance territoriale; l'Armée de l'Air articulera son Conmissariat sur le schéma de ses commandements opérationnels; la Marine enfin regroupera l'essentiel de ses Services dans les bases navales qui servent de structure d'accueil à tous les supports dont doivent bénéficier ses bâtiments pendant leur séjour au port. ક કે 39 Quoi qu'il en soit, ces Services exercent quatre fonctions principales ; ils sont pourvoyeurs de biens, de deniers, de services, ils assurent l'administration des forces. Pourvoyeurs de biens, les trois Services réalisent pour les besoin des trois Armées les effets d'habillement, les équipements individuels, les matériels de couchage et de casernement, les matériels des subsistances. Pourvoyeurs de deniers, les trois Services mettent à la disposition des unités de l'Armée de Terre et de la Marine et des bases de l'Armée de l'Air les ressources financières nécessaires au prêt des appelés, à l'alimentation, et au fonctionnement courant. Ils assurent le service de la solde des personnels de carrière et le versement des salaires aux personnels civils, ainsi que le règlement des déplacements. Pourvoyeurs de services, ils reçoivent les engagements vérifient les dossiers de pension et les transniettent au Service des pensions des Armées. Ils assurent l'ordonnancement des dépenses dont ils ont la responsabilité et celles de certains autres Services. Ils établissent et instruisent les dossiers contentieux intéressant les forces qu'ils soutiennent. Enfin, l'Intendance assure pour le compte des corps de troupe la passation des marchés et le règlement de certaines dépenses. En charge de l'administration des forces, les trois corps ont pour fonction principale de garantir la bonne administration des unités, qui dépend d'abord des chefs de corps, des commandants de base et des commandants de bâtiments. Néanmoins Intendants et Commissaires jouent, de façon plus ou moins directe selon les Armées, le rôle de conseiller auprès de ces autorités. A cette fonction, sont associées deux responsabilités : la surveillance administrative par délégation permanente du commandement et la vérification des comptes liée à leur fonction d'ordonnateur. SOUTIEN DES MATÉRIELS. Le soutien des matériels des Armées recouvre trois grandes fonctions. La fonction « gestion » comporte, d'une part, la mise en place des dotations de matériels fixées par les Etats-Majors, dés leur livraison par les Directions Techniques de la Délégation Ministérielle pour l'Armement, d'autre part le contrôle de l'existence de ces matériels, jusqu'à leur réforme. La fonction « approvisionnement » garantit la maintenance en pièces de rechanges en sorte que le parc en cause soit soutenu convenablement pendant tout le temps nécessaire. La fonction « maintien en condition », enfin, couvre tous les problèmes d'entretien et de réparation, y compris l'élaboration de la documentation technique, la mise en œuvre des moyens de test et de contrôle et la formation des spécialistes nécessaires à toutes ces tâches. L'organisation du soutien des matériels diffère d'une Armée à l'aufre. Lè Service du Matériel de l'Armée de Terre est en charge de tous les matériels et armements dont les forces sont dotées. Une direction centrale coordonne l'ensemble des fonctions du Service dont l'organisation est territoriale ou spécifique de la 14 Arméc. Chaque Région Militaire dispose d'une Direction Régionale du Matériel et d'un ou plusieurs établissements implantés sur son territoire. Le corps de bataille dispose d'unités de réparation légères ou renforcées qui lui sont propres et dont l'organisation est calquée sur celle de ses unités. Le Service du Matériel de l'Armée de l'Air est ordonné autour d'une Direction centrale qui assure le pilotage d'établissements spécialisés (approvisionnement, révision, réparation) implantés sur l'ensemble du territoire. La Direction Technique des Constructions Aéronautiques garde la responsabilité des grosses réparations. L'organisation du soutien des matériels de la Marine est plus complexe car les responsabilités, tant du point de vue de l'approvisionnement et du stockage, que de la réparation, intéressent quatre organismes différents. La Direction Technique des Constructions Navales déjà responsable de la construction des bâtiments de la Flotte est particulièrement chargée des réparations les plus délicates et les plus importantes. Les Ateliers Militaires de la Flotte et les Ateliers Militaires des Torpilles qui sont implantés dans les principaux ports assurent les réparations de moindre importance. La Direction Centrale du Commissariat approvisionne et délivre les combustibles, les matériels mobiles d'armement et pour l'essentiel les matériels consommables. Le Serviçe Central de l'Aéronautique Navale, enfin, soutient tous les matériels spécifiques de l'Aéronavale, les grosses réparations étant toutefois conflées à la D.M.A. Une exception à ces règles intéresse les sous-marins nucléaires lanceurs d'engins qui sont soutenus par un organisme spécialisé implanté à l'Ile Longue. 40 41 ## Soutien De L'Infrastructure. Pour construire et pour gérer son domaine, la Défense Nationale dispose de trois Directions d'infrastructure hiérarchiquement rattachées aux Etats-Majors de l'Armée de Terre, de la Marine et de l'Armée de l'Air. La Direction Centrale du Génie, la Direction Centrale des Travaux Immobiliers et Maritimes et la Direction de l'Infrastructure de l'Arnée de l'Arnée de l' l'Air possèdent chacune des compétences domaniales et immobilières. La possibilité de substituer à ces trois Directions une Direction Centrale du Génie et de l'Infrastructure Militaire est aujourd'hui à l'étude. Depuis plusieurs années, un effort d'harmonisation de ces compétences a été poursuivi. La Direction Centrale du Génie s'est vu confier la responsabilité de la construction de tous les logements militaires, et prend en charge les travaux des Services interarmées. La Délégation Ministérielle de l'Armement lui confie également tous ses travaux à l'exception des constructions dans les ports ou sur les bases aériennes qui sont respectivement pris en charge par la Dircction des Travaux Maritimes et la Direction de l'Infrastructure de l'Armée de l'Air. Enfin, l'action de chacun de ces Services, pour spécifique qu'elle soit de l'Armée dont ils dépendent, a nécessairement un certain retentissement en dehors des Armées sur le plan régional, voire national. C'est que l'action domaniale et immobilière des Armées ne peut être dissociée de son contexte géographique. Aussi, le Ministre intervient-il d'une part dans les grandes décisions de l'espèce, d'autre part dans la définition d'une politique domaniale et immobilière commune aux Armées. Celle-ci sera évoquée plus loin au Chapitre V. ## . 4 La Modernisation De La Gestion Des Ressources. Au terme de ce chapitre consacré à l'administration de la défense, on ne peut manquer de constater la nécessaire complexité d'une organisation qui prend en compte tous les besoins de nos forces en temps de paix comme en temps de crise ou de conflit. Cette complexité est en effet inhérente à la nature et à la multiplicité des problèmes que cette organisation doit traiter. Elle doit dans toutes ses parties jouer son rôle de façon coordonnée et cohérente et cependant éviter toute lourdeur inutile. C'est pourquoi l'administration des Armées repose depuis longtemps sur deux principes essentiels qui sont la subordination des Services au commandement et la déconcentration des pouvoirs de l'administration centrale aux commandements subordonnés. La décision administrative doit être prise au niveau le plus bas de la hiérarchie qui détienne tous les éléments nécessaires à la décision et il faut se garder de la tentation d'une centralisation excessive qui, en surchargeant les échelons centraux de tâches secondaires, les distrairait de leurs fâches essentielles sans pour autant garantir une meilleure décision, ne serait-ce qu'en raison de la dégradation inévitable de l'appréciation des contingences locales qui la commandent ou la conditionnent. Les efforts actuels en vue de la rationalisation des choix budgétaires évoqués dans le premier tome de cc Livre Blanc et le mouvement général qui se dessine depuis quelques années dans tous les milieux en faveur de l'amélioration de la gestion ont créé des conditions très favorables à la recherche de nouveaux modes de gestion des ressources. C'est ainsi que depuis deux ans se développent au sein des Armées les expérimentations des « budgets de fonctionnement » dans les forces et des « budgets de gestion » dans les services. Ces nouveaux outils ont, comme leur nom l'indique, une dimension comptable, mais il ne faudrait pas les réduire à cette dimension. En effet, puisqu'ils doivent, par hypothèse, être utilisés par des échelons de décision déconcentrés, ils supposent la prise en considération par ces échelons, qui constituent de véritables centres de responsabilité, des objectifs qui leur sont assignés par l'administration centrale. Ainsi, la déconcentration de la décision et l'exercice du libre choix de l'utilisation des ressources mises à la disposition impliquent un accord préalable et explicite sur les objectifs à atteindre par le centre de responsabilité. Prenant donc en considération les objectifs et les ressources, les responsables sont invités, dans le cadre des budgets de fonctionnement et des budgets de gestion, à optimiser l'efficacité de leur gestion, à confronter prévisions et réalisations quant aux moyens financiers et quant aux résultats et, partant, à améliorer les prévisions ultérieures. Les budgets de fonctionnement, qui concernent les forces, sont en cours d'expérimentation à différents échelons de la hiérarchie. Il faut à chaque échelon veiller à distinguer les 42 43 dépenses sur lesquellés le commandement ne dispose d'aucune action, par exemple les dépenses de rémunération des personnels, et celles sur lesquelles il peut et doit exercer un choix. Il apparaît ainsi que les ressources correspondant au fonctionnement courant des unités élémentaires peuvent, et donc doivent, être réparties par les chefs directs de ces unités, tandis que, suivant les Armées, la majorité des dépenses liées à la mise en condition opérationnelle des forces engage la responsabilité directe des commandants de ces forces, à un échelon hiérarchique supérieur à celui des commandants d'unités. On voit ainsi apparaître en fonction de la hiérarchie des responsabilités une déconcentration plus ou moins poussée de la décision et des moyens financiers correspondants. Les budgets de fonctionnement en cours d'expérimentation illustrent ces principes. La Gendarmerie constitue une exception car la distinction entre vie courante et activité opérationnelle y est sans portée, en raison du caractère en permanence opérationnel de cette arme et des délégations d'autorités consenties jusqu'à l'échelon des corps. Les centres de responsabilité des budgets de fonctionnement sont donc les corps eux-mêmes, toutes dépenses de fonctionnement confondues, hormis celles qui, en raison de leur caractère obligatoire, sont gouvernées par la Direction de la Gendarmerie elle-même. Depuis 1971, les expérimentations se sont largement développées et préfigurent dès maintenant une prochaine généralisation : Les effectifs concernés dans les trois Armées et la Gendarmerie étaient de 12 600 en 1971, ils dépassent 60 000 en 1972 et atteindront 175 000 en 1973. La mise en place de budgets de gestion dans les services chargés du soutien des forces répond à deux objectifs. Elle est d'abord un complément nécessaire des budgets de fonctionnement en ceci qu'un choix efficace des responsables de ces budgets suppose une meilleure connaissance des coûts des prestations fournies par les services, voire une adaptation des conditions financières de cette fourniture. Elle est ensuite, pour les services eux-mêmes, une voie d'amélioration de leur gestion propre. Outil inspiré des méthodes de la comptabilité analytique, le budget de gestion se doit de distinguer les charges spécifiquement militaires du service afin de lui permettre, ces charges particulières étant isolées, de comparer sa productivité avec celles des entreprises extérieures ayant des activités semblables. Les études engagées dans cette voie depuis deux ans intéressent l'Intendance et les Commissariats, les Serviçes du matériel, les Services immobiliers et les hôpitaux militaires. Les expériences en cours dans ces domaines mettent en évidence la nécessité à terme d'une réforme de structure du budget des Armées. En effet, la gestion du budget repose sur le principe de la spécialité des crédits, c'est-à-dire sur l'obligation de les dépenser pour l'objet prévu dès la confection du budget. Sans doute est-il possible d'effectuer des redressements en fin d'année par la voie des collectifs budgétaires, mais la procédure est nécessairement lourde et il faut le considérer comme un bien car il serait malsain de ne pas tenir à l'application aussi rigoureuse que possible du principe de la spécialité. Par contre, en se référant à l'objectif de base de la rénovation en cours qui est, on l'a dit, de situer la décision au niveau le plus bas possible qualifié pour en juger, il faut bien reconnaître que le cloisonnement du budget au fil des ans a introduit des obstacles artificiels à l'arbitrage des dépenses concourant finalement au même objectif et impliquant le même niveau de responsabilité. C'est pourquoi une simplification de la nomenclature budgétaire s'imposera au moment opportun, pour permettre la pleine utilisation des méthodes nouvelles de gestion et faciliter en même temps le raccordement du budget classique au budget de programme par objectifs qui est le fruit des efforts de rationalisation des choix budgétaires. L'administration de la défense met en œuvre, on l'a vu, organisation nombreuse et diversifiée, aux problèmes une multiples et variés. Il faut irriguer cette structure complexe et faire en sorte que chacun de ses membres, à sa place et dans son domaine, ait une vision claire des finalités qu'il doit poursuivre à travers son action. Là est la raison d'être de la hiérarchie, là est la raison d'être des procédures de concertation ou de gestion évoquées au fil de ce chapitre. Quand aux finalités elles-mêmes, elles sont bien claires. L'administration des Armées n'est pas une fin en soi. Constamment tendue vers une amélioration du rendement de ses activités, elle est au service de notre puissance militaire, c'est-à-dire de nos forces dans leur vie quotidienne, leur entraînement en vue du combat et leur modernisation, gages de leur disponibilité et de leur efficacité potentielle, aujourd'hui et demain, 44 45 LA ## Fonction Militaire 42 000 officiers, 196 000 sous-officiers, 10 000 membres du personnel féminin, 325 000 hommes du rang, répartis entre les trois Armées - de Terre, de Mer et de l'Air - le Service de Santé, la Gendarmerie et la Délégation Ministérielle pour l'Armement, au total 573 000 personnes dont environ 170 000 militaires de carrière, 135 000 engagés et 268 000 appelés du contingent : telles sont, en cette fin d'année 1972, quelques-unes des données caractéristiques des effectifs de la collectivité militaire. Ces chiffres, bien que sensiblement inférieurs à ceux qui eussent pu être relevés il y a dix ou vingt ans, font apparaître l'importance numérique de la population militaire. De leur côté, les effectifs des fonctionnaires civils de l'Etat s'établissent à quelque 1 600 000. C'est dire qu'en ne tenant pas compte ici des quelque 139 000 agents civils de l'Etat rémunérés sur le budget de la Défense Nationale, dont on peut dire qu'ils participent, pour leur part, au soutien, entendu au sens large, de la fonction militaire, les militaires, en y incluant ceux du contingent, représentent à peu près le quart des serviteurs de l'Etat. Au sein de cet Etat, les militaires assument une fonction particulière, qui, à elle seule, suffit à leur conférer leur marque distinctive. Mais, à l'exercice de cette mission, se trouve, en outre, liéc une condition politique, sociale et professionnelle qui contribue à confirmer leur place particulière dans la nation. La mission des militaires tient dans ces quelques mots : la défense de la République par la force des armes. C'est là une définition simple. Sa concision même rend compte du caractère exorbitant des responsabilités qui peuvent peser sur ceux qui ont à la remplir. Il reste à apprécier les exigences, les obligations et partant les servitudes de leur condition, à décrire enfin la considération et les garanties dont l'Etat les entoure, non sans observer que la sauvegarde de leur dignité est d'abord le fait de leur propre comportement, aussi exemplaire que soit la rigueur qui est conférée à leur sfatut par la loi. ## 1 La Condition Militaire. 1,1 Les Exigences Morales. Le fondement profond, traditionnel mais toujours présent du particularisme de la fonction du militaire tient à ce que sa mission est d'éviter le recours à la violence tout en se tenant prêt à l'employer au service du pays. Tant que la preuve ne sera pas apportée que ce recours à la violence peut être écarté au bénéfice de solutions dont l'humanité poursuit en vain la recherche depuis le début de son histoire, il appartiendra à l'Etat de disposer d'un instrument charge, en son nom et au bénéfice de tous, de manifester sa force, dès lors qu'auront été épuisés tous les autres moyens. Les hommes qui en recevront délégation doivent disposer de vertus d'autant plus rares que leur place dans la hiérarchie les rendra plus responsables de la vie et de la mort de leurs camarades de combat comme de leurs adversaires. Les véritables lois de la guerre sont d'abord celles que les exécutants s'imposent à eux-mêmes ou imposent à leurs subordonnés. C'est dire qu'il s'agit bien d'une haute morale et d'une éthique sans l'existence desquelles rien ne saurait contrarier les excès que la guerre peut engendrer, de par sa propre nature et en raison de l'agressivité biologique de l'espèce humaine, si mal corrigée, à cet égard, par la civilisation. Une conception élevée, très au-dessus de la morale quotidienne doit donc animer tous ceux auxquels l'Etat confle ses armes, non seulement ceux qui auront à en faire ou à en commander l'usage, mais aussi les artisans des soutiens de tous ordres qui le rendent possible. Réunis par l'uniforme militaire, qu'ils soient administrateurs ou ingénieurs, médecins ou techniciens, et quels que soient leurs grades, ils adhèrent aux mêmes valeurs et leur référence fondamentale, leur finalité ultime est la Défense. A des fitres divers, ils incarnent tous la détermination du pays à défendre si nécessaire par les armes, la vie, la sécurité et la liberté de tous les citoyens; leur élévation morale et leur soumission à l'Etat apportent à la sauvegarde de la paix la contribution la plus utile, et sont en cas de malheur le plus sûr rempart contre ce que la guerre peut avoir de résolument inadmissible. Sur les vertus du combattant, tout a été dit, et aucun des témoignages, grands ou modestes, des faits et gestes héroïques qui ont marqué tous les combats passés ne doit être perdu. Pourtant, lorsque le drame s'éloigne dans le temps, l'oubli fait son œuvre et les perspectives se transforment : on ne voit plus qu'un affrontement dépassant infiniment chacun des acteurs, dont l'action individuelle serait tenue pour negligeable, alors que le comportement du combattant est toujours déterminant dans le sort des armes, et qu'un petit nombre peut même à certains moments changer le cours de l'évolution d'un conflit. Quelle que soit l'étendue des hostilités qui peuvent encore se produire, la puissance des moyens mécaniques mis en œuvre, la force de destruction des armements disponibles, comment douter qu'une armée qui ne serait pas prête à combattre jusqu'au bout dans la discipline, dont les éléments seraient, chacun pour lui, calculateur et timoré, dont le sens de l'honneur faiblirait dans l'épreuve, pourrait, à la fin du compte, remplir sa mission ? L'endurance physique et morale, le courage, l'obéissance à l'ordre reçu, le dévouement à une cause qui le dépasse, ont toujours été les vertus du combattant et la manifestation concrète de la détermination de la nation au combat pour sa liberté. Peut-être ne tiendra-t-on ces vertus que pour celles qui étaient utiles au combattant d'hier, qui le seraient encore, à la limite, dans des conflits mineurs où se trouveraient opposés les seuls armements classiques dits « conventionnels ». Mais si, par malheur, un jour, il fallait brandir là menace des armes nucléaires pour faire face à un péril majeur, ces vertus auraientelles encore un sens ? La terreur de l'Apocalypse ne les rendrait-elle pas tragiquement dérisoires ? Il n'en est rien, au contraire. Quand tous les moyens politiques ordinaires auraient été épuisés, la lucidité et la détermination des uns, prêts à combattre quoi qu'il en coûte et à soutenir leur gouvernement dans l'ultime épreuve de la manceuvre de dissuasion nucléaire, seraient en définitive encore et toujours le meilleur rempart à la folie des autres en 48 49 leur ôtant l'illusion que la démesure même de la menace nucléaire la rend improbable. Bref, la qualité du combattant - qualité physique, qualité morale, compétence et entraînement - fait partie de la dissuasion. De telles vertus, portées à un tel niveau d'exigence, ne surgissent pas par hasard au jour de l'épreuve. Elles présupposent, chez l'individu, de solides qualités humaines qui sont précisément requises du militaire dès le temps de paix ; le caractère allié à la maîtrise de soi, le sens des responsabilités et de l'initiative combiné avec celui de l'obéissance, le désintéressement enfin. L'exigence du désintéressement, qualité qui passerait facilement pour désuète et anachronique aux yeux de beaucoup de contemporains est, de ce fait, souvent mal comprise dans la nation. Il n'est pas demandé aux militaires de faire preuve d'un détachement monacal à l'égard des conditions matérielles de vie qui leur sont faites. Mais il est par contre de règle d'accepter dans l'intérêt du service ces multiples servitudes que constituent l'envoi en mission saus préavis, le travail sans limitations d'horaires garanties, l'affectation dans une garnison défavorisée, les fréquentes mutations qui contraignent parfois à la dispersion du foyer familial et obligent à de nombreux changements d'établissements scolaires pour les enfants. Pour des raisons qui tiennent à l'état de l'opinion publique à l'égard des problèmes de défense dans les périodes de paix, le militaire dépositaire du souci de sécurité qui n'anime alors que médiocrement ses compatriotes, sait que sa fonction dans la société n'est pas toujours appréciée à sa juste valeur. Il l'accepte avec sérénité malgré ceux-là mêmes qui s'expriment sur l'Armée avec condescendance ou fausse commisération ou se permettent, le cas échéant, de la tourner en dérision; il assume en conscience la délégation de veille sur la sécurité du pays ct c'est son honneur de ne pas prendre en mauvaise part l'insouciance apparente de certains de ses concitoyens. Un tel ensemble de vertus et de qualités individuelles est rare. Il ne peut être exigé au même degré de chacun, dont la vocation - on dit plus volontiers aujourd'hui la motivation - ne peut être équivalente. Il n'en constitue pas moins la trame commune de la morale militaire qui interdit, de toutes façons, de jamais considérer un militaire comme un « civil en uniforme ». Cette morale, par son exigence, tend normalement à faire de la collectivité militaire une collectivité originale. Et cependant, ce doit être un de ses soucis premiers, comme c'est une de ses raisons d'être fondamentales, que d'être intégrée à la nation tout entière. Cette symbiose de l'Armée avec la nation dont elle émane est tout particulièrement marquée par son devoir de soumission aux directives du pouvoir politique légitime de la République et dans un autre domaine par la charge technique et morale que constituent l'instruction, l'animation et l'encadrement du contingent. A cet égard, il faut souligner une exigence singulière qui pour échapper à toute formulation juridique, ne s'en impose pas moins à tous les détenteurs de commandements dans les unités, celle de l'exemplarité. En effet, la vie militaire, plus sans doute que toute autre, implique un engagement complet, physique et moral; aucun chef ne peut espérer masquer longtemps l'ensemble de sa personnalité à ses subordonnés, mais ceux-ci sont exigeants et, dans la routine du quotidien ou dans la tension de l'épreuve, aucun chef ne peut espérer être complètement obéi s'il n'est lui-même, en quelque sorte, irréprochable. ## 1,2 Les Obligations Professionnelles. En raison directe des exigences morales propres à leur état comme des missions qu'ils se tiennent prêts à exécuter, les militaires sont soumis à un ensemble d'obligations qui éclaire Ieur particularisme. La première de ces obligations découle tout naturellement de la nature de la mission assignée à l'Armée. Dès 1789, la Déclaration des Droits de l'Homme et du Citoyen posait avec netteté le principe : « La garantie des droits de l'homme et du citoyen nécessite une force publique : cette force est donc instituée pour l'avantage de tous et non pour l'utilité particulière de ceux auxquels elle est confiée. » La puissance qui a été conflée à l'Armée, la nécessité de ne la faire servir que « pour l'avantage de tous » commande que l'Armée reste neutre à l'égard du jeu politique. De cette neutralité, elle tire son crédit dans l'opinion, sa cohésion et, en définitive, sa force. C'est pourquoi aussi l'affliation à des partis politiques est interdite aux militaires èn activité de 50 श Ainsi les réformes qui ont abouti au Statut Général des Militaires fixé par la loi du 13 juillet 1972 répondent bien à la nécessité de fondre dans un moule juridique unique deux réalités de la condition militaire actuelle. La première, traditionnelle, est fondée sur les notions de corps et de hiérarchie ainsi que sur la fermeté d'une discipline plus rigoureuse que celle qui affecte les autres régimes applicables aux agents de l'Etat. La seconde, qui prend en compte l'évolution de notre société industrielle, est fondée sur les notions de profession et de fonction. ## 2,1 Les Principes Fondamentaux. L'affirmation même de leur existence comme l'affirmation de leur valeur permanente découlent de la nature même de la fonction de défense. S'agissant de la collectivité militaire dont il doit être exigé qu'elle s'engage avec une cohésion sans faille dans une voie qui peut conduire ses membres jusqu'au sacrifice. de leur vie, il est vrai que les devoirs que ces principes commandent, ne peuvent être que très exigeants et les sujétions qui en découlent très lourdes. Accomplir ces devoirs et accepter ces sujétions constituent aujourd'hui comme par le passé l'honneur et la fierté de l'Armée. L'obligation de neutralité politique est inscrite dans le statut. La rigueur qui a toujours caractérisé cette exigence de stricte indépondance vis-à-vis des différentes familles spirituelles de la nation n'est pas atténuée; toutefois les interdictions qui en découlent ont été mieux cadrées et ne portent plus que sur les adhésions aux groupements politiques. Ainsi les militaires sont-ils invités à participer à toutes les activités de la Cité dès lors qu'elles ne les engagent pas sur des voies partisanes. De même le statut affirme-t-il sans ambage l'incompatibilité entre le fait d'être militaire et l'appartenance à une organisation syndicale ou à une association de défense des intérêts professionnels, difficilement conciliable avec le principe hiérarchique qui est à la base de l'organisation militaire. De même, l'action syndicale, essentiellement collective et qui suppose le ralliement à des mots d'ordre, est-elle déclarée antinomique avec les exigences de la discipline et pour les mêmes raisons, l'exercice du droit de grève n'est pas et ne peut pas être accordé aux militaires. Affirmant le principe hiérarchique et stipulant l'obéissance aux ordres recus, le statut n'en reconnaît pas moins l'existence de la responsabilité individuelle au regard de la loi comme des conventions internationales ou des coutumes de la guerre, en parfaite conformité avec l'éthique propre au métier des armes, La liberté d'expression a fait l'objet des dispositions d'une instruction de septembre 1972, qui donne aux militaires des facilités nouvelles pour exposer leurs conceptions; l'autorisation préalable qui était le droit commun devient l'exception. Les obligations découlant de ces principes fondamentaux ont été pour les plus importantes, celles qui garantissent l'unité de l'Armée et commandent son efficacité, explicitées dans le statut lui-même. Mais celui-ci n'épuise pas les obligations qui découlent de l'éthique militaire : certaines trouvent leur place dans le Réglement de Discipline Générale des Armées; d'autres ne sont vraiment sensibles qu'à travers la réalité vécue de l'état militaire. ## 2,2 Dispositions Régissant Les Carrières Militaires. Ces dispositions sont dominées par deux soucis essentiels celui de compenser les sujétions propres à la fonction militaire, celui de faciliter le déroulement des carrières dans le respect des besoins des Armées. La loi du 13 juillet 1972, confirme et précise les garanties anciennes et, dans une large mesure, les amplifle. Puisque les militaires sont soumis à certaines restrictions du droit d'association et du droit d'expression, le législateur leur offre des garanties plus précises qu'aux fonctionnaires civils de l'Etat. Ainsi les limites d'âge et les grades eux-mêmes - auxquels les limites d'âge sont attachées - relèvent-ils du domaine de la loi. Ainsi la loi dispose-t-elle solennellement que la fonction militaire doit être traitée comme l'est la fonction publique civile, sur les plans qui leur sont communs, tout en bénéficiant en outre de compensations justifiées par les contraintes qui lui sont propres (indemnités particulières, aide au logement). Par une application anticipée de ce principe de parité, le Ministre chargé de la Défense Nationale est devenu récemment contresignataire des décrets qui fixent périodides quement la valeur du point d'indice de traitement fonctionnaires. 24 55 Par ailleurs, un Conseil Supérieur de la Fonction Militaire a été institué par la loi du 21 novembre 1969. Présidé par le Ministre, comprenant quarante membres - trente-cinq représentant les personnels d'active, tirés au sort, cinq désignés sur proposition des associations représentatives de retraités - cet organisme est appelé à « exprimer son avis sur les questions de caractère général relatives à la condition et au statut des personnels militaires ». Complétant la loi de 1939, le statut général a prévu, en particulier, la consultation obligatoire du Conseil Supérieur pour l'examen de ses principaux textes d'application et celui des dispositions des statuts particuliers relatives au recrutement et à l'avancement. Au demeurant, le Conseil Supérieur actuellement en place a déjà entrepris, outre l'étude de textes à caractère juridique, celle de problèmes, tels celui du logement ou de la condition des sous-officiers, qui intéressent de manière immédiate la vie quotidienne de tout ou partie de la collectivité militaire. Celle-ci dispose ainsi d'un moyen nouveau d'exprimer directement auprès de son Ministre ses préoccupations et ses aspirations. L'institution est récente et, de ce fait, encore insuffisamment connue de ceux qu'elle concerne. La qualité de ses premiers travaux permet toutefois d'affirmer que ses avis, ses propositions, ses suggestions ont déjà commencé d'orienter les mesures concernant le personnel de façon très positive. Son rôle ne pourra aller qu'en s'accroissant. L'introduction de ces diverses garanties dans la Loi, l'institution du Conseil Supérieur de la Fonction Militaire, n'atténuent en rien le devoir traditionnel du commandement à l'égard de ses personnels. Mais ces mesures marquent la prise de responsabilité du législateur et du Gouvernement vis-à-vis. des personnels militaires, gage d'une attention portée à leur situation d'autant plus vigilante qu'ils ne disposent pas des moyens que donne une représentation syndicale Les grades et les limites d'âge sont - on l'a dit - du domaine législatif. Leur fixation répond à des données largement spécifiques de la fonction militaire. Peu de carrières civiles - aucune sans doute -- offrent un éventail de grades aussi complet, justifié dans les Armées tant par leur structure hiérarchisée que par des raisons techniques, d'ailleurs communes à toutes les Armées du monde. Peu de carrières civiles imposent des limites d'âge aussi basses. Un général de brigade est mis à la retraite à 58 ans dans l'Armée de Terre, 54 dans l'Armée de l'Air, un capitaine de vaisseau est mis à la retraite à 56 ans, un colonel de l'Armée de l'Air à 52, un maître principal de la Marine à 45. La durée de service des officiers techniciens est limitée à 32 ans, voire 27 dans certains cas. Aussi le Code des Pensions de l'Etat prévoit-il des dispositions particulières aux militaires : outre un système de bonifications, il assure le bénéfice d'une pension à jouissance immédiate aux sous-officiers après quinze ans de service, aux officiers après vingt-cinq; le cumul de leur retraite et d'un second traitement versé par une administration, un établissement public ou une entreprise nationale n'est cependant pas possible. Les officiers quittant le service après quinze ans et avant vingt-cinq ont pour leur part droit à une pension à jouissance différée jusqu'à l'âge de cinquante ans. Ces dispositions, en harmonie avec les exigences de fait des besoins des Armées, constituent un cadre general de la carrière des militaires, mais celle-ci est en outre, il ne faut pas le cacher, dépendante, bien sûr des mérites propres de chacun, mais aussi de la gestion des corps et des besoins des Armées en effectifs. La gestion des corps est parfois fort complexe et laisse place, même en période de stabilité d'effectifs, à certains à-coups dus à des irrégularités de répartition des personnels en âge et en ancienneté. Ce phénomène est accusé par la multiplicité des spécialités, voire des corps eux-mêmes dont on dénombre aujourd'hui pas moins de 153 | L'existence des trois Armées, de la Délégation Ministérielle pour l'Armement, de la Direction de la Gendarmerie et de la Justice Militaire, du Service de Santé et de tous les Services ne suffit pas à rendre compte en totalité de cette extrême différentiation, qui repose pour une part sur des raisons historiques dont certaines ont pu perdre de leur actualité et pour une autre part sur une diversité de fonctions ayant chacune leur propre technicité. Un mouvement de simplification a été entrepris et l'on évoque dans cet ouvrage la fusion des corps d'ingénieurs militaires et celles des corps des médccins et pharmaciens-chimistes. Mais il ne faut pas mésestimer la difficulté de ces fusions qui doivent ne désavantager personne et sont surtout efficaces au niveau du recrutement. Il ne faut d'ailleurs pas manquer de souligner que la grande diversité des corps a été utilisée avec efficacité comme un instrument înterne de promotion. L'origine des officiers de l'Armée de Terre par 57 exemple en fait foi : un peu plus de la moitié d'entre eux proviennent aujourd'hui à parts égales de l'Ecole Spéciale Militaire de SAINT-CYR et de l'Ecole Militaire Interarmes, les autres sont surtout des officiers issus du rang, mais aussi des officiers de réserve activés ou servant en situation d'activité. L'évolution des besoins des Armées en effectifs ajoute naturellement à ces difficultés de gestion. Dans les périodes de tension ou d'hostilités, les Armées doivent accroître le recrutement. Le calme revenu, il faut procéder à des déflations souvent massives. L'histoire de tous les temps et de tous les pays offre maints exemples de ces mises en demi-solde, de ces dégagements de cadres, de ces incitations pressantes au départ volontaire, qui, pour avoir un caractère conjoncturel - et peutêtre en raison même de ce caractère -- laissent souvent la trace d'un sentiment amer parmi le personnel militaire. Si le problème des effectifs militaires ne se pose pas aujourd'hui en ces termes, il fait apparaître une situation permanente des besoins qui exige en fait une correction permanente de la « pyramide » des corps, par ailleurs seule capable de donner à chacun un avancement satisfaisant et un emploi correspondant à son grade. C'est qu'en effet le progrès technique, en introduisant dans les Armées des matériels coûteux et complexes, et les progrès de la scolarisation, en augmentant les capacités des jeunes soldats, ont créé des besoins nouveaux de personnels d'encadrement direct nombreux et très compétents, aux ambitions d'autant plus légitimes, alors que dans le même temps, le nombre des emplois de responsabilité supérieure marque une tendance relative à l'amenuisement. Il est donc nécessaire de donner le maximum de souplesse possible à la gestion du personnel militaire en facilitant des entrées dans la vie civile active, particulièrement à certaines étapes de la carrière. Certes, la formation technique et humaine donnée par l'Armée est en elle-même appréciée par le secteur civil et des reconversions d'anciens militaires s'y opèrent aisément dans nombre de cas. Mais, il n'en convient pas moins d'aider les candidats à un emploi civil à faire face aux difficultés de leur reconversion. A cet effet, divers moyens ont été mis en place récemment : - Une loi du 2 janvier 1970 a, d'une part, autorisé un report permanent des âges limites d'accès aux concours de la Fonction Publique au bénéfice des officiers et permis la prise en compte d'une partic importante de leur temps de service dans les Armées; elle a, d'autre part, institué, en leur faveur, pour une durée de 10 ans, un régime dérogatoire d'accès aux emplois de la Fonction Publique par voie d'intégration directe. -- Les Armées intensifient, par ailleurs, l'effort qu'elles ont entrepris depuis plusieurs années pour permettre tous les ans à plusieurs centaines d'officiers et sous-officiers de suivre des stages auprès d'organismes divers, publics et privés, destinés à les préparer à leur future carrière civile. Dans cet esprif, le Ministre a favorisé la création, en 1971, d'une « Association pour la Reconversion Civile des Officiers » (ARCO) regroupant des associations et amicales de militaires et anciens militaires également préoccupés de ces problèmes de reclassement. Les organismes officiels que constituent les bureaux de reclassement des trois Armées apportent, bien sûr, leur constant concours à cette action. - Innovation considérable enfin, le statut général vient de prévoir, dans la limite d'un contingent annuel fixé par arrêté, la possibilité d'attribution d'un pécule déterminé en fonction de la dernière solde perçue, aux officiers de carrière admis à la retraite après quinze ans de services et « appartenant aux armes et corps combatiants des Armées ». Il s'agit ainsi de faciliter ce qu'il est convenu d'appeler la « carrière courte», pratiquée depuis longtemps par certains personnels dont la technicité est appréciée dans la vie économique du pays. La mise en place de ces différents moyens témoigne de la volonté conjointe du Parlement, du Gouvernement et du Commandement d'adapter étroitement les effectifs aux besoins des Armées sans porter atteinte aux intérêts légitimes des personnes. La contradiction peut n'être qu'apparente, car l'intérêt des personnes n'est pas dissociable de l'intérêt de leur emploi. Il reste que cette tâche délicate exige beaucoup de soin et un souci constant de concertation. Mais l'intérêt de la nation, celui de l'Armée et, finalement, celui bien compris, de ses personnels ne manquent pas ici de se rejoindre. Immuable à travers le temps, la mission de l'Armée reste de veiller à la défense du pays, de le protéger contre ceux qui voudraient menacer sa sécurité. Ce rôle, qui n'emprunte rien à une quelconque idée de célébration de la force pour la force, qui n'a rien de belliciste, qui se veut, au contraire, facteur de 58 ## દેતે paix, est grand et difficile. Il mérite la considération de la nation pour ceux qui l'assument, il requiert de l'Armée un constant effort de préparation morale et technique. La France est aujourd'hui en paix. Elle met toute son ambition à en servir la cause, comme celle de la liberté. Les Armées doivent mettre ce temps à profit pour obtenir la meilleure organisation et le meilleur rendement des moyens qui leur sont donnés en vue de l'accomplissement de leur mission. Des ressources qu'une nation peut consacrer à sa défense, elle doit faire une part aux matériels, l'autre aux hommes et à leur formation. L'équilibre entre ces deux parts peut être sujet à controverse et d'ailleurs à variation dans le temps. Un point en tout cas est sûr : quelles que soient les performances des matériels, ils ne vaudront jamais que ce que valent les hommes auxquels ils sont conflés. L'Armée a eu très tôt dans l'Histoire la charge d'encadrer, d'entraîner et d'instruire au métier des armes un grand nombre d'hommes d'origines très diverses; aujourd'hui comme hier, les hommes qu'elle accucille sont jeunes et n'ont reçu avant leur entrée qu'une instruction générale, qu'elle soit élémentaire ou supérieure; il lui appartient donc de les instruire du métier · militaire proprement dit, et de leur offrir les occasions de perfectionner leur formation générale. De ce fait, l'Armée a très vite dâ inscrire au nombre de ses responsabilités primordiales les tâches éducatrices; celles-ci se sont développées à la mésure de la complexité croissante de l'appareil militaire qui exige, pour assurer son fonctionnement, le service d'hommes possédant de plus en plus de connaissances générales comme de compétences techniques. Cependant la maîtrise d'une technique et de ses applications, ne saurait moins que jamais suffire; l'exercice du commandement requiert au même degré l'intelligence et le caractère; à quelque niveau qu'il se situe, l'individu investi de responsabilités d'encadrement ou de commandement doit être capable d'analyser les problèmes auxquels il est confronté, de prononcer des choix et d'imposer ses décisions à travers une juste évaluation des événements et des hommes. · Dans cette perspective, les connaissances acquises par l'enseignement regu et par son effort personnel, l'épanouissement de sa personnalité par l'expérience seront les fondements de sa compétence. On sait la rapidité des mutations des cadres militaires, comparée à celles des cadres civils. Elle s'inspire du souci de leur donner tout au long de leur carrière une expérience aussi diversifiée que possible. De fait, le passage d'un officier du commandement de la troupe au travail d'état-major en passant par la gestion des personnels et l'expérimentation des matériels lui apporte une expérience d'une richesse irremplaçable. Encore L'ENSEIGNEMENT DANS LES ARMÉES 61 60 faut-il que, dans chacun de ces postes, il démontre une aptitude évidemment nécessaire au bon fonctionnement du système et, par ailleurs, indispensable à son enrichissement personnel. C'est pourquoi, au sein des Armées, l'économie générale de l'enseignement vise à donner à chacun, par un passage en école aux étapes successives de sa carrière, les qualifications techniques, les connaissances générales et humaines qui lui permettront de faire face aux nouvelles responsabilités qui vont lui incomber. Il s'agit, bien entendu, de formations extrêmement diversifiées, en raison même du large éventail des activités militaires, mais qui finalement illustrent toutes à leur manière ce principe commun ; la formation des personnels se fait par périodes au rythme de leur carrière. Progressive - mais disconfinue -, elle est dispensée par des organismes spécialisés, articulée par paliers, et constamment adaptée aux besoins propres de l'institution militaire. Ce principe est illustré depuis une vingtaine d'anfiées dans tous les milieux par nombre de « stages de recyclage » ou d'entreprises de « formation continue ». Sans s'arrêter au vocabulaire, il faut souligner que les Armées ont reconnu depuis fort longtemps l'intérêt d'une formation complèmentaire à la « formation sur le tas ». De par leur tradition, elles conservent en ce domaine, aussi bien dans leur structure que par l'organisation même de la carrière de leurs ressortissants, une avance considérable sur les autres administrations et sur le secteur privé. Dirigé, dans chacune des Armées, à la Gendarmerie, au Service de Santé et à la Délégation Ministérielle pour l'Armement, par un organisme spécialisé de l'Administration Centrale, dispensé à travers une gamme très étendue d'écoles et de stages, l'enseignement militaire s'adresse à l'ensemble des personnels militaires, appelés du contingent, engages, sous-officiers et officiers de tous grades. Il est bien entendu proportionné et diversifié en fonction de la durée et de la variété de la carrière de chacun. Dépassant sa finalité proprement militaire en concourant . à la formation civique, morale et professionnelle de la collectivité qu'elle emploie, l'Armée contribue de ce fait, de façon importante, à la formation générale de la nation. Le fait que, par sa diversité et sa progressivité, cet enseignement touche toutes les catégories de personnels implique e l'existence d'un nombre élevé d'écoles, de cours, de stages parfois très spécialisés dont l'énumération et la description n'entrent pas dans le cadre de ce chapitre. Pour en donner une idée synthétique, on évoquera successivement les écoles préparatoires, la formation des appelés, la formation des sous-officiers, la formation des officiers subalternes et le perfectionnement des officiers supérieurs. ## 1 Les Écoles Préparatoires. En assurant à de jeunes français un enseignement général et technique, et, par conséquent, en leur donnant une instruction qui leur permette de s'orienter dans les meilleures conditions possibles vers une carrière militaire, l'Armée, par la formation qu'elle assure dans ses collèges, élargit le champ de son enseignement proprement militaire qui, à ce niveau, rejoint celui dispensé par l'Education Nationale. Les écoles militaires préparatoires conservent peu de choses en commun avec les écoles d'enfants de troupe d'un passé récent. Elles sont devenues des lycées où les élèves peuvent accéder au baccalauréat, et préparer les concours d'entrée dans les écoles militaires. L'enseignement préparatoire assuré par les Armées est d'ailleurs dispensé en stricte conformité avec les programmes de l'Education Nationale, le personnel détaché par ce Ministère en conserve l'entière responsabilité. La prise en charge d'un tel type d'enseignement par les Armées répond à un but éminemment social et leur permet de se garantir une source régulière de recrutement. Le but social est particulièrement affirmé dans les établissements d'enseignement général tels que le Prytanée Militaire' à la FLÈCHE, le Collège Militaire de Saint-Cyr, le Collège Naval à BREST, l'Ecole des Pupilles de l'Air à GRENOBLE où sont admis en priorité les fils de militaires ou de fonctionnaires. Ces collèges et écoles cherchent, tout en assurant aux élèves une instruction universitaire, à ouvrir leurs esprits à la grandeur du métier militaire et plus généralement à l'idéal du service de l'Etat, à donner à chacun le sens de sa responsabilité personnelle et sociale, à éveiller ainsi des vocations solides au service des Armées ou de la nation. Naturellement, le volontariat est la règle, aucun engagement n'est demandé aux élèves qui ont toute liberté de se tourner vers d'autres voies que celle des armes. 62 (3 Les écoles militaires préparatoires d'AIX-EN-PROVENCE, du MANS, d'AUTUN et, récemment, du TAMPON (Réunion) ont la même vocation, mais sont ouvertes à tous les jeunes français. Les frais d'entretien des élèves sont pris en charge par l'Etat à condition qu'ils souscrivent un engagement dans les Armées à l'issue de leur scolarité. Dans le cas contraire, le remboursement de ces frais est demandé aux familles. Il reste que la formation assurée dans les collèges et écoles militaires préparatoires ne représente évidemment qu'un aspect marginal de l'enseignement militaire dont la finalité propre et le rôle essentiel s'expriment dans la formation de la collectivité militaire. ## La. Formation Des Appelés. Pour assurer l'exécution de sa mission, l'Armée met en ceuvre des moyens matériels et humains dont la valeur dépend pour une grande part de la volonté de défense de ses soldats et de leur capacité de combatiant. . Donner aux appelés la capacité de combattant cxige qu'ils acquièrent des connaissances élémentaires, un entraînement pratique qui fasse passer ces connaissances à l'état de réflexes, enfin une formation plus ou moins spécialisée pour la mise en œuvre des matérieis parfois complexes qu'ils auront à utiliser. C'est pourquoi les Armées dispensent à chaque appelé dans des centres d'instruction ou de formation une instruction militaire de base, ultérieurement complétée par une/formation plus spécialisée soit au sein de ces mêmes centres soit, plus généralement, dans les unités qui prennent son entraînement à leur compte. Comme la loi sur le Service National l'a prévu, cette instruction proprement militaire se double d'activités socioproféssionnelles qui ont pour but de répondre au besoin d'information des appelés, de contribuer à leur formation générale, d'entretenir et de perfectionner leurs connaissances, bref de faciliter leur retour à la vie civile. Par là même, les Armées participent à l'effort national de promotion sociale. Dans la ligne d'une tradition fort ancienne puisque, dès 1879, le réglement de l'infanterie prévoyait dans chaque régiment un service des écoles régimentaires, ces actions sont organisées autour de cours oraux ou de cours par correspondance. 42 500 jeunes gens ont bénéficié de tels cours en 1971. · Parmi les « clubs » de loisirs organisés dans les régiments, dont la valeur éducative est certaine (art manuel, photographie, musique, lecture, etc.) il faut mentionner particulièrement les « clubs agricoles » qui dispensent à leurs membres une information fouillée sur les problèmes de l'agriculture moderne; les animateurs qui en ont la charge y ont été préparés par le Ministère de l'Agriculture. Enfin, les Armées ont entrepris depuis 1971 une action spéciale dite de « sélection-promotion » qui se propose de détecter parmi les appelés ceux qui, défavorisés par le sort, n'ont pas acquis un métier en rapport avec leurs aptitudes réelles d'intelligence et de caractère et de les aider à prendre des orientations nouvelles, notamment par le canal de la Formation Professionnelle des Adultes qui fait l'objet d'une information systématique. Un régime de bourses, prélevées sur les crédits militaires, permet d'aider certains appelés, au lendemain du service, à poursuivre leur formation technique ou universitaire. La coordination des actions de toute nature qui contribuent ainsi à la formation complémentaire ou au reclassement des appelés est assurée dans les corps de troupe, les unités de la Marine et sur les bases aériennes par des « officiers-conseil ». Ainsi, pour un nombre élevé de recrues, le temps du service militaire permet non seulement d'acquérir l'instruction indispensable pour la défense, qui reste l'objectif premier, mais aussi de combler les lacunes d'une formation générale ou professionnelle parfois inachevée. ## La Formation Des Engagés Et Des Sous-Officiers. Les actions de formation des engages comme des sousofficiers font l'objet de la part des Armées d'un soin tout particulier. Elles présentent une importance extrême à un double titre : en contact direct avec la troupe, les sous-officiers assurent la formation des appelés et donnent aux unités la cohésion de base sans laquelle il n'y aurait pas de véritable armée; en outre, le service d'un armement d'une complexité croissante impose de recourir assez largement à l'engagement volontaire, si possible de longue durée, faute duquel certains armements ne sauraient trouver leur complète efficacité. Les enseignements dispensés, en raison même de la variété des techniques mises en œuvre dans les armées modernes, sont র্ত ## 65 brevet supérieur ou du brevet de chef de section qui exigent à un moment ou un autre le passage par une école ou un centre d'instruction. Cette pratique générale répond au double souci de l'équité dans l'avancement et de la compétence des promus dans leur nouvelle fonction. extrêmement diversifiés. Il reste que la formation est, suivant le principe général déjà exposé, dispensée par étapes. Les trois étapes qui concernent les engages et les sousofficiers sont la formation élémentaire de l'homme du rang engagé, la formation technique des jeunes sous-officiers, la formation technique supérieure des sous-officiers et officiers mariniers confirmés. De nombreux cours plus ou moins spécialisés dispensent l'enseignement correspondant à chacun de ces niveaux. Les très jeunes engages recoivent une formation générale et technique dans les écoles d'IssoIRE et de TULLE pour l'Armée de Terre, à l'Ecole des Mousses de BREST et l'Ecole des Apprentis Mécaniciens de SAINT-MANDRIER pour la Marine, aux écoles d'AUXERRE et de SAINTES pour l'Armée de l'Air. Les sous-officiers de l'Armée de Terre sont formés pour partie dans les corps de froupe et centre d'instruction, pour partie dans les écoles d'armes où ils acquièrent également le premier niveau de spécialisation. Dans la Marine, c'est aux Ecoles de Maistrance du Pont, Cette progression, commune aux frois armées, s'applique aussi à la Gendarmerie, à la différence près que la première étape n'est pas à sa charge puisque les gendarmes sont tous sous-officiers et sont recrutés soit au sein des armées soit parmi les jeunes ayant satisfait aux obligations du service militaire. L'enseignement lui-même, surtout à partir du deuxième niveau, est pour la plus grande part spécifique de l'arme à laquelle l'intéressé appartient : les techniques du chasseur alpin et celles du sous-marinier n'ont évidemment pas grand chose de comparable. de la Machine et de l'Aéronautique Navale et aux écoles de spécialités (écoles des électriciens, des mécaniciens, etc.) que revient la formation des engagés au niveau du Brevet Elémentaire, puis celle des officiers-mariniers aux deux niveaux supérieurs. Naguère très dispersées, ces écoles ont été pour la plupart récemment regroupées, dans deux vastes complexes, les Centres d'Instruction Navale de BREST et de SAINT-MANDRIER. Cependant, hors du domaine proprement technique, les divers enseignements de ces niveaux présentent des caractères communs marqués, répondant à certains objectifs généraux. Tout d'abord, au-delà de la pure téchnique qu'ils doivent acquérir, il importe de donner aux sous-officiers une formation plus large qui réponde à leurs vœux en même temps qu'à la nécessité d'accroître sans cesse la qualité du personnel d'encadrement des Armées. Aussi une part très large est-elle faite à l'enseignement des mathématiques, de l'histoire, de la géographie et du français. Ensuite, tout séjour en école est mis à profit pour renouveler et approfondir la formation humaine et pédagogique des stagiaires. Entraîneur d'hommes en cas de conflit, instructeur en tout temps, le sous-officier se doit en effet d'avoir un bon contact humain avec ses subordonnés. Les méthodes actives sont de règle dans les écoles, elles lui serviront de modèle lorsqu'il devra assurer l'instruction du contingent. Enfin, troisième caractère commun, toutes les formations sont sanctionnées par des brevets qui conditionnent l'accès à certains grades. Ainsi l'Armée de Terre demande-t-elle pour le grade de sergent ou de maréchal des logis le brevet militaire professionnel élémentaire et le certificat militaire (ou technique) du 1er degré, tandis que la Marine et l'Armée de l'Air demandent des brevets ou certificats comparables pour le grade de secondmaître ou de sergent. Ainsi, l'accession au grade d'adjudant ou de premier maître est-elle également soumise à l'acquisition du L'Armée de l'Air forme ses sous-officiers du personnel non-navigant à NIMES (formation initiale), puis à RocHEFORT (services techniques) et à EVREUx (service général); leur spécialisation s'acquiert ensuite au sein des unités. Les sous-officiers du personnel navigant recoivent leur formation initiale à CLERMONT-FERRAND, puis ils passent dans les écoles de pilotage (CLERMONT-FERRAND et COGNAC) ou de navigation (Toulouse). Ils poursuivent leur formation dans les écoles de spécialisation de Tours (pilote de combat) et d'Avoro (pilote de transport) qui recoivent également les officiers issus de l'Ecole de l'Air; l'école de CHAMBÉRY, pour sa part, assure la transformation des pilotes de transport sur hélicoptère. Couvrant des disciplines très variées et touchant un très nombreux personnel, cet enseignement fait l'objet de tout le 67 66 soin que justifie son importance première pour les Armées. Il procure au sous-officier la compétence qui lui est nécessaire dans son emploi et le fait souvent rechercher, surtout dans les spécialités les plus techniques, par le secteur civil. Il faut d'ailleurs ajouter que si le personnel sous contrat n'a pu, du fait de sa spécialité militaire, acquérir une formation recherchée par le secteur civil, les Armées lui offrent à la fin de son engagement la possibilité d'une formation professionnelle complémentaire propre à faciliter sa reconversion. Le type d'enseignement qui vient d'être décrit s'applique aux sous-officiers des armes. Celui qui est dispensé aux sousofficiers du service de santé des armées, à la charge de chaque armée, répond aux mêmes principes. Au sein de la Délégation Ministérielle pour l'Armement, une organisation différente est en place pour la formation des Techniciens d'Etudes et de Fabrication, fonctionnaires civils d'encadrement du personnel ouvrier. Adaptée aux besoins d'un organisme industriel, cette organisation fait une très large place à la promotion sociale. C'est ainsi qu'elle accueille dans les Ecoles Techniques Préparatoires de l'Armement les meilleurs élèves sortant de ses propres écoles d'apprentissage - dont l'origine remonte pour certaines à 1631 - et des élèves extérieurs admis sur concours afin de leur dispenser une formation technique poussée et une formation générale du niveau de la classe terminale technique en vue de les préparer aux certificats d'aptitude professionnelle et au baccalauréat ainsi qu'au concours commun d'entrée dans les écoles Techniques Normales Supérieures. Les meilleurs éléments reçus à ce dernier concours sont d'ailleurs aiguillés sur des cours préparatoires au concours d'Ingénieur des Etudes et Techniques d'Armement (personnel officier), les autres, après une formation équivalente à celle des Instituts Universitaires de Technologie, deviennent en deux ans des techniciens hautement qualifiés, qui sont accueillis dans le corps des Techniciens d'Etudes et de Fabrication. Une autre voie s'offre en outre aux candidats à ce corps, celle des Ecoles Techniques Normales d'Atelier qui reçoivent sur concours de jeunes ouvriers de l'Armement de 25 à 28 ans et en font en deux ans des techniciens d'atelier et des agents de mattrise. Il existe ainsi au sein de la D.M.A. 16 écoles d'apprentissage - dénommées Ecoles de Formation Technique Normale -- , 10 Ecoles Techniques Préparatoires, trois Ecoles Techniques Normales Supérieures - dont l'une, à VILLE-d'AVRAY, est un I.U.T. - , deux Ecoles Techniques Normales d'Atelier. ## La Formation Des Officiers Subalternes. Les moyens militaires dont les Armées sont dotées ne trouvent toute leur efficacité que dans la mesure où les différents systèmes de forces dans lesquels ils s'intégrent sont convenablement préparés à leurs missions et en permanence prêts à les remplir, et dans la mesure où ils sont eux-mêmes bien adaptés à ces missions par leurs qualités intrinsèques et la tactique d'emploi conçue pour eux. L'essentiel de cette fâche incombe à l'officier. Une très grande diversité d'emplois s'offre à lui, faisant appel à des connaissances très étendues, aux méthodes et aux techniques les plus évoluées. A un champ d'action aussi ouvert, doit correspondre une formation très complète, mais son contenu technique est dominé par la formation au commandement donf l'exercice est la tâche principale assignée à l'officier parce que l'aptitude au combat est la finalité de son métier. La formation de l'officier revêt donc deux aspects complémentaires et indissociables : centrée sur les questions spécifiquement militaires, elle fait une large place à la culture générale et à la formation humaine. Sans doute la place de la culture générale et de l'ouverture aux réalités du monde contemporain est-elle la plus grande dans l'enseignement militaire supérieur réservé aux officiers supérieurs, mais cette place est cependant déjà importante dans la formation de base de l'officier subalterne. La formation des officiers subalternes comporte trois étapes, la première concerne la formation de base, la seconde la formation spécialisée, la troisième - qui se rattache déjà à l'enseignement supérieur - est une première formation d'étatmajor. L'enseignement dispensé au cours de cette formation, le plus souvent propre à chaque armée - voire à chaque arme s'agissant de la formation spécialisée - est pris en charge par des organismes également propres à chaque armée. 68 69 ## Armée De Terre. Le recrutement direct des officiers de l'Armée de Terre se fait, nul ne l'ignore, par la voic de l'Ecole Spéciale Militaire de SAINT-CYR, depuis la fin de la dernière guerre installée à COBTQUIDAN. Le concours d'entrée comporte maintenant deux options, une option littéraire et une ôption scientifique qui trouve sa justification naturelle dans la place croissante au sein des armées des techniques les plus évoluées et, aussi, par la quasi-disparition du recrutement des officiers des armes à l'Ecole Polytechnique. Le niveau du concours scientifique est celui des grandes écoles d'ingénieurs. L'option scientifique de Saint-Cyr est d'ailleurs sanctionnée par la délivrance d'un diplôme d'ingénieur. Les activités demandées aux élèvesofficiers et leur rythme leur assurent une formation militaire et intellectuelle très solide. Une large place est faite à la formation physique d'hommes dont on attend un équilibre et une endurance exceptionnels. L'Ecole Militaire Interarmes, située également à Costquidan, recrute de jeunes sous-officiers et de jeunes officiers de réserve ayant fait la preuve de leur potentiel intellectuel et de leur aptitude au commandement. Préparés à l'Ecole Militaire de STRASBOURG par un complément de scolarisation très poussé, ces jeunes gens bénéficient à l'EMIA d'un enseignement peu différent de celui de SAINT-CYR. A leur sortie de l'une ou l'autre de ces écoles, les jeunes officiers reçoivent dans l'arme qu'ils ont choisie une formation spécifique qui complète leur formation de base. C'est le rôle de toutes les Ecoles d'Application, MONTPELLIER pour l'infanicrie, SAUMUR pour l'Arme Blindee et la Cavalerie, CHALONS ou NIMES (bientôf DRAGUIONAN) pour l'Artillerie, ANGERS pour le Génie, Montares pour les Transmissions, Tours pour le Train, Bourges pour le Matérièl, etc. C'est à Melun que, pour sa part, la Gendarmerie forme ses jeunes officiers, tandis que pour la formation administrative, l'Intendance dispose d'une école à Montpellier et le Service de Santé d'un département de l'Ecole de Santé de LYON. La formation spécialisée des officiers d'armes est ensuite poursuivie après un temps impératif de commandement par des stages courts et trouve son achèvement par un bref retour à l'Ecole d'Application pour les stages de capitaine, qu'y effectuent pendant six mois les officiers avant de prendre les postes de commandement correspondant à ce grade, stage qui est prolongé pour certains d'entre eux par la formation d'éfatmajor du premier degré, dispensée sur place sous le contrôle de l'Ecole d'Etat-Major. ## Marine. La formation de base des officiers de Marine qui doit développer leur aptitude au commandement et leur donner des connaissances scientifiques et techniques étendues, doit aussi, bien évidemment, les familiariser avec le milieu inconnu qu'est la mer. C'est pourquoi l'Ecole Navale implantée à Lanvéoc-Poul MIC sur la rade de BREST, qui assure la formation des élèves officiers de recrutement direct, est immédiatement suivie des huit mois de l'Ecole d'Application des Enseignes de Vaisseau pendant lesquels, embarqués sur le porte hélicoptère Jeanne-d'Arc, Ies jeunes officiers complètent leur formation par la pratique. L'Ecole Militaire de la Flotte, créée en 1969, située elle aussi à Lanvéoc-Poulmic, obéit au même souci de promotion sociale que l'EMIA de l'Armée de Terre. Elle forme en un an des officiers de Marine provenant du corps des Equipages de la Flotte. S'adressant à une population plus âgée et plus expérimentée que celle de l'Ecole Navale, elle s'attache plus particulièrement à la formation générale de ces officiers. Enfin, la formation de base des Commissaires de la Marine qui sont appelés à exercer à bord et à terre des fonctions administratives relatives à l'entretien du personnel et au ravitaillement des forces est assurée par l'Ecole du Commissariat de la Marine qui reçoit des jeunes gens diplômés de diverses origines, les facultés de droit et de sciences économiques étant prépondérantes. Dans un deuxième temps, la Marine, comme les autres armées, dispense une instruction spécialisée à ses officiers dans des écoles dont la mission essentielle est la formation pratique de chef de service à bord des bâtiments, assortie d'un complément théorique au niveau de l'ingénieur d'exploitation. Les écoles de spécialités accordent en outre une part à l'approfondissement de la formation générale de l'officier de Marine. Mention particulière doit être faite de l'Ecole d'application Militaire de l'Energie Atomique qui, à CHERBOURG, forme aux techniques nucléaires le personnel atomicien destiné aux Armées; elle délivre aux officiers qui ont suivi ses cours, après un examen contrôlé par le Commissariat à l'Energie Atomique, 70 71 le diplôme d'Ingénieur en Génie Atomique. La direction de cette école interarmées est assurée par la Marine, en raison de la part importante qui revient, dans son enseignement à la formation du personnel destiné aux sous-marins nucléaires. ## Armée De L'Air. C'est à l'Ecole de l'Air et à l'Ecole Militaire de l'Air situées à SALON-DE-PROVENCE que l'Armée de l'Air confie la formation de ses officiers. L'Ecole de l'Air assure la formation des officiers issus du recrutement direct. Ces derniers ont pour vocation d'accéder aux postes de commandement et de direction de l'Armée de l'Air, mais ils devront auparavant assumer des responsabilités, dès leur arrivée dans les unités navigantes, et y faire prouve des qualités professionnelles indispensables à la maîtrise des techniques avancées mises en œuvre dans les formations aériennes. L'enseignement dispensé à l'Ecole de l'Air se propose donc d'inculquer à l'élève officier un ensemble de connaissances utilisables des la sortie de l'école. Les différentes phases de cette formation, militaire, scientifique, aéronautique, concourent à faire de l'élève, un officier, un ingénieur, un aviateur. En outre, pour préparer le jeune officier à occuper des postes de responsabilité et de commandement nécessitant des compétences multiples, l'enseignement de l'école est orienté sur les connaissances fondamentales et les méthodes de travail indispensables à un perfectionnement continu. Cette formation est sanctionnée à la sortie de l'Ecole par la délivrance d'un diplôme d'ingénieur. L'Ecole Militaire de l'Air est ouverte aux candidats sousofficiers de l'Armée de l'Air remplissant certaines conditions d'âge et de service ainsi qu'aux officiers de réserve en situation d'activité et désireux de devenir officier d'active; elle vise à faire acquérir aux élèves les connaissances scientifiques propres à l'exercice de chaque spécialité, à travers une double formation d'officier et de spécialiste. Il faut aussi mentionner l'école du Commissariat de l'Air sise au sein de l'Ecole de l'Air (1* année d'étude) puis à Ax-EN- PROVENCE (2e année) qui dispense une formation militaire, juridique, financière et administrative. Les Commissaires de l'Air, appelés à remplir des fonctions administratives sont recrutés sur concours parmi les licencies en droit ou en sciences économiques et les fitulaires de diplômes de l'Ecole des Hautes Etudes Commerciales. . Les officiers appartenant au personnel navigant reçoivent ultérieurement un complément de formation aéronautique dans des écoles spécialisées; pour les autres corps, le complément de formation professionnelle est reçu au cours de stages de spécialisation de courte durée. On ne saurait clore ce tour d'horizon consacré à la formation initiale et de spécialité des officiers de chaque armée sans évoquer les officiers techniciens. Provenant, dans les trois armées, des corps de sousofficiers, ils sont destinés à conserver, au sein de la spécialité qu'ils ont précédemment acquise, des fonctions proprement techniques. Les postulants à l'admission dans le corps des officiers techniciens peuvent être nommés soit au choix, en raison de leurs qualités personnelles et des services rendus, soit plus généralement sur concours. Il n'existe pas d'école des officiers techniciens; la préparation au concours, dont le but est d'accroître la culture générale des candidats, s'effectue avec l'aide d'un cours par correspondance au sein des unités. ## Service De Santé Des Armées. Deux écoles assurent actuellement la formation des médecins et pharmaciens chimistes des armées : - l'Ecole du Service de Santé Militaire, créée à LYON en 1889; - l'Ecole Principale du Service de Santé de la Marine, ouverte à BORDEAUx en 1890. Ces deux écoles ont formé depuis cette époque les médecins et pharmaciens des trois armées. Naguère, les élèves de LYON avaient le choix de servir daus l'Armée de Terre ou l'Armée de l'Air, ceux de BORDEAUX dans la Marine ou les Troupes de Marine. Actuellement la fusion des quatre corps de Santé réalisée en 1968 ne justifie plus cette orientation particulière des deux écoles et les élèves de LYON et de BORDEAUx ont la possibilité de choisir l'Armée qui convient le mieux à leurs aspirations à l'issue de l'avant-dernière année d'études. 72 73 L'enseignement des futurs médecins est assuré par les facultés de médecine et de pharmacie de Lyon ou de Bordeaux et les élèves subissent les mêmes examens que leurs camarades civils. Ils reçoivent, en outre, une instruction complémentaire dans le cadre de l'école. Les études durent sept ans pour les médecins et cinq pour les pharmaciens-chimistes. ## La Délégation Ministérielle Pour L'Armement. Les Ingénieurs de l'Armement proviennent directement pour la plupart de l'Ecole Polytechnique, les autres sont recrutés par concours ou au choix après examen parmi les officiers des armes ou les ingénieurs des études et techniques d'armement. La Délégation Ministérielle pour l'Armement exerce d'ailleurs la tutelle de l'Ecole Polytechnique, érigée en établissement public par une loi de juillet 1970, et à ce titre dotée d'un Conseil d'Administration autonome. L'Ecole reste sous statut militaire et constitue donc une unité des Armées d'un type évidemment très particulier. Ses élèves sont soumis à deux années d'études scientifiques et une année de formation militaire. Ils accomplissent à l'Ecole leurs obligations vis-à-vis du Service National et en sortent officiers de réserve s'ils ne choisissent pas la carrière d'ingénieur militaire ou d'officier. Les élèves ne s'engagent plus guère dans cette dernière voie et l'école ne constitue plus comme autrefois la principale source de recrutement de l'Armée de Terre pour ses armes alors dites « savantes ». Le statut militaire de l'école n'en est pas moins fondamental et répond en quelque sorte, au niveau de l'école, scientifique la plus célèbre et du niveau le plus élevé, au même | souci que le statut militaire des écoles préparatoires évoquées plus haut : donner à ses élèves le goût du service public et le sens de l'Etat. En même temps, il est le fondement du privilège qu'accorde l'Etat à ces élèves ingénieurs, qui comptent parmi les plus doués de leur génération, en leur dispensant une formation non seulement entièrement gratuite, mais même rémunérée. L'Ecole Polytechnique dispense à 300 élèves par promotion une formation scientifique de très haut niveau qui ne constitue que le première étape de l'apprentissage scolaire du métier d'ingénieur. Les écoles d'application qui accueillent ses anciens élèves soit en fonction du corps de fonctionnaires qu'ils ont choisi en sortant, soit sur titre s'ils ont préféré - c'est le cas pour la moitié d'entre eux - entrer dans le secteur civil, constituent un prolongement nécessaire de son enseignement. Dans le cas des Ingénieurs de l'Armement, cette formation complémentaire est assurée par l'Ecole Nationale Supérieure de l'Aéronautique et de l'Espace, implantée depuis quelques années à TouLOUSE, soit par l'Ecole Nationale Supérieure des Techniques Avancées, à PARIS. Cette dernière a regroupé les anciennes écoles du Génie Maritime, de l'Armement et des Poudres, par un processus en harmonie avec la fusion des anciens corps d'ingénieurs militaires. Ces deux Ecoles, dans lesquelles peuvent être admis des officiers français ou étrangers, ont d'ailleurs pris en charge la formation des ingénieurs civils attirés par les industries de pointe navale, mécanique, chimique, aéronautique, spatiale, nucléaire et électronique. Leur enseignement diversifié porte sur tous les domaines techniques correspondants, ainsi que sur les techniques de base de l'ingénieur. Un large choix d'options est ouvert à leurs élèves en fonction de leurs orientations de carrière. Les Ingénieurs des Etudes et Techniques d'Armement, quant à eux, sont formés pendant trois ans dans les Ecoles d'Application dont la plus connue est l'Ecole Nationale d'Ingénieurs de Constructions Aéronautiques (ENICA) de Toulouse, parce qu'elle reçoit aussi, sur concours direct, des élèves ingénieurs civils. Les élèves y sont admis sur concours. Des études préparatoires à ce concours sont organisées par la Délégation Ministérielle pour l'Armement au profit des meilleurs éléments issus des Ecoles Techniques Préparatoires évoquées plus haut. Pendant les quinze premières années de leur carrière, les ingénieurs militaires des deux corps bénéficient de stages complémentaires, obligatoires ou facultatifs, en sciences humaines, en économie, en organisation et gestion, en informatique et en techniques nucléaires. Ges stages ont évidemment pour but d'élargir et de conforter leur expérience quotidienne pour leur permettre de mieux dominer tous les aspects de leur métier. ## Le Perfectionnement Des Officiers Supérieurs. La formation de base et la spécialisation de l'officier subalterne, sans sacrifier, on l'a dit, la culture générale, sont orientées essentiellement sur les besoins de l'officier de troupe, guidé et encadré par son Commandant d'unité. Mais une sorte de mutation est nécessaire pour que cet officier, au fil de sa carrière, s'exerce à l'art de la synthèse et acquière la compétence nécessaire au chef de corps ou à l'officier d'état-major de rang élevé. Songe-t-on en effet à la responsabilité, dès le temps de paix, sur les hommes et sur les matériels, de l'officier qui commande un régiment de chars, une frégate ou une base aérienne ou de celui qui élabore et modernise la doctrine d'emploi de son arme, qui conçoit les principes de l'instruction ou de l'entraînement des forces, qui organise la carrière des officiers de son armée, qui planiffe l'évolution et la modernisation de ses armements ? C'est le rôle de l'enseignement militaire supérieur d'aider l'officier qui possède déjà l'expérience du commandement des hommes et la pratique des tactiques militaires, à changer d'échelle dans sa réflexion sur l'art militaire et à mieux situer le rôle et la place des problèmes militaires dans les charges multiples qui incombent à l'Etat, en lui donnant l'occasion d'approfondir sa culture militaire et sa culture générale. Préférant la tête bien faite à la tête bien pleine, l'enseignement militaire supérieur cherche donc à développer les qualités intellectuelles, l'ouverture, l'imagination, l'initiative, le sens de la responsabilité chez ses stagiaires par un système d'études extrêmement souple qui réserve une large part à la réflexion active de groupes guidés par des instructeurs. Entièrement regroupé dans les locaux de l'Ecole Militaire à PARIS, l'enseignement militaire supérieur donne à cet, ensemble de bâtiments historiques un usage conforme à une tradition vivante qui remonte au xv111° siècle. Son domaine privilégié est la formation d'état-major, mais il couvre aussi la formation scientifique et technique et la formation administrative. Articulé en trois degrés il marque la carrière de l'officier supérieur à des intervalles de huit à dix ans environ. ## La Formation D'État-Major. Son premier degré, on l'a déjà signalé, s'adresse aux capitaines d'une trentaine d'années qui, par leur stage d'étatmajor pour l'Armée de Terre, par des cours par correspondance pour l'Armée de l'Air, ou par un complément d'enseignement dans les écoles de spécialité de la Marine, sont formés aux techniques d'état-major qu'ils sont appelés à pratiquer dans les grandes unités ou dans l'encadrement des écoles ellesmêmes. Les Ecoles de Guerre constituent le second degré de la formation d'état-major. Leurs concours d'entrée s'adresse à des candidats de 35 à 40 ans; particulièrement difficile, il sélectionne environ 16 % des postulants. Loin de correspondre à la banale image d'une académie dogmatique où l'on se livrerait à une sorte de jeux d'échecs abstraits autour d'une chambre à sable, l'Ecole de Guerre de chaque Armée, à côté d'un entraînement tactique qui suscite l'initiative des élèves, fait une très large place à des matières qui ne sont pas spécifiquement militaires, telles les sciences humaines et les langues vivantes, ou à des conférences d'information générale. Les méthodes d'analyse et le souci de la synthèse tiennent une grande part dans l'enseignement et les exercices; l'analyse des missions des Armées, la stratégie des moyens, le choix des spécifications militaires exigées des matériels donnent lieu à des travaux approfondis systématiquement tournés vers l'avenir. Il s'agit bien en effet en 1972 de préparer les stagiaires aux responsabilités majeures qui seront les leurs à la fin de la décennie. Enfin, nombre de visites en France et même à l'étranger contribuent à améliorer le contact des stagiaires avec les réalités présentes des armées et du monde extérieur. Dès ce niveau, il est également indispensable d'ouvrir les stagiaires de l'enseignement militaire supérieur aux aspects interarmées de la défense. Cette cxigence conduit les trois Ecoles Supérieures de Guerre à fusionner durant quatre mois au sein du Cours Supérieur Interarmées plus particulièrement orienté sur la stratégie opérationnelle et l'application des méthodes modernes de planification et gestion à l'étude de cas concrets proposés aux stagiaires. Le troisième degré de la formation d'état-major s'adresse chaque année à une vingtaine de Colonels ou Capitaines de Vaisseau choisis en fonction des résultats obtenus dans les postes importants qu'ils ont déjà tenus et en vue des postes encore plus importants auxquels ils sont destinés. Le Centre des Hautes Etudes Militaires, organisme interarmées qui les accucille, joue en quelque sorte le rôle d'un centre de recherches au profit du Haut Commandement. Les 76 77 ## La Formation De Dirigeant D'Entreprise. stagiaires y poursuivent, par des méthodes de travail collégial, une série d'études sur la stratégie générale aux points de rencontre des facteurs militaires, économiques et politiques. Stages d'état-major, Ecoles Supérieures de Guerre et Cours Supérieur Interarmées, Centre des Hautes Etudes Militaires, assurent sur une vingtaine d'années de la carrière d'un officier, des étapes de réflexion active qui sont comme les points forts d'une progression continue de sa formation. La cohérence du cycle lui vaut une réputation internationale, illustrée par le nombre élevé de ses stagiaires étrangers, en provenance d'une quarantaine de pays. ## La Formation Technique. Si la dominante en matière d'enseignement militaire supérieur demeure la formation générale et d'état-major, la place croissante prise par les techniques dans les problèmes militaires, a déterminé la création d'une seconde branche de cet enseignement : l'Enseignement Militaire Supérieur Scientifique et Technique (E.M.S.S.T.), Cet enseignement est né du besoin pour les Armées de disposer d'officiers susceptibles de faire la synthèse entre les besoins d'ordre opérationnel et les techniques de l'ingénieur. Ces officiers doivent donc posséder une forte culture militaire alliée à des connaissances scientifiques et techniques approfondies. L'enseignement militaire supérieur scientifique et technique comporte deux degrés. Le premier degré, sauf pour la Marine qui fait appel à ses écoles de spécialités, utilise largement les écoles d'ingénieurs civils et militaires ainsi que les universités. Les officiers y acquièrent un titre d'ingénieur ou un diplôme universitaire. Le deuxième degré superpose à la formation du premier un cycle de formation tactique et d'état-major dispensé aux stagiaires par l'Ecole Supérieure de Guerre de leur armée d'appartenance. Dans le domaine des techniques administratives, l'Ecole Supérieure de l'Intendance se situe à un niveau équivalent. Elle dispense un enseignement de deux ans associé à une formation universitaire. Les Ingénieurs de l'Armement, autour de 40 ans, peuvent faire acte de candidature au Centre des Hautes Etudes de l'Armement, créé en 1964. S'ils y sont admis (de 15 à 20 par an), ils rencontreront au Centre un nombre approximativement égal de cadres supérieurs, qu'ils soient officiers, contrôleurs des Armées, membres des grands corps de l'Etat et des Administrations extérieures aux Armées, ingénieurs du secteur national et du secteur privé. La provenance des auditeurs du Centre est volontairement · très diverse, car il a vocation à la confrontation des points de vue et à la synthèse. Tous ses auditeurs ont en commun d'être mêlés par leur activité aux problèmes de l'armement et promis, dans leur domaine, à d'importantes responsabilités. La formation du Gentre s'étend sur neuf mois à temps partiel. Elle s'achève par un voyage d'études à l'étranger, L'enseignement qui fait une place égale aux conférences, aux iravaux en comité et aux visites est naturellement centré sur le gouvernement des entreprises, leur fonctionnement et leur structure, l'économie générale du pays, la politique de l'armement, sa place dans la défense et dans l'économie. ## Le Haut Enseignement De Défense. L'Institut des Hautes Etudes de Défense Nationale couronne l'ensemble de l'édifice de l'enseignement militaire supérieur. Mais si les officiers supérieurs y ont naturellement accès - tous les stagiaires du Centre des Hautes Etudes Militaires sont en même temps auditeurs à l'Institut -- , si les spécialistes de l'armement y ont leur place, sa vocation est l'étude des problèmes de défense dans toute leur ampleur et sous fous leurs aspects. Aussi l'Institut ouvre-t-il très largement ses portes à une élite de hauts fonctionnaires et de représentants particulièrement qualifiés des activités économiques ou sociales de la nation. Son mode d'enseignement a servi de modèle au Centre des Hautes Etudes de l'Armement. Son domaine est celui de la stratégie de défense, de ses liens avec l'économic et la politique étrangère, de son insertion dans le contexte du monde actuel dont les éléments stables et les signes d'évolution donnent lieu à analyse et réflexion. 78 79 La charge de l'Institut ne lui a pas permis de consacrer une partie de son activité à la recherche sur la défense, comme il eut été, somme toute, assez naturel compte tenu de ses orientations. C'est pourquoi, le besoin de favoriser une telle recherche et de lui fournir une structure d'accueil étant manifeste, il vient d'être créé, en 1972, une Fondation pour les Etudes de Défense, placée sous la tutelle du Ministre chargé des Armées. . . De ce survol de l'enseignement militaire à tous ses niveaux et en toutes ses phases, on peut dégager deux conclusions générales maintes fois illustrées au cours de l'exposé. La première concerne la progressivité et la souplesse de cet enseignement qui pour reposer sur une tradition bien assise n'en est pas moins un exemple type des méthodes de recyclage et d'enseignement continu en faveur dans tous les secteurs depuis quelques années. La justification universelle de ces méthodes et leur raison d'être tiennent à la nécessité d'appuyer l'enseignement dogmatique sur l'expérience concrète de ceux qui en bénéficient et à l'impossibilité, à notre époque de progrès et de changements, de délivrer à l'étudiant un bagage qui prétende suffire à toutes les circonstances de sa vie professionnelle future. Depuis longtemps, les Armées en sont conscientes et l'enseignement militaire supérieur, tout particulièrement, est l'un des canaux privilegiés de leur nécessaire adaptation aux changements dans les domaines les plus divers, de la mutation nucléaire à la modernisation de la gestion. La seconde conclusion concerne la place qui est faite à l'information et à la culture générale dans l'enseignement militaire, de plus en plus grande à mesure qu'il s'adresse à des responsables de rang plus élevé. C'est la prise en considération déferminée d'une vérité de toujours, particulièrement fondamentale à notre époque : au-delà des fechniques particulières, au-dela des expériences limitées, ce sont leur ouverture sur l'extérieur, leur art de la synthèse, leur aptitude à situer les problèmes à leur juste qui donnent aux grands responsables compétence et rayonnement et leur assurent l'adhésion et la confiance de leurs subordonnés. # Médecine Militaire Le Service de Santé des Armées a été évoqué comme l'un des organismés qui participent à l'administration de la défense. Mais il est nécessaire d'y revenir pour deux raisons fondamentales. D'abord, l'institution elle-même qui garantit en priorité son soutien aux Armées, étend son champ d'action bien au-delà des frontières de la défense, du moins au sens strictement militaire du terme, · Ensuite, les hommes qui y servent, parce qu'ils sont rompus à des tâches qui exigent aujourd'hui comme hier la référence à une éthique dont notre époque ne sait pas toujours reconnaître la valeur, ont droit à un hommage particulier. ## Les Missions. A l'égard des Armées, le Service de Santé est investi d'une mission permanente de prévention et de soins médicaux en temps de paix comme en temps de guerre. Ce soutien est étendu à tous les personnels civils et militaires du Ministère des Armées ainsi qu'aux familles des militaires et aux titulaires de pensions d'invalidité « guerre ». L'activité correspondante s'exerce d'abord en métropole, en Allemagne et outre-mer dans les unités, corps de troupe, bâtiments, bases aériennes, et dans les centres de sélection. Elle concerne alors essentiellement la médecine préventive, la médecine du travail, l'hygiène individuelle et collective et naturellement les soins. Son impact est considérable sur les collectivités variées auxquelles elle s'adresse et notamment sur le contingent ; son caractère systématique et son aspect éducatif donnent toute sa valeur à cette médecine essentiellement préventive, dont les méthodes et les techniques sont en pleine évolution. En second lieu, cette activité se prolonge dans les formations hospitalières du Service de Santé dont les services sont dirigés par des professeurs agrégés, des médecins chirurgiens et spécialistes des hôpitaux des Armées. La qualité de l'infrastructure hospitalière au plan médical comme au plan hôtelier soutient aisément la comparaison avec l'infrastructure civile. La rénovation se poursuit d'ailleurs régulièrement. Dans un passé récent, on peut citer la modernisation complète de l'hôpital Bégin à SAINT-MANDÉ et de l'hôpital Laveran à Marseille. A côté de cette mission médicale préventive et curative, le Service de Santé effectue des recherches qui présentent un double aspect : les unes s'inscrivent dans les préoccupations générales de la médecine moderne et leurs résultats enrichissent les connaissances du monde médical en général, les autres, plus spécifiques, sont dictées par la nécessité d'adapter les régles de la médecine aux caractères particuliers des collectivités militaires, aux conditions de vie du soldat et du combattant. Cet effort de recherche s'inscrit dans une longue tradition qu'ont illustrée des médecins militaires universellement réputés, comme JAMOT, RICHET et LAVERAN (tous deux Prix Nobel), VINCENT, YERSIN ou CALMETTE. Aujourd'hui, le Centre de Recherches du Service de Santé comprend dix divisions dont les travaux sont orientés essentiellement sur l'amélioration des performances humaines, la sélection et l'orientation du personnel, la protection contre les facteurs d'agression et de nuisance. En outre, les trois centres de recherches de MARSEILLE, PARIS et TOULON ont une vocation spécifique : à MARSEILLE, on s'attache à l'étude de la nutrition et de l'épidémiologie en milieu tropical; à PARIS, on étudie la médecine aérospatiale; à TouLon les recherches biophysiques sont orientées en fonction des conditions particulières à la Marine. Chacun de ces centres possède à des titres divers une audience nationale et internationale. Leur organisation est conçue de façon suffisamment souple pour que soit maintenu un lien étroit avec les milieux hospitaliers et les laboratoires civils. Enfin, le Service de Santé assume une charge capitale, celle de la formation de ses propres membres, qu'il s'agisse de ses infirmiers, de ses administrateurs, ou de ses hospitaliers, qui, à l'issue de leurs études en faculté, accèdent sous l'autorité des professeurs agrégés du corps, à la formation hospitalière supérieure : assistanat, médicat, chirurgicat, spécialités, agrégation, A l'extérieur des Armées, le Service de Santé assume des tâches permanentes ou occasionnellement inspirées par le souci de l'intérêt général et celui de la solidarité médicale. Il apporte ainsi une aide médicale permanente aux départements et territoires d'outre-mer et participe en outre à l'œuvre de coopération de la France avec les pays en voie de développement, essentiellement les pays francophones d'Afrique du Nord et d'Afrique Noire, de Madagascar, d'Extrême-Orient. Cette aide médicale est assurée par quelque 800 médecins, 70 pharmaciens, 70 officiers d'administration, 180 sous-officiers et 60 infirmières militaires. La qualité des services rendus est dans la longue tradition de la lutte des médecins militaires contre les grandes endémies tropicales et nord-africaines. Les sacrifices consentis, loin de la métropole, par ceux qui se vouent à cette œuvre de solidarité humaine mériteraient d'être plus souvent soulignés en hommage tant à leur valeur qu'aux services irremplaçables rendus à de nombreux Etats et en reconnaissance du rayonnement qui en résulte pour notre pays. Parmi les tâches additionnelles du Service de Santé en métropole, on peut citer les interventions en matière de secours routier, le convoyage de blessés ou de malades par voie aérienne, son action pour la médecine de masse dans laquelle il est associé à la Croix Rouge et à l'Organisation Mondiale de la Santé, les différents concours qu'il apporte tant à l'Aéronautique civile pour la sélection et le contrôle médical périodique des personnels navigants, qu'au Ministère des Anciens Combattants qui emploie 70 médecins des Armées, et au Ministère de la Santé Publique pour le contrôle sauitaire aux frontières. Le Service de Santé a enfin vocation à faire face à des besoins collectifs occasionnels. Il s'est chargé par exemple de l'organisation du service sanitaire des Jeux Olympiques d'hiver à GRENOBLE en 1968, ou de la mise sur pied à LIBREVILLE, au Gabon, d'un hôpital militaire de campagne lors de la guerre du Biafra. En outre, son élément médical d'intervention rapide, 83 82 mobilisable en 24 heures, transporté par les avions Transall de l'Armée de l'Air, permet à la France d'apporter sa contribution aux secours d'urgence, en cas de grande catastrophe en tout point du monde. Ainsi en a-t-il été au Pérou en 1970, en Jordanie en 1970 également, ainsi en est-il en ce début d'année 1973 au Nicaragua. ## La Carrière. L'énumération précédente de tâches qui dans leur extrême diversité sont toutes marquées de la difficulté et de la gravité de la prévention et du secours médical dans les collectivités, fait apparaître, s'agissant des hommes, les exigences singulières qui s'attachent à leur état. Ces exigences qui sont toutes de service et de disponibilité, ne peuvent sans doute convenir à chacun, même si elles trouvent comme contrepartie une très grande varité des activités, de nombreuses possibilités de valorisation en cours de carrière et finalement une grande liberté d'esprit. Il est certain, en effet que la médecine libérale, que l'on prend naturellement pour terme de comparaison, si èlle ne leur garantit pas toujours un métier aussi exaltant, offre à ses praticiens une aisance matérielle supérieure et ne leur demande généralement pas une mobilité qui n'est pas sans inconvénients dans l'ordre familial. La sécurité sociale facilite d'ailleurs grandement l'installation des jeunes médecins et l'exercice de la profession médicale. Ce genre de constatations est d'une particulière évidence pour le corps médical militaire dont on peut aisément comparer la situation avec celle du corps médical civil. Mais ne s'appliquet-elle pas en fait pour l'essentiel à l'ensemble de la fonction militaire ? La situation matérielle des personnels militaires a fait l'objet, on l'a dit, d'une politique d'amélioration qui sera fermement poursuivie; mais, sur un plan plus élevé, ceci ne doit en aucune façon faire illusion sur les exigences fondamentales du service. Dès avant leur entrée dans les écoles du Service de Santé de LYON et de BORDEAUX, les 1 200 candidats aux deux cents places qu'elles offrent sont informés de ces exigences sans aucune ambiguïté. La cote de ces écoles n'en est pas moins élevée, et leur concours équivaut à une sévère sélection. Lors de l'entrée à l'école, les élèves souscrivent un engagement dont les clauses sont bien claires. Parce qu'ils entrent volontairement dans une carrière militaire, ils savent qu'ils s'engagent pour 25 ans à l'issue desquels, de plein droit, ils pourront s'ils le désirent, bénéficier immédiatement de la pension de retraite de leur grade. Pour ceux qui en arriveraient à souhaiter quitter le service plus tôt, ils savent que leur demande ne pourra être acceptée que six ans après leur sortie d'école et dans la limite d'un contingent fixé annuellement par le Ministre chargé des Armées en accord avec le Ministre de l'Economie et des Finances. Comme dans toutes les écoles d'officiers, leurs études sont gratuites et leur entretien assuré par l'Etat. Les frais correspondants seront à rembourser par ceux qui, ayant obtenu l'autorisation d'un départ anticipé, n'auraient pas effectué dix ans de service après la sortie de l'école. Bref, les candidats sont nombreux, le contrat est clair. Et la gratuité des études ne se présente pas comme une commodité sans contrepartie, mais comme une pratique constante de l'Etat qui prend en charge la formation de ceux qui s'engagent dans la carrière militaire. A l'issue des sept années d'études et leur thèse de doctorat soutenue, ils acquièrent à l'Ecole d'Application du Val-de-Grâce puis à l'une des trois écoles de spécialisation propres aux trois armées le complément de formation qui leur est nécessaire avant leur première affectation dans un corps de troupe, à bord d'un bâtiment, sur une base aérienne ou bien outre-mer. Cette première expérience de pleine responsabilité est fondamentale, ils découvrent là un aspect certes particulier de leur carrière. Dans un corps de troupe par exemple, les liens qui se nouent avec les officiers des armes, la nature des rapports de solidarité qui s'établissent entre le praticien et le chef de corps, les conseils reçus du médecin sous l'autorité duquel il se trouve placé, les contacts fréquents avec les hommes, le partage de leur vie dans les quartiers et les camps offrent au jeune médecin militaire en même temps que la connaisance de la collectivité à laquelle il appartient, la pratique irremplaçable d'une médecine quotidienne qui, à travers son aspect collectif est notamment l'occasion d'inculquer aux jeunes français du contingent une discipline médicale durable. Il n'en reste pas moins qu'un effort d'équipement est à faire au profit des infirmeries d'unités, faute duquel le médecin peut parfois légitimement se plaindre de ne pouvoir exercer pleinement sa mission et d'être contraint d'envoyer ses malades à l'hôpital militaire le plus proche pour des affections qui ne justifient pas leur hospitalisation. 85 A l'issue de cette première affectation de quelques années, sont ouvertes au médecin militaire trois perspectives, le commandement, la carrière hospitalière, la recherche. La voie du commandement est celle de la médecine en unité. La carrière de ceux qui choisissent cette voie, intimement liée au rythme de la vie militaire, les conduit - en général à travers l'enseignement de l'Ecole Supérieure de Guerre - aux responsabilités de commandement et d'administration des formations du Service de Santé et aux postes d'état-major et de direction. La carrière hospitalière est ouverte aux médecins militaires dans des conditions qui sont comme il se doit très sélectives mais beaucoup plus souples que pour leurs homologues civils en ceci qu'elle s'adresse à tous les anciens élèves de Lyon et BORDEAUX sans exiger d'eux des titres complémentaires acquis pendant les sept ans d'études initiales. Trois concours jalonnent cette voie : celui d'assistant des hôpitaux, puis celui de médecin, chirurgien ou spécialiste des hôpitaux, celui enfin qui conduit au professorat. La valeur de ce concours, la compétence des maîtres et des élèves, les conditions d'exercice de la profession dans les hôpitaux militaires sont les fondements de la notoriété médicale du corps, de la qualité de son renouvellement et du service dont bénéficient les militaires et leurs familles. La troisième perspective, celle de la recherche, est organisée elle aussi suivant trois paliers : - l'assistanat ou le doctorat ès sciences; - le concours de spécialiste; -- enfin la maîtrise des recherches qui équivaut à l'agrégation dans le domaine hospitalier. Ces trois grandes voies, qui ne sont pas sans communications entre elles, offrent aux médecins militaires une grande variété dans les responsabilités et les spécialités. Elles ont chacune des prolongements outre-mer. Illustrées à propos des médecins d'active, elles apportent également des débouchés très divers à tous les autres personnels qui relèvent du Service de Santé, pharmaciens-chimistes tout d'abord, mais aussi sousofficiers et infirmières. La part qui revient aux médecins et pharmaciens du contingent doit être soulignée : le volume et Ia qualité des prestations médicales et scientifiques qui leur sont demandées la rendent déterminante. Telles sont, rapidement exposées, les missions de médecine militaire et les carrières offertes à ceux qui s'y engagent. Le métier a sans nul doute de rudes exigences de compétence, de disponibilité, de mobilité, de courage aussi. Ce n'est pas un métier facile et c'est la son attrait. Bien entendu, les Armées doivent veiller d'abord à faire en sorte que le contrat qui au cours des premières années de service va lier le jeune élève aux forces armées, soit bien compris par les intéressés, ensuite à donner à leurs médecins les moyens d'exercer pleinement leur métier. Il en va de l'intérêt de ce métier et de la compétence de ceux qui l'exercent. Celle-ci est grande et les médecins militaires sont tout naturellement requis pour des tâches extérieures aux Armées au service de la collectivité; ils sont, de par leur expérience, leur disponibilité et du fait de la structure du Service de Santé, mieux désignés que quiconque pour les remplir. Le travail ne leur manque pas. Leur nécessité sociale est d'autant plus éclatante que la générosité qui les anime peut être présentée aujourd'hui comme un anachronisme et la confiance qui est faite à leurs Corps comme une contrainte à l'égard des individus ! Mais ce qui est ici vraiment en cause, c'est non seulement l'alliance du médecin et du soldat qui fut ressentie comme un progrès remarquable quand elle s'est faite et qui conserve aujourd'hui toute son importance, c'est aussi tout un ordre de valeurs duquel la défense, le progrès scientifique et le soutien apporté aux peuples démunis d'outre-mer sont étroitement dépendants. કર્ ## La Politique Domaniale Et Immobilière De La Défense On a évoqué au chapitre II, à propos de l'organisation et du rôle des Services d'Insfrastructure des Armées, l'importance de la politique domaniale et immobilière à laquelle se réfère leur action. Le présent chapitre se propose maintenant d'expliciter cette politique. Deux faits la conditionnent : l'ampleur du domaine et l'importance des programmes de travaux immobiliers. Le domaine militaire représente une superficie de 250 000 hectares environ et comprend quelque 8 000 immeubles. Il faut y ajouter près de 10 000 immeubles non domaniaux, couvrant environ 10 000 hectares, utilisés par les Armées, la plupart appartenant à des collectivités locales et pris à bail pour les besoins de la Gendarmerie. L'ensemble de ce patrimoine représente 0,45 % du territoire national et fait des Armées, parmi les administrations et les Services publics, l'un des plus grands propriétaires fonciers (avec la Société Nationale des Chemins de Fer). Quand au budget de construction de la Défense Nationale, il représente en 1972 environ un milliard et demi de Francs et couvre des travaux de deux ordres : des constructions de caractère classique (casernements pour la froupe, écoles militaires, logements de cadres) et des travaux spécialisés (infrastructure des aérodromes, aménagements portuaires, construction de bases opérationnelles, de centres de transmission, de dépôt de munitions, etc., mais aussi de centres d'essais ou de bâtiments industriels). A l'évidence, l'importance de son domaine foncier et de son budget de construction donnent à la Défense Nationale un impact considérable sur l'aménagement du territoire qui constitue un facteur très sensible de l'économie nationale. C'est 89 dire que sa politique domaniale et immobilière, outre qu'elle doit répondre à ses hesoins propres, doit aussi s'intégrer à la politique générale d'aménagement du territoire dont elle est à considérer comme l'un des éléments. ## La Satisfaction Des Besoins De La Défense. Pour répondre à ses propres besoins, la politique domaniale et immobilière de la Défense Nationale se développe dans deux voies : l'adaptation du domaine et la modernisation de l'infrastructure. · La politique d'implantation à long terme situe notamment les forces de manœuvre au nord d'une ligne La Rochelle-Lyon et la plupart des centres d'instruction et des écoles au sud de cette ligne. La répartition géographique actuelle du domaine militaire sur le territoire national doit donc être remodelée progressivement. C'est ainsi qu'après l'installation à MONTPELLIER de l'Ecole d'Application de l'Infanterie, un grand centre d'instruction naval vient d'être créé à SAINT-MANDRIER tandis que, à DRAGUIGNAN, commencent les travaux de construction de l'Ecole d'Artillerie qui va quitter CHALONS-SUR-MARNE. Il y a lieu de prévoir également l'allègement de l'infrastructure immobilière dans les villes, principalement des casernements. Beaucoup de ceux-ci, notamment dans les régions du Nord et de l'Est, sont un héritage de l'époque révolue des grands effectifs de mobilisation. Au demeurant vétustes, certains immeubles sont ainsi sans emploi. Un effort systématique d'aliénation est donc résolument poursuivi depuis une dizaine d'années, d'ailleurs encouragé par une disposition qui permet aux Armées de conserver l'usage du produit financier de ces cessions. Le rythme d'aliénation est très élevé : en 1970, 353 immeubles - près d'un par jour - d'une superficie de 1 300 hectares, ont été remis au Service des Domaines pour être cédés; en 1971, 744 immeubles ont eu le même sort. En région parisienne, de 1958 à 1970, le domaine militaire a été réduit de 16 %. En sens inverse, les nécessités de l'entraînement des forces et la contrainte apportée par la mécanisation des unités de l'Armée de Terre (les blindés à chenilles ne peuvent circuler sur les routes) et par les progrès des armements classiques (la portée et l'effet de destruction des projectiles se sont accrus) ont conduit la Défense à se doter de deux grands camps nationaux : le camp du Larzac dont l'extension est en cours et le camp de CanjuERs qui entre progressivement en service. Un facteur doit être pris en considération dans l'application de cette politique, qui conduit à une certaine prudence en matière d'aliénation, et renforce encore l'importance des camps nationaux, c'est le stationnement de 60 000 hommes en Allemagne à l'heure actuelle et l'éventualité de leur réimplantation en France, dans un avenir indéterminé qui échappe à toute planification. - L'ensemble de ces impératifs a été pris en compte par l'Armée de Terre dans son plan d'implantation à long terme. Par àilleurs, certaines régions ont fait l'objet d'études prospectives précises. C'est ainsi qu'ont été établis pour la région parisienne et pour les départements côtiers méditerranéens des « schémas directeurs d'implantation des Armées ». Ces documents de travail, qui présentent quelque similitude avec les schémas directeurs civils, font la part des moyens d'infrastructure existants qui sont devenus ou deviendront inutiles aux Armées dans les dix ans à venir et celles des moyens nouveaux qu'il leur serait nécessaire d'acquérir (a). Dans cet ordre d'idées, si l'on considère le bilan des cessions et des acquisitions réalisées ces trois dernières années, on constate, du seul critère de la superficie, que les acquisitions l'emportent. Mais ce bilan serait fort trompeur si l'on ne mentionnait pas d'une part qu'il comprend l'acquisition de 35 000 hectares pour le camp de CanjuERs, opération d'ampleur évidemment exceptionnelle, d'autre part que les aliénations ont généralement porté sur des terrains urbains de grande valeur alors que, à l'image de CANJUERS, les acquisitions concernent pour l'essentiel des zones éloignées des agglomérations et par surcroît de valeur agricole extrêmement faible, parfois nulle, A côté de l'adaptation du domaine, la modernisation de l'infrastructure est le deuxième axe d'effort de la politique domaniale et immobilière en vue de la satisfaction des besoins des armées. En premier lieu, il faut lancer d'importants travaux d'infrastructure pour créer des installations nouvelles. Une très grande part du budget d'infrastructure a été consacrée ces dernières années à de telle créations, essentiellement pour la (1) Les cessions, acquisitions et changement d'affectation des immeubles du Domaine Militaire sont soumis à l'avis d'organismes interministériels. 90 91 constitution de la force nucléaire. On peut à ce titre évoquer le Centre d'Essais des Landes, le Centre d'Essais du Pacifique, la base du plateau d'Albion pour les engins SSBS, la base de sous-marins nucléaires de l'Ile Longue. Aujourd'hui, l'essenticl est réalisé, et une part moins grande des budgets est consacrée aux travaux de ce type, que ce soit pour la construction d'un bassin de carénage des sous-marins, la modernisation des aérodromes militaires, ou la poursuite de la mise en place des réseaux de transmission. En second lieu, il faut rénover les casernements, les écoles, et cette rénovation s'accompagne en bien des endroits de la construction de logements à l'usage des cadres, officiers et sous-officiers. La constitution d'un important parc de logements est, en effet, une nécessité générale à laquelle les Armées échappent d'autant moins que le personnel militaire est extrêmement mobile, ses affectations successives dépassant rarement et n'atteignant généralement pas une durée de trois ans. Le parc actuel de logements en comprend 77 000, soit seulement le tiers du besoin total. C'est dire que l'effort doit être poursuivi. Il l'est au rythme de 35 millions de francs par an envirou, la priorité étant donnée aux constructions en région parisienne, autour des camps et outre-mer. La plupart de ces logements sont gérés par une société de droit privé, la Société de Gestion Immobilière pour les Armées et les Administrations (SOGIMA) (1). Elle assure une péréquation des loyers qui permet de les proportionner au service rendu par le logement sans qu'interviennent leur statut juridique ou les modalités de financement de leur construction. Quand aux écoles militaires, elles jouent - ainsi qu'on l'a vu au chapitre IV - un rôle trop important pour que leur modernisation n'ait pas fait l'objet de priorités marquées. On a déjà cité les réalisations récentes de l'Ecole d'Application de l'Infanterie à MONTPELLIER, du Centre d'Instruction Navale de SAINT-MANDRIER achevé en 1971 et capable d'accueillir plus de 3 000 éléves, la construction qui commence de l'Ecole d'Application de l'Artillerie à DRAGUIGNAN. Au cours des années précédentes, avaient été achevées la construction des écoles d'officiers de CorrouDAN pour l'Armée de Terre et de LANVÉOC- Pour la Marine, ainsi que la construction du Camp de Gaulle à FONTEVRAULT, complement de l'Ecole de SAUMUR. Il faut ajouter désormais à cette liste la reconstruction de l'Ecole (1) Le Secrétaire Général pour l'Administration en assure la futelle et siège à son Consell d'Administration (cf. chapitre II). des Mécaniciens de l'Armée de l'Air à RocHEFORT qui débutera en 1973, et celle de l'Ecole Polytechnique à PALAISEAU qui, après son achèvement en 1975, donnera aux élèves de cette grande école un cadre de travail en rapport avec l'enseignement hautement scientifique qu'elle dispense, notamment pour ce qui concerne les laboratoires. Mais l'effort fondamental, nécessairement de longue haleine, est celui qui concerne les conditions de vie de la troupe. Autrefois confortables, par comparaison avec l'habitat moyen, les casernes - dont la moyenne d'âge est de 70 ans - sont aujourd'hui fort dépassées par le confort de l'habitat et celui de l'école. Au-dela de l'entretion annuel, un plan résolu de modernisation des bâtiments et logements de la troupe s'imposait. Ce plan - évoqué au chapitre III du premier tome de ce Livre Blanc - accorde la priorité aux travaux se rapportant à l'hygiène et aux sports : les installations sanitaires scront rénovées, le chauffage central généralisé, les équipements sportifs multipliés. De 1973 à 1977, équipements sportifs mis à part, un effort financier de 80 millions de francs par an a été décidé pour revaloriser les cent casernements de la métropole les plus défavorisés, dont la capacité d'accueil est de 75 000 hommes de troupe. En outre et de façon générale, les lieux de détente ou de restauration font dans les enceintes militaires l'objet d'un effort particulier. ## La Participation De La Défense Nationale A L'Aménagement Du Territoire. Tout en répondant à des objectifs purement militaires, la politique domaniale et immobilière de la Défense Nationale apporte une contribution très importante à l'aménagement du territoire et aux solutions des problèmes qui relèvent de l'environnement. Les préoccupations relatives à l'aménagement du territoire interviennent à deux titres également importants. Au titre de la décentralisation, un effort exceptionnel est entrepris depuis plusieurs années. Après la création à RENNES du Centre Electronique de l'Armement, que vont rejoindre prochainement divers services implantés aujourd'hui en région parisienne, comme le Centre de Calcul Scientifique de l'Armement 92 93 ou le Bureau Interarmées de Codification des Matériels, on peut citer, encore à RENNES, la reconstruction de l'Ecole Technique Supérieure des Transmissions (jusqu'ici à PorToISE), ou bien, à TouLousE, le transfert de l'Ecole Nationale Supéricure de l'Aéronautique et de l'Espace et avec elle la création de laboratoires de l'Office National d'Etudes et de Recherches Aérospatiales, ou bien encore à BREST le transfert du Service Hydrographique de la Marine, à ORLEANS la décentralisation d'établissements du Service de Santé, à la RocHELLE l'implantation du Service des Ponsions des Armées, à Touron celle de la Sécurité Sociale Militaire, etc. Au titre de l'urbanisme, les Armées s'efforcent de contribuer à la restauration de plusieurs villes de France, grâce à la procédure des échanges compensés qu'elles mettent en œuvre avec les collectivités locales. Ainsi des immeubles, dont l'utilité pour les Armées n'est pas en cause, peuvent-ils être cédés par elles moyennant une indemnité qui facilite la reconstitution du potentiel ainsi aliéné sur d'autres emplacements, le plus souvent à l'extérieur des villes ou sur leur périphérie. Les Armées participent ainsi à la restructuration urbaine de nombreuses villes françaises; c'est le cas actuellement pour VALENCE - où des équipements collectifs vont pouvoir être créés au centre de la ville -- , pour Avignon -- où un deuxième pont va pouvoir être construit -, à CHAMBERY - où tout un quartier de la ville va pouvoir être restauré -- à PERPIGNAN - où une nouvelle zone industrielle va pouvoir être créée -, à BRIANÇON, à MONTPELLIER, etc. Ces mutations, dont les premiers beneficiaires sont évidemment les collectivités locales, ne sont d'ailleurs pastoujours sans intérêt pour les Armées elles-mêmes quand elles facilitent un remodelage et un regroupement du domaine militaire. Mais elles ne peuvent se développer que progressivement, dans la mesure où elles constituent une charge supplémentaire pour le budget d'infrastructure des Armées qui, en moyenne, doit supporter 50 % des dépenses nécessaires à la reconstitution du potentiel aliéné. A un titre plus général, les Armées participent de bien des façons à la mise en valeur du territoire, à son aménagement et au souci de l'environnement. On peut citer l'élaboration du schéma directeur des aérodromes militaires qui fixe pour chacun d'eux les conditions d'utilisation par l'Aéronautique civile. On peut citer, dans le domaine culturel, la restauration de nombreux monuments historiques, comme le Château de Vincennes et l'Ecole Militaire, le dégagement de l'Hôtel des Invalides et la reconstitution de ses jardins, l'évacuation complète du bois de Vincennes et le transfert au Ministère des Affaires Culturelles des terrains boisés qui- entourent le Château de Versailles, ou bien encore l'amélioration de l'aspect extérieur de maint bâtiment militaire. On peut citer aussi l'apport de la Défense Nationale à la protection du littoral. A ce titre, la politique immobilière des Armées sur le littoral méditerranéen tend à favoriser la location ou la concession des immeubles militaires côtiers disponibles pourvu que ce soit dans un but d'intérêt général, qu'il s'agisse de satisfaire aux besoins sociaux, touristiques, culturels ou qu'il s'agisse d'assurer la protection de l'environnement de certains sites. Cette politique évite ainsi la spéculation et certaines de ses déplorables conséquences. Elle permet en même temps aux Forces Armées de garder la nue-propriété de terrains ou d'immeubles, dont l'emploi peut un jour lui être nécessaire. On peut citer enfin la politique de protection de la nature menée dans les camps militaires qui constituent ainsi, comme en témoignent des travaux récents du Centre National de la Recherche Scientifique, des réserves exceptionnelles pour la flore et la faune. On voit des chevreuils dans le camp de MAILLY, des cerfs dans le camp de La Courtine; à Corroundan 20 000 arbres ont été plantés, à CANJUERs le reboisement de 100 hectares (40 000 plants) a été entrepris. Ainsi, les Armées poursuivent-elles un effort important, souvent méconnu, pour adapter leur infrastructure aux exigences de la modernisation des forces dans le souci de l'aménagement cohérent du territoire et de la protection de l'environnement. A notre époque où l'urbanisme est un problème-clé et où la dégradation de la nature et la montée de la pollution sous toutes ses formes risquent de mettre en cause la qualitó de la vie, les Armées - à l'opposé de ce qu'affirment parfois des censeurs aux arguments fallacieux et partisans - ont délibérément sacrifié à une politique domaniale et immobilière qui est la mieux adaptée pour lutter contre ces dangers, même si elle n'est pas la moins coûteuse pour la satisfaction de leurs propres besoins. 95 ## La Recherche Scientifique Et Technique Militaire Facteur déterminant de l'évolution des sociétés, le progrès technique tient depuis toujours une place de choix dans le sort des Armées. Sans remonter à un passé lointain, la Première Guerre Mondiale fut la première guerre aérienne et soùs-marine et le char d'assaut la fit sortir de ses tranchées. Chars de combat, avions et sous-marins devinrent, le perfectionnement technique aidant, les armes privilégiées de la seconde guerre mondiale. Mais, la maîtrise de tout armement nouveau -- et les exemples précédents l'illustrent dans toutes les mémoires - exige souvent une novation dans le domaine de l'emploi qui peut aller jusqu'à révolutionner les règles de conduite de la guerre. L'introduction de la propulsion à réaction dans les avions de combat - par les vitesses extraordinaires auxquelles elle permet d'accéder - a bouleversé les données du combat et de l'appui aérien. Les engins factiques et, à un moindre degré, l'hélicoptère ont profondément renouvelé les conditions de la lutte antichar. Les progrès de la propulsion nucléaire, de la détection sous-marine et l'apparition d'engins surface-surface volant au ras de l'eau sont des facteurs déterminants de la guerre maritime moderne. Le développement des télécommunications, de l'électronique, de l'informatique ouvre un champ toujours plus large aux aides les plus variées à la conduite du combat. Ces novations, à cadence extrêmement rapide, exigent une adaptation constante du combattant et le souci de cette adaptation devient en soi un motif de progrès nouveaux. Ainsi l'ergonomie se développe-t-elle rapidement, qui se propose d'orienter la conception de la machine en fonction de l'aptitude de l'homme à l'utiliser. 97 Novation de la technique, novation de l'emploi, la modernisation des Armées présente comme toujours mais à un degré extrême ces aspects complémentaires. C'est assez dire qu'elle appelle une étroite coopération entre ingénieurs et officiers, entre la Délégation Ministérielle pour l'Armement chargée de concevoir et de réaliser les nouveaux matériels et les Etats-Majors chargés de préparer et d'assurer leur mise en œuvre. Mais outre ces évolutions considérables dans le domaine du combat que l'on appelle maintenant classique ou conventionnel, le progrès scientifique et technique a entraîné une mutation aux conséquences encore plus grandes, celle de l'atome qui a fait entrer non plus l'art de la guerre mais la conception de la défense elle-même dans un nouvel univers : celui de la dissuasion nucléaire. Dès lors, la découverte technique n'entraîne pas seulement le besoin d'une recherche tactique nouvelle, mais aussi celui d'une recherche stratégique globale, d'une réflexion sur les dimensions ef les conséquences de la nouvelle défense. A l'ensemble de ces problèmes, répond une réflexion technique à la Délégation Ministérielle pour l'Armement, une réflexion tactique au sein des Etats-Majors, une réflexion stratégique enfin à l'Etat-Major des Armées, dans l'entourage du Ministre de la Défense, au Secrétariat Général pour la Défense Nationale, à l'Institut des Hautes Etudes de Défense Nationale, à la Fondation pour les Etudes de Défense, récemment créée, et dans nombre d'organismes publics ou privés qui s'intéressent à la dimension nouvelle ainsi prise par la défense dans la société moderne et particulièrement la société française. La recherche militaire scientifique et technique est donc à l'origine d'un mouvement très vaste de réflexion qui vise à dominer les données nouvelles qu'elle fournit. De la réflexion à l'action, elle engendre la réalisation d'armements nouveaux. Mais elle ne saurait se développer de façon spontanée et erratique. Ele doit répondre elle-même à des besoins mis en évidence par une réflexion préalable. S'il est aventureux de planifier la recherche, il est nécessaire de l'orienter en fonction des priorités mises en évidence par la planification générale des moyens des Armées, étant bien entendu que ses propres résultats peuvent être un motif de révision de cette planification. Ce point de vue peut aller à l'encontre de certaines idées rcçues selon lesquelles la recherche serait un investissement miraculeusement fécond, pourvu qu'elle se développe dans la plus entière liberté. Il y a là un double malentendu sur la nature de la recherche et sur les conditions de son exploitation. Malentendu sur la nature de la recherche, car il ne faut pas confondre la recherche fondamentale, qui vise à étendre la connaissance scientifique de base, et la recherche d'applications ou la recherche appliquée qui visent à exploiter les connaissances de base acquises, suivant une démarche qui est bien celle de la recherche militaire. Ainsi par exemple, la recherche militaire n'a pas découvert le principe du laser, mais elle s'est attachée à l'utiliser dans un certain nombre d'aplications à finalité militaire, qu'il s'agisse de télémétrie, de désignation d'objectif, de guidage de projectile. Malentendu sur les conditions de l'exploitation de la recherche qui impliquent une organisation adéquate, une volonté claire et des moyens financiers importants : c'est que l'insertion dans un système d'armes fabriqué industriellement et destiné à une utilisation en campagne de résultats acquis au laboratoire ne va pas sans difficultés considérables. On distingue ainsi trois phases dans la novation technique : la recherche proprement dite qui la met en évidence, le développement qui l'intègre dans un prototype de système d'armes, Ia fabrication enfin qui met le système à la disposition de l'utilisateur. A chacune de ces phases, correspond un coût qui croît très rapidement. Aussi doit-on se préoccuper dès la phase de recherche de savoir si les contraintes financières permettront d'en exploiter les résultats, faute de quoi les espoirs du chercheur risquent de se heurter à bien des déboires et des déceptions. Dans cet esprit, la recherche a les meilleures chances d'être exploitée si ses résultats conduisent, à performances comparables, à une réduction des coûts en aval : développement, fabrication, ou entretien. C'est dire que l'amélioration de la fiabilité des matériels et la limitation de leurs coûts d'étude et de réalisation sont des objectifs prioritaires de la recherche militaire qu'on s'imagine trop souvent comme une course à la performance. Bien entendu, l'amélioration des performances demeure un de ses buts, mais il n'est pas le seul et c'est celui sur lequel il faut, avec un esprit critique en éveil, rechercher la plus grande sélectivité. La course à la technologie n'est pas une médaille sans revers, les plus puissants eux-mêmes s'y sont essoufflés. La tentation est 98 99 grande car on peut presque dire par boutade qu'aujourd'hui tout est faisable. Mais il ne faut pas tout faire pour autant. Spécifique dans ses buts, la recherche militaire n'en est pas moins partie intégrante de la recherche nationale dans ses moyens comme, pour une part, dans ses résultats. Dans ses moyens, car il est fait largement appel à l'université et à l'industrie, notamment à l'industrie de pointe; dans ses résultats car ceux-ci ne manquent pas d'enrichir notre capital technologique et technique. Il a été souvent parlé, en termes parfois contradictoires, du problème des « retombées » économiques de la recherche militaire. Il est vrai que la mesure directe de ces retombées échappe encore à tout instrument rigoureux mais l'apport de la recherche militaire n'en est pas moins évident et particulièrement important dans les domaines nucléaire, aéronautique ou électronique. C'est pourquoi, si la satisfaction des besoins militaires est la raison d'être de la recherche militaire et en détermine les programmes, l'exécution de ces programmes et leur exploitation donnent lieu à de nombreuses liaisons avec les animateurs de la recherche civile. Les motifs et l'esprit de la recherche militaire étant précisés, il faut maintenant en décrire l'organisation avant d'en indiquer rapidement le volume et les domaines d'élection. L'organisation de la recherche militaire repose sur des structures, des méthodes et des procédures. Jadis réparti au sein des Directions Techniques en charge de la conception et de la réalisation des matériels de chaque Armée, le souci de la recherche a motivé en 1961 la création de la Direction des Recherches et Moyens d'Essais (D.R.M.E.), création permise par celle de la Délégation Ministérielle pour l'Armement dont la D.R.M.E. fait partie. Conscient de l'importance du pari technologique engagé pour réaliser la modernisation de nos Armées, notamment par l'atome, le Ministre des Armées visait ainsi un double but : rassembler autour de la recherche militaire des compétences extérieures aux Armées, harmoniser les efforts de recherche entrepris dans leur sein. Depuis lors, la D.R.M.E. a affirmé son succès. Gérant ellemême un budget de recherche de 200 millions de Francs, responsable en outre de l'approbation des programmes de recherche et du soutien financier (100 millions de Francs) des organismes sous tutelle que sont l'Office National d'Etudes et Recherches Aérospatiales (ONERA) et l'Institut Franco-Allemand de SAINT-LOUIS (I.S.L.), la D.R.M.E. assure un contact étroit et fructueux avec l'Université - en province comme à PARIS - et constitue le point focal de l'information et de la concertation en matière de recherche militaire. Mais elle n'a pas et ne saurait avoir le monopole de la recherche. Il est en effet nécessaire, au moins dans certains domaines particuliers ou pour les besoins urgents des développements en cours que les Directions Techniques de la D.M.A. conservent initiative et responsabilité en la matière. Si la Direction des Recherches et Moyens d'Essais constitue le pôle de la recherche militaire, si elle centralise l'information sur les résultats acquis ou les opérations en cours, l'orientation même de la recherche dans ses grandes lignes est une œuvre commune de la Délégation Ministérielle pour l'Armement et des Etats-Majors, mise en forme par le Centre de Prospective et d'Evaluations, directement rattaché au Ministre auquel il soumet annuellement un projet de directive d'orientation des recherches. On entre là dans le domaine des méthodes et des procédures. Sans s'appesantir sur un sujet assez ingrat, il importe de noter qu'une analyse des différentes phases de la décision en matière de recherche a induit une classification originale qui décompose la recherche (en amont du développement proprement dit) en plusieurs catégories. A côté d'une recherche exploratoire, ensemble de coups de sonde laissés à l'initiative du chercheur, on a défini une recherche dite orientée - précisément parce qu'elle est l'objet de la directive annuelle - et des développements dénommés exploratoires dont la philosophie est de vérifier concrètement le domaine d'emploi d'un concept nouveau à moindres frais, avant de lancer si cela en vaut la peine et en fonction de spécifications imposées, le développement proprement dit de systèmes nouveaux. La décision concernant le développement d'un système nouveau peut être envisagée en dehors de cette démarche progressive; elle sera alors préparée par une étude de définition de système dont l'objet est de faire le bilan des résultats de recherche disponibles pour · le succès de ce développement et d'évaluer les coûts et les délais prévisibles ainsi que les aléas possibles. Ces études sont 100 101 limitées à des études sur papier, mais peuvent, le cas échéant, inciter au lancement d'un développement exploratoire particulier préalable à une décision globale de développement et propre à en diminuer les risques. La directive d'orientation elle-même s'efforce d'établir une hiérarchie entre toutes les opérations proposées par les responsables de l'exécution des recherches. Cette hiérarchie repose naturellement sur l'utilité militaire de la recherche, son opportunité en fonction des besoins planifiés, son réalisme. technique, son coût, et aussi de façon nuancée, sur son utilité hors du domaine militaire. C'est dire combien la préparation de cette directive requiert la synthèse de points de vue différents, du scientifique à l'opérationnel en passant par le technicien, le planificateur et l'économiste. Le programme de recherches établi chaque année par la D.R.M.E. est fondé sur cette directive. Il se traduit par la mise à jour et le prolongement d'un effort de prévision triennal. Elaboré comme une œuvre commune à l'ensemble de la Délégation Ministérielle pour l'Armement, il met particulièrement l'accent sur les opérations de recherche imposées par les développements en cours. C'est là une autre manifestation de la solidarité entre le chercheur et l'ingénieur de système d'arme. Si le chercheur compte sur l'ingénieur pour exploiter les résultats de laboratoire qu'il a obtenus, l'ingénieur compte sur le chercheur pour lui fournir les résultats de laboratoire dont l'absence pèse sur le développement dont il a la charge. La définition même du volume financier consacré à la recherche peut prêter à controverse. Si l'on prend en compte l'acception très large de « la recherche et du développement » jusqu'aux essais de prototypes inclus, acception assez couramment admise dans le secteur civil, les crédits qui lui sont consacrés approchent 30 % du budget d'équipement des Armées et 15 % du budget militaire total. Si l'on prend en compte l'acception précise définie plus haut, c'est environ par quatre qu'il faut diviser les pourcentages précédents, dont les troisquarts sont absorbés par les programmes de développement proprements dits. On arrive ainsi à un montant annuel de recherche un peu supérieur au milliard de Francs - recherches militaires du Commissariat à l'Energie Atomique exclues - sur lequel s'exerce l'action coordinatrice de la D.R.M.E. Sur ce montant, une part non négligeable est consacrée aux équipements des laboratoires et centres d'essais et à la recherche exploratoire, mais 75 à 80 % se rattachent à la recherche orientée et aux développements exploratoires. Dans cette masse, 42 % des crédits sont consacrés aux moyens de destruction et de neutralisation des forces adverses, c'est-à-dire aux engins stratégiques, aux engins tactiques, aux armes classiques et à la recherche de nouvéaux concepts d'armes, 31 % sont consacrés au mouvement, le mouvement aérien venant largement en tête avant le mouvement maritime puis le mouvement terrestre, 11 % sont consacrés aux moyens d'observation électromagnétiques, acoustiques, optiques, 8 % aux télécommunications et au traitement de l'information, 5 % aux blindages et à la protection contre les agents chimiques et les effets des explosions nucléaires, 3 % enfin à l'adaptation des personnels aux tâches militaires. Les domaines techniques ainsi abordés vont par ordre d'importance de la mécanique des fluides aux mathématiques appliquées, en passant par les matériaux, les techniques chimiques, le pilotage et la navigation, la détection, l'acoustique, l'optique, les composants électroniques, les techniques nucléaires, la pharmacologie, les sciences du globe, les télécommunications et l'électrotechnique. Ce classement a de quoi surprendre dans la mesure où il semble ne pas coïncider exactement avec l'ordre d'importance de ces domaines techniques dans la construction des matériels militaires, tel qu'on pourrait plus ou moins intuitivement être tenté de l'établir. L'explication en est simple et tient à ceci que dans certains domaines comme la mécanique des fluides, les Armées jouent un rôle d'animateur au niveau national, dans d'autres comme l'acoustique, elles ont des sujets. d'intérêt spécifique extrêmement importants, dans d'autres enfin comme les télécommunications ou l'électrotechnique, elles profitent largement - après les avoir dans bien des cas provoqués - des progrès et du dynamisme de la recherche civile. Avant de conclure, il faut mentionner une critique qui est souvent faite à la recherche, à savoir son manque de rentabilité. A l'opposé de l'opinion déjà mentionnée suivant laquelle la 102 103 recherche serait un investissement miracle, certains en effet la considèrent sans nuances comme une entreprise ruineuse. Cette attitude est aussi peu fondée que l'attitude contraire; mais le fait que l'on puisse de bonne foi énoncer des opinions aussi opposées tient pour une très large part - on a mentionné un problème analogue à propos des « retombées » de la recherche militaire - à l'absence d'instrument de mesure valable, à l'absence de référence solide, pour en juger. La recherche implique des choix : entre des possibilités trop nombreuses, il faut retenir les voies qui paraissent s'imposer comme les plus prometteuses. N'ayant pas poursuivi les autres, comment affirmer que les voies retenues se sont révélées les meilleures ? Deux remarques fort importantes, doivent cependant éclairer ce débat. D'abord, l'échec même d'une recherche, si l'on sait voir assez tôt que la voie choisie conduit à une impasse, est souvent un succès rentable, en ceci qu'il économise des sommes plus importantes que l'on aurait pu être tenté d'engager dans cette voie en fonction d'une confiance accordée par trop intuitivement. Il y a là une justification supplémentaire de la démarche rationnelle qui a motivé l'étude et la mise en vigueur des classifications et des procédures méthodiques évoquées plus haut. Ensuite et surtout, c'est par rapport à la réalité antérieure qu'il faut juger de la rentabilité de la recherche. Quel saut a-t-elle permis de franchir ? Quelle valeur faut-il attribuer à ce saut ? Que la recherche ait permis de réaliser les mêmes performances à moindre coût et la réponse est aisée. Qu'elle ait permis d'accéder à des performances nouvelles et la réponse l'est beaucoup moins, mais les procédures d'orientation en vigueur ont précisément pour objet de sélectionner les recherches en fonction du prix que l'on attache, au regard de notre politique de défense, au bénéfice qui peut en résulter. Dans bien des cas, ce bénéfice ne peut s'évaluer simplement dans quelque unité monétaire, car ses conséquences, parce qu'il s'agit de la défense, ont des répercussions lointaines souvent considérables. Ainsi en est-il des recherches qui ont permis à la France sans aucune aide extérieure, de se doter d'une force nucléaire diversifiée en lui donnant la maîtrise nécessaire de l'atome et des techniques de construction des engins balistiques et des sous-marins nucléaires. En tout cas, la mise en œuvre de notre stratégie de dissuasion -- seule politiquement efficiente aujourd'hui - s'est révélée compatible avec une diminution relative de l'effort financier pour la défense, très nette depuis dix ans : est-il de meilleure preuve de la rentabilité des recherches correspondantes ? La recherche militaire se présente finalement comme une somme d'actions d'ampleurs très diverses, dans des domaines scientifiques et techniques très variés. Son unité est cependant profonde en ceci qu'elle vise à préparer les outils de la défense future, dans le respect des priorités qui découlent de la politique militaire et des besoins de la planification à long terme. Le volume financier qui lui est consacré résulte de compromis toujours difficiles entre la satisfaction des besoins du moment et le souci de satisfaire les besoins de l'avenir. La fixation de ce volume ne peut, d'année en année, que respecter une continuité nécessaire à la validité de l'effort de recherche. Les tendances ne sont cependant pas à un accroissement important de ce volume dans les années qui viennent, mais d'abord à une rationalisation toujours améliorée de l'utilisation des sommes disponibles. Ainsi, gage de notre capacité permanente à intégrer le progrès technique dans l'évolution de nos équipements militaires, en fonction de notre polifique, de l'évolution des menaces et des contraintes financières et économiques, la recherche militaire, tournée vers l'avenir, contribue largement aujourd'hui et par son existence même, à l'efficacité permanente de notre politique de défense. 104 105