Stratégie ![0_image_0.png](0_image_0.png) ![0_image_1.png](0_image_1.png) de sécurité nationale ![0_image_2.png](0_image_2.png) # Table Des Matières | Avant-propos | 04 | |------------------------------------|------| | La Belgique dans le monde | 06 | | Intérêts vitaux | 09 | | Tendances et moteurs de changement | 12 | | Menaces et risques | 18 | | Orientations politiques | 26 | | Suivi et organisation | 43 | 02 1 ![2_image_0.png](2_image_0.png) # Avant-Propos Notre monde et notre société se trouvent confrontés à des défis fondamentaux. Non seulement les interconnexions sont plus nombreuses, mais les controverses le sont tout autant. Les réalisations de la construction européenne d'après-guerre sont remises en question. L'ordre international subit des pressions. Pour la première fois depuis la chute du mur de Berlin, des régimes autoritaires attaquent ouvertement les principes de nos démocraties libérales. La Belgique et l'Europe doivent également faire face à des menaces nouvelles et plus complexes. Les acteurs étatiques et non étatiques se tournent de plus en plus souvent vers des méthodes hybrides qui testent les frontières entre la guerre et la paix, allant de l'influence de l'opinion publique par la désinformation aux cyberattaques de grande envergure. Les conflits aux frontières de l'Europe favorisent le terrorisme et les flux migratoires. La COVID-19 a mis à l'épreuve notre capacité de résistance nationale dans des proportions sans précédent. Les répercussions médicales, économiques et politiques mondiales de cette crise persisteront longtemps encore. En outre, le changement climatique nous frappe plus fort et plus vite que prévu, et représente un coût humain, social et économique élevé. Dans un environnement en mutation, la responsabilité première du gouvernement reste la sécurité du pays et de ses citoyens, ainsi que les valeurs fondatrices de notre société. Pour la première fois, le gouvernement a donc élaboré une stratégie de sécurité nationale. Elle expose la vision du gouvernement sur les menaces et les risques affectant les intérêts vitaux de la Belgique et propose une politique intégrée pour y faire face, afin de ne pas subir les menaces, mais de les anticiper tout en créant des opportunités. Si nous parvenons, par exemple, à apporter des réponses inno-vantes au changement climatique, nous pourrons les partager avec d'autres pays. Une infrastructure informatique sécurisée offre aussi un avantage concurrentiel à nos entreprises. La Belgique fait partie des sociétés et des économies les plus ouvertes, ce qui fait notre force, mais nous rend également plus vulnérables. En outre, notre vision de la sécurité ne se limite pas à la défense des intérêts, mais s'attache aussi à des valeurs en vertu desquelles la démocratie, les droits humains et l'État de droit occupent une place centrale. Par conséquent, notre sécurité interne et externe sont étroitement liées. Notre politique de sécurité exige donc à la fois des mesures fortes en Belgique pour rendre notre pays plus résilient, et une action à l'étranger pour contribuer à un environ-nement sûr et à un ordre international fondé sur des règles. La Belgique ne peut concrétiser ce dernier objectif qu'en partenariat, surtout dans le contexte de l'UE. Cette stratégie s'inscrit donc dans le cadre des stratégies multilatérales de sécurité telles que la Stratégie globale de l'UE et le Concept stratégique de l'OTAN. En sa qualité de pays hôte de l'Union européenne et de l'OTAN, la Belgique porte d'ailleurs une responsabilité particulière à cet égard. Cette stratégie de sécurité nationale vise à apporter une contribution importante au développement d'une culture de la sécurité, où une conscience accrue des risques et des menaces se conjugue à la sauvegarde de nos intérêts. Il s'agit d'une tâche essen-tielle indivisible de tous les gouvernements de notre pays. Mais les entreprises, les universités, les partenaires privés et chaque citoyenne et citoyen ont également un rôle à jouer. Cette stratégie de sécurité nationale fournit un cadre général pour des sous-straté-gies plus détaillées, existantes ou à développer. Il ne s'agit pas d'une action ponctuelle mais d'un processus qui sera suivi de près et régulièrement mis à jour. Alexander De Croo ![4_image_0.png](4_image_0.png) ![4_image_1.png](4_image_1.png) ![4_image_2.png](4_image_2.png) ![4_image_3.png](4_image_3.png) ![4_image_4.png](4_image_4.png) ![4_image_5.png](4_image_5.png) Premier Ministre 1er décembre 2021 01 # La Belgique Dans Le Monde Notre vision de la sécurité est définie par notre identité et les valeurs qui nous sont chères. La Belgique est un pays où les droits fondamentaux sont garantis et protégés. Un pays doté d'une société ouverte, multilingue, avec une forte diversité culturelle et pourvu d'une grande créativité. Un pays d'émigration et d'immigration qui, en plus d'une importante diaspora, compte également d'importantes communautés d'origine européenne et non européenne. Un pays doté d'un modèle socio-économique unique visant une répartition équitable des richesses. La Belgique se caractérise également par une structure institutionnelle et politique complexe, fruit de l'Histoire, dont il faut tenir compte dans la politique de sécurité. De par sa situation géographique, la Belgique a éprouvé sa vulnérabilité face aux périodes de tensions internationales ainsi que la nécessité d'imprimer sa marque à l'étranger en jouant un rôle de premier plan dans de nombreux domaines. Ce rôle n'est cependant jamais définitivement acquis et doit être entretenu au quotidien. Au lendemain de deux guerres mondiales, la Belgique a résolument opté en faveur de la voie de l'intégration multilatérale - en particulier au sein de l'Union européenne (UE) - et de l'ordre juridique international. En sa qualité de membre fondateur, la Belgique a lié de manière unique son destin à celui de l'UE pour sa prospérité, sa sécurité et la défense de ses valeurs dans le monde. La Belgique entretient également des alliances stratégiques avec les Nations Unies (ONU) et ses institutions, où elle figure parmi les vingt plus importants contributeurs financiers, ainsi qu'avec l'Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE) et l'Organisation du Traité de l'Atlantique Nord (OTAN). Pour notre pays, qui entend précisément jouer un rôle de bâtisseur de ponts, cette approche offre des droits et des possi-bilités d'influence mais implique également des obligations et des responsabilités. La Belgique accueille les sièges de l'UE et de l'OTAN, ce qui lui confère la responsabilité particulière d'être un partenaire fiable. Bruxelles est en outre la capitale où réside la plus grande communauté diplomatique internationale au monde, avec plus de 300 missions diplomatiques étrangères et 120 organisations internationales. ## 06 En dehors de l'Europe, la Belgique entretient également des liens particuliers avec des pays tiers, dont ses partenaires transatlantiques, les États-Unis (USA) et le Canada, mais aussi des États d'Afrique centrale avec lesquels elle partage un passé commun. La Belgique se caractérise aussi par une économie forte et ouverte, dans laquelle pas moins de 85 % du PIB et un cinquième des emplois dépendent du commerce. Notre pays est l'un des dix premiers pays exportateurs au monde. Notre économie fonctionne dans un cadre créé par l'UE permettant la libre circulation des personnes, des marchandises, des capitaux et des services et dépend du commerce et des investis-sements internationaux. L'innovation et l'expertise hautement qualifiée constituent un moteur de notre économie. La Belgique est au sein de l'Europe un centre logistique et de services de premier ordre pour l'énergie, la finance, le transport et la communication. Nos infrastructures, et en particulier nos ports maritimes, jouent un rôle majeur à cet égard. Notre vision de la sécurité ne consiste pas seulement à défendre des intérêts, elle est également guidée par des valeurs. La Belgique suit et promeut un agenda axé sur la démocratie, les droits humains et l'État de droit, les valeurs éthiques, la solidarité internationale, le développement durable et la consolidation de la paix. ![6_image_0.png](6_image_0.png) Fig.1 | Valeurs sous-jacentes de la stratégie de sécurité Pour tous ces motifs, notre vision de la sécurité est globale. Elle exige une approche politique intégrée dans laquelle tous les opérateurs et secteurs apportent leur pierre à l'édifice à partir de leur expertise spécifique. Il s'agit non seulement d'une mission essentielle pour les pouvoirs publics, mais aussi d'une responsabilité sociale partagée. ![7_image_0.png](7_image_0.png) 02 # Intérêts Vitaux Une stratégie de sécurité nationale s'appuie sur les intérêts vitaux qui conditionnent la cohésion interne de notre pays et la pérennité de notre société. Dans une vision globale de la gestion des risques nationaux, il est donc important de bien identi-fier ces intérêts vitaux. Lorsque ces derniers sont en jeu, l'absence d'action induira (potentiellement) des perturbations sociales, y compris des dommages à l'ordre juridique démocratique ou un affaiblissement significatif de l'État. Il reste cependant essentiel de manier avec prudence le terme d'intérêt « vital » et de l'employer dans le sens d'un intérêt pour lequel nous sommes prêts, en tant que société, à faire des sacrifices afin de le sauvegarder. La sécurité nationale de la Belgique est en jeu à partir du moment où un ou plusieurs ![8_image_0.png](8_image_0.png) des intérêts vitaux suivants sont menacés : État de droit, démocratie, résilience et valeurs nationales Sécurité physique, intégrité territoriale ![8_image_1.png](8_image_1.png) ![8_image_2.png](8_image_2.png) ![8_image_3.png](8_image_3.png) ![8_image_4.png](8_image_4.png) Environnement ![8_image_7.png](8_image_7.png) Prospérité économique ![8_image_5.png](8_image_5.png) ![8_image_6.png](8_image_6.png) ![8_image_8.png](8_image_8.png) Ordre international ![8_image_10.png](8_image_10.png) Fonctionnement de l'UE ![8_image_9.png](8_image_9.png) ![8_image_11.png](8_image_11.png) ## Les Acquis De L'État De Droit Démocratique, La Résilience Nationale Et Les Valeurs Qui Y Sont Partagées La sauvegarde de la stabilité sociale et politique et des libertés sur lesquelles notre société est fondée est une mission essentielle de chaque pouvoir public. Le « contrat social » occupe une place centrale : le gouvernement garantit des services publics et les avantages de l'État-providence au citoyen, qui participe activement au sein de la société et dans le processus décisionnel politique. L'intégrité et la continuité du fonctionnement politique, judiciaire et administratif sont essentielles à cet égard. En outre, la résilience des services sociaux essentiels, mais aussi du tissu social lui-même, est cruciale. 01 ## La Sécurité Physique De Nos Citoyens, L'Intégrité Territoriale De Notre Pays 02 ![9_image_0.png](9_image_0.png) La protection de la population et du pays constitue la première mission de tout pouvoir public. Les citoyens belges à l'étranger relèvent également de cette responsabilité. Cet intérêt est étroitement lié à celui de nos voisins et alliés, notamment au sein de l'UE et de l'OTAN. La sécurité nationale est également de plus en plus fréquemment affectée au travers de l'espace numérique. L'intégrité de l'espace numérique fait donc partie de la sécurité physique et territoriale tout en étant étroi-tement liée à l'ensemble des autres intérêts de sécurité. ## L'Environnement Naturel De Notre Pays 03 Notre environnement offre les éléments de base nécessaires à notre existence. Sa sauvegarde revêt donc une importance capitale. Le changement climatique et la perte de biodiversité constituent des défis mondiaux impliquant un impact direct sur notre pays. La préservation de la qualité de l'air, des espaces ouverts, de l'appro-visionnement en eau et de la production alimentaire en sont des exemples concrets. La démarche inclut l'utilisation durable de ressources limitées, notamment à la lumière de la transition énergétique. ## La Prospérité Économique 04 Le fonctionnement efficace de notre économie ouverte dépend d'un cadre réglementaire national et international solide, dans lequel le commerce, les inves-tissements et les normes sociales et environnementales sont primordiaux. La protection des infrastructures et des actifs économiques essentiels, y compris les investissements à l'étranger, constitue un point de départ important. Pour un pays dont les matières premières sont limitées, la sécurisation des approvisionnements est essentielle. Dans un contexte d'évolution vers une économie innovante, les inté-rêts scientifiques et technologiques gagnent en importance. Nous œuvrons à une économie de marché sociale et inclusive dans laquelle les échanges économiques peuvent se développer de manière durable, avec pour objectif l'amélioration de la qualité de vie de la population. 05 L'ordre international fondé sur le droit international et le contexte multilatéral La Belgique est fortement interconnectée au niveau international, que ce soit sur les plans physique, numérique, économique ou politique. En raison de ces connexions et de l'imbrication croissante de la sécurité intérieure et extérieure, notre pays est fortement dépendant du bon fonctionnement et de la portée adéquate du système international de normes et d'accords fiables et exécutoires ainsi que d'organisations multilatérales efficaces. Étroitement lié aux autres intérêts de sécurité, cet intérêt ne saurait être considéré de manière isolée. 10 06 Le fonctionnement efficace de l'UE dans laquelle des éléments clés de ## Notre Souveraineté Sont Partagés L'intégration européenne fournit, d'une part, le cadre ad hoc pour des domaines politiques importants et, d'autre part, le meilleur instrument pour défendre les intérêts belges à l'échelle internationale. Le droit communautaire et une coopération solidaire constituent des piliers essentiels. Le marché intérieur et la libre circulation des personnes, des marchandises, des services et des capitaux sont essentiels pour notre économie. Cet objectif est étroitement lié à un euro crédible, à un système financier stable et à une capacité financière suffisante de l'UE. La consolidation et l'approfondissement de l'intégration européenne représentent donc un intérêt vital. 03 # Tendances Et Moteurs De Changement Plusieurs tendances et moteurs de changement à caractère transnational interagissent, ce qui multiplie leur impact sur les intérêts vitaux de la Belgique. ## // La Crise Climatique Le défi qui éclipse tous les autres reste la perturbation de l'environnement résultant du changement climatique, de la perte de biodiversité et de biomasse, ainsi que de la pression exercée par l'activité humaine sur l'environnement. Elle menace notre modèle sociétal et exerce par ailleurs un effet démultiplicateur sur d'autres phénomènes tels que la pauvreté, les conflits et les migrations, tout en exerçant une pression croissante sur les États (notamment les voisins méridionaux de l'UE) et le système multilatéral. Parallèlement à la transition vers les énergies vertes, la crise climatique crée également des opportunités. Le recul de l'importance des combus-tibles fossiles pourrait faire disparaître l'un des principaux moteurs de conflit. Il existe toutefois également un risque d'instabilité si les États concernés ne préparent pas la transition à temps. En effet, l'accès aux combustibles et matières premières non fossiles peut devenir une importante menace pour le développement écono-mique de la Belgique et de l'Europe. ## // La Politique Des Grandes Puissances Et Un Ordre Mondial Sous Pression Comme c'est généralement le cas dans l'Histoire, les relations entre les grandes puissances - États-Unis, Chine et Russie ainsi, bien évidemment, que l'UE - constituent le principal moteur politique. Le déplacement des centres de pouvoir - de la région atlantique vers l'Asie, mais aussi entre les États et les acteurs non étatiques - transcende les grandes puissances, mais c'est à leur niveau que la poursuite des intérêts entraîne une concurrence mondiale pour les marchés, les ressources, les partenaires et l'influence. La sécurisation des voies maritimes et la gestion de l'espace maritime revêtent une importance cruciale à cet égard. Toutefois, les intérêts peuvent aussi converger, ce qui amène les États à coopérer naturellement pour relever des défis communs. Cela étant, la concurrence entre les grandes puissances ne cesse de s'intensifier, notamment entre la Chine, devenue très rapidement un acteur mondial qui souhaite ## 12 étendre son influence, et les États-Unis, désireux de conserver leur position de leader. Dans le même temps, la Russie tente de consolider son statut de grande puissance par des actions assertives, notamment aux frontières de l'Europe. Cette tendance est incontestablement appelée à se poursuivre. La concurrence intense sur les plans politique, économique et militaire se transforme souvent en rivalité ; un contexte dans lequel les grandes puissances, de manière ciblée, se nuisent et s'entravent mutuellement tout en tentant de créer des sphères d'influence exclusives. Ces pratiques perturbent les flux commerciaux et d'investissement ainsi que les relations culturelles et scientifiques, elles provoquent l'érosion des organisations multilatérales et de l'État de droit international, et portent ainsi atteinte à notre prospérité et à notre sécurité ainsi qu'à notre capacité à faire face aux problèmes mondiaux. Le lien transatlantique demeure un pilier de la politique mondiale mais la rivalité sino-américaine entraîne un déplacement structurel de l'orientation stratégique des États-Unis de l'Europe vers l'Asie. ![12_image_0.png](12_image_0.png) Fig.2 | Carte du monde Si cette rivalité devenait systématique et permanente, notre monde globalisé risque-rait à nouveau d'éclater en blocs rivaux, qui prônent chacun leur propre « système » ainsi que leur propre vision du monde et forcent d'autres États à choisir leur camp. Au fil de l'Histoire, la Belgique a souvent été le jouet des grandes puissances. Aujourd'hui, notre pays est intégré à l'UE et à l'OTAN, mais ces institutions, elles non plus, n'échappent pas aux conséquences de cette rivalité. La position de l'UE est mise à mal sous l'effet du changement de l'équilibre des puissances, tandis qu'elle est confrontée en interne à un euroscepticisme croissant. Le défi européen consiste à instaurer une cohésion, une autonomie stratégique et une résilience suffisante pour assurer son auto-préservation et jouer un rôle de premier plan au service d'un ordre mondial stable. ## // Mondialisation, Mobilité Internationale, Concentration Économique Et Concurrence Géo-Économique L'interdépendance économique internationale a conduit à concentrer de plus en plus au cœur de quelques pays et entreprises la production de biens, de compo-sants et de services spécifiques, souvent cruciaux pour notre société et notre économie, avec pour corollaire l'émergence de dépendances et de vulnérabilités. Cette tendance est renforcée par une concurrence internationale inégale : tous les États n'obligent pas les entreprises à inclure les facteurs environnementaux de leur production économique dans la structure des coûts ni à respecter les normes envi-ronnementales, sociales et relatives aux droits humains. Parallèlement, la poursuite de la libéralisation contrôlée se heurte à des résistances protectionnistes, notamment de la part des grandes puissances qui, dans les rivali-tés qui les opposent, recourent de plus en plus à ces instruments que sont les flux commerciaux, les investissements étrangers, les règles relatives à la propriété intellectuelle ainsi que certains subsides et accords préférentiels. Le cadre multilatéral existant n'est pas assez fort pour maîtriser cette tendance géo-économique. La mondialisation et la libéralisation ont également apporté de vastes opportunités à nos citoyens. Outre les nombreux compatriotes qui voyagent, plus de 500 000 Belges résident de façon permanente à l'étranger, et cette tendance est à la hausse. ## // Évolutions Technologiques La technologie a toujours été un moteur de changement. Au fur et à mesure que l'humanité apprend à maîtriser de nouvelles dimensions (les mers, l'espace aérien, l'espace, et maintenant le cyberespace), elle crée de nouvelles opportunités, mais aussi de nouvelles dépendances, vulnérabilités et formes de conflit. Les développements au niveau des technologies émergentes et de rupture (emerging disruptive technologies) telles que le big data, l'intelligence artificielle et l'informatique quan-tique (actuellement principalement dans le secteur commercial) conduisent à une intensification de l'interconnexion et à une plus grande diffusion des technologies numériques, autant d'évolutions qui peuvent elles aussi être utilisées comme une arme. La technologie militaire est répartie plus équitablement, certainement entre les grandes puissances, ce qui réduit la supériorité militaire des pays de l'OTAN. De nouvelles questions éthiques se posent lorsqu'il s'agit de déterminer quelles technologies peuvent être utilisées dans quel but. La concentration économique joue un rôle essentiel dans la sphère technologique : une poignée d'entreprises multinationales ont un accès croissant à de plus en plus de données numériques. Cette évolution pèse sur la sécurisation des données à caractère personnel et la protection de la vie privée. Elle crée donc des possibilités accrues d'orienter le débat public, éventuellement à l'encontre des valeurs et des intérêts des États où elles opèrent. Seuls quelques États échappent totalement ou partiellement à leur emprise, notamment la Chine et la Russie. En parallèle, il existe une concurrence entre les grandes puissances également dans ce contexte : chaque grande puissance promeut ses propres standards technologiques. Beaucoup d'États se servent également des nouvelles technologies pour porter atteinte à la souverai-neté d'autres États. ## // L'Influence Croissante Des Acteurs Non Étatiques On observe une tendance parmi les acteurs économiques à tenter d'obtenir un monopole pour des biens et services vitaux. Les grandes entreprises numériques sont notamment parvenues à une position dominante entre autres parce que des États les ont laissées faire. Une approche prudente a été amorcée, destinée à permettre aux États de reprendre le contrôle. D'autres acteurs non étatiques se placent délibérément en dehors de l'État. Le crime organisé dispose d'énormes ressources financières et possède des ramifications internationales. En recourant à la corruption et à l'intimidation, il exerce une emprise sur les pouvoirs publics et la société dans de nombreux pays. Les organisations terroristes recrutent et s'organisent également au niveau international, elles entretiennent souvent des liens avec le crime organisé. Ces organisations s'appuient sur la montée de l'extrémisme et la polarisation de la société. Le terrorisme va et vient par vagues. Au Moyen-Orient et en Afrique, en particulier, il restera une force motrice importante. ## // Inégalités Et Démographie Si la mondialisation a généralement eu pour effet d'accroître la prospérité, elle a également précarisé des pans entiers de la population. De nombreuses personnes ont le sentiment de ne plus compter dans un monde globalisé. Depuis la crise financière de 2008, les inégalités économiques se creusent à nouveau à l'échelle planétaire. La crise du coronavirus ne fait qu'exacerber ce phénomène. L'inégalité de genre reste particulièrement marquée et les progrès réalisés en matière de droits des femmes ont été partiellement réduits à néant. Les droits de la communauté LGBTQIA+ sont à nouveau soumis à une pression accrue, y compris en Europe. Les inégalités vont directement à l'encontre du modèle sociétal belge, elles génèrent des tensions dans la société et sapent la légitimité de l'État et de l'ordre mondial, en Belgique et dans le monde. Les inégalités ont un effet multiplicateur sur les conflits et les migrations, elles renforcent un terrain propice à la polarisation et aux idéo-logies extrémistes qui, dans certains cas, conduisent à la violence, qu'elle soit de nature nationaliste, identitaire ou religieuse. Au niveau mondial, les tendances démographiques exacerbent les inégalités, notamment en Afrique, qui concentrera en 2050 un quart de la population mondiale dont la moitié sera âgée de moins de 25 ans. En l'absence de mesures correctrices contribuant à une répartition équitable de la prospérité, les inégalités iront crois-sant. Par ailleurs, l'évolution démographique constitue également un défi pour l'UE. La persistance des faibles taux de natalité et l'allongement de l'espérance de vie entraînent un vieillissement démographique avec des conséquences sur le marché du travail, les soins de santé et les systèmes de pension. Face à la croissance démo-graphique faible ou négative en Europe, la migration ciblée acquiert de l'importance pour l'avenir du système de sécurité sociale et l'attraction de main-d'œuvre pour des secteurs spécifiques. ## // Les Défis Pour La Gouvernance Démocratique Dans un contexte de perte de confiance dans la politique et les pouvoirs publics, citoyens, partis et même gouvernements de plusieurs États démocratiques, aban-donnent les acquis de la démocratie et de l'État de droit, y compris au sein de l'UE et de l'OTAN. Le PIB combiné des démocraties représentera à nouveau moins de la moitié du PIB mondial en 2021. De nombreux États déjà autoritaires deviennent encore plus répressifs. Cette tendance va souvent de pair avec les inégalités et l'insécurité. L'Histoire ne montre pas une progression linéaire de l'autoritarisme vers la démocratie : entre les deux guerres mondiales, la démocratie s'est même effondrée dans la majorité des États européens. Parallèlement à l'autoritarisme, le nationalisme est lui aussi en hausse. Le patriotisme crée la cohésion dans un pays et renforce l'assise de l'État. Le nationalisme, qui tend à s'affirmer en s'opposant aux autres, accentue quant à lui la concurrence et la rivalité entre les États. Là encore, cette tendance vaut également pour l'UE et l'OTAN. Sans contre-mesures efficaces, ces deux tendances menacent de saper leur cohésion et leur force. En outre, l'autoritarisme favorise les idéologies et les opinions religieuses extrêmes, avec des conséquences potentiellement violentes. ![16_image_0.png](16_image_0.png) 04 # Menaces Et Risques ## // Menaces Étatiques Conventionnelles Et Hybrides Les tensions croissantes entre les grandes puissances menacent notre environne-ment. L'action de la Russie en Ukraine illustre la logique militaire qui se renforce au service des intérêts nationaux et qui menace à nouveau les frontières de l'Europe d'une action armée. Mais les tensions territoriales se multiplient également plus loin de l'Europe, par exemple en Asie du Sud-Est et de l'Est, où la Chine se présente comme la superpuissance économique et militaire de demain. L'augmentation annuelle des dépenses militaires mondiales témoigne de ces tensions. Une OTAN unie, dotée d'une capacité de dissuasion suffisante, doit écarter toute menace militaire directe pesant sur notre territoire. Une défense européenne renforcée et intégrée doit y jouer un rôle croissant. Même si une menace directe à nos frontières nationales est peu probable, le risque de voir la Belgique confrontée à des situations de crise armée internationale augmente, notamment en raison de nos obligations conventionnelles, par exemple en vertu de l'article 5 du traité de l'OTAN. En outre, la course au contrôle de ces régions inexploitées que sont l'Arctique, les grands fonds marins et l'espace, qui risquent de devenir de nouveaux foyers de conflits, est lancée. La Belgique doit également défendre ses intérêts dans ces domaines d'expertise de haute technologie. Les conflits et l'instabilité dans notre périphérie créent un vide du pouvoir dans lequel les extrémistes, les groupes terroristes et la criminalité organisée ont le champ libre, mettent sous pression la région au sens large et menacent la sécurité ainsi que les routes commerciales de l'Europe. La Russie et de plus en plus la Chine, mais aussi la Turquie et les pays du Golfe, profitent de ce vide pour asseoir leur présence. Les importants flux de migration incontrôlée et irrégulière qui peuvent en découler peuvent avoir un impact sur la sphère publique et exercer une pression sur la stabilité sociale. Les États tiers qui exercent une influence sur les flux migratoires n'hésitent pas à s'en servir comme moyen de pression. Tout cela augure d'une nouvelle ère, dans laquelle les acteurs étatiques mais aussi non étatiques se tournent de plus en plus vers des méthodes et techniques hybrides. Celles-ci incluent l'utilisation combinée de techniques conventionnelles et ## 18 non conventionnelles qui testent les frontières entre guerre et paix, allant de l'in-fluence de l'opinion publique par la désinformation aux cyberattaques et à l'espion-nage, en passant par le chantage, le sabotage et les attaques CBRNe. Les attaques hybrides ciblent les vulnérabilités de l'adversaire, sont de nature ambiguë et tentent délibérément de se maintenir en dessous des seuils de détection, ce qui rend leur attribution difficile. L'espionnage est un phénomène permanent et cette menace ne diminuera pas dans les décennies à venir. L'espionnage et l'ingérence ont tous deux pour objectif premier de servir les intérêts stratégiques de pays tiers et de renforcer sa propre position de force (par exemple en obtenant des informations qui procurent un avantage ponctuel, tactique ou stratégique - qu'il soit de nature politique, militaire ou scientifique/économique). Les actions hybrides visent en outre à affaiblir notre ordre juridique démocratique et à saper la cohésion et la solidarité au sein de notre société, de l'UE et de l'OTAN, et donc notre capacité d'action. La Belgique, en sa qualité de pays hôte de l'UE et de l'OTAN, court un plus grand risque à cet égard. ## // Menaces Économiques La Belgique se caractérise par une économie très ouverte, étroitement interconnec-tée avec ses voisins et les États membres de l'UE. Le commerce et les investissements étrangers constituent des sources importantes de croissance économique. Ils contribuent à l'activité économique et à l'emploi, mais aussi au transfert de connais-sances et à l'innovation. Ils revêtent donc une importance capitale. Néanmoins, les risques éventuels suscitent une inquiétude croissante. La vigilance s'impose face aux investissements de pays tiers qui portent atteinte à nos intérêts fondamen-taux. Les rachats par des entreprises étrangères ou par des entreprises contrôlées par l'État ne sont pas nécessairement effectués pour des raisons économiques, ils le sont aussi pour des raisons stratégiques et politiques, qui peuvent conduire à une ingérence dans des processus décisionnels cruciaux ou à de l'espionnage. Ils peuvent ainsi mettre en danger notre sécurité et l'ordre public. Notre pays est également vulnérable, tant en matière d'approvisionnement en matières premières et en matériaux que d'espionnage technique, car les infrastructures critiques et les services essentiels sont encore trop dépendants des intrants et des technologies de pays tiers. L'innovation est l'un des principaux catalyseurs de la création de richesse dans notre pays. Le soutien à la recherche scientifique et au développement technologique est crucial à cet égard. La coopération internationale dans ce domaine doit être encouragée sans pour autant être naïf quant aux risques associés d'espionnage, de transferts de technologies avant valorisation, ou de détournement des connais-sances à d'autres fins. Dans le même temps, le partage des richesses pour réduire les inégalités mondiales, de même que les risques qui y sont associés, revêt une grande importance. En raison de notre économie ouverte, il est crucial que les acteurs belges puissent concurrencer les entreprises étrangères de manière libre, sûre et équitable. Cependant, ce n'est pas toujours le cas. Des entreprises étrangères, soutenues par leurs gouvernements, se livrent fréquemment à une concurrence déloyale vis-à-vis de nos entreprises, ce qui menace d'affaiblir notre économie. Par la protection unilatérale de leur marché national ces mêmes gouvernements empêchent nos entreprises d'exploiter pleinement leur potentiel de croissance. Le système monétaire, le système financier et les finances publiques peuvent être minés par une crise de confiance, entrainant des pertes dramatiques de richesse pour notre pays et ses habitants, s'ils s'appuient sur des actifs surévalués. ## // La Criminalité Organisée La présence de la criminalité organisée, internationalement ramifiée ou non, constitue une menace à l'égard d'une société sûre et d'un climat économique juste. Les actes de violence, le chantage et l'intimidation, la corruption et le blanchiment de revenus illicites constituent des éléments clés. La menace d'incidents violents semble avoir augmenté avec l'utilisation d'armes à feu ou d'explosifs dans des lieux publics. La corruption est omniprésente dans la plupart, sinon la totalité, des activités de la criminalité organisée. Elle se produit à tous les niveaux, depuis la corruption à petite échelle jusqu'à des montages de plusieurs millions d'euros. La corruption érode l'État de droit, fragilise les institutions publiques et entrave le développement économique. Les structures commerciales légales, généralement dans les secteurs de la construction, de l'import/export et de l'horeca, sont utilisées pour soutenir des activités criminelles. L'évolution rapide des technologies facilite la propagation de la criminalité organisée. Les criminels utilisent des communications cryptées pour se mettre en relation les uns avec les autres. L'environnement en ligne permet aux criminels d'accéder à une expertise et à des outils sophistiqués qui facilitent leurs activités illicites. Les réseaux terroristes et les groupes criminels se fondent parfois dans des struc-tures hybrides, notamment celles impliquées dans le trafic d'êtres humains, le trafic d'œuvres d'art et le trafic de drogue. À mesure que s'accentuait la mobilité de la criminalité, la fraude documentaire et identitaire s'est révélée une activité connexe flagrante. Ces phénomènes font ressortir une caractéristique importante des réseaux criminels qui réside dans leur capacité d'adaptation à tirer parti des changements de l'environnement dans lequel ils opèrent, et qui s'est une nouvelle fois confirmée durant la pandémie de COVID-19. // Cybermenaces et menaces liées aux développements technologiques Les acteurs étatiques et non étatiques utilisent de plus en plus le domaine numé-rique, généralement à des fins d'influence, de déstabilisation et d'espionnage, ainsi que pour réaliser des gains financiers. Le nombre de cybercrimes enregistrés augmente de manière exponentielle et de plus en plus de particuliers et d'entreprises en sont victimes. Les attaques touchent également l'infrastructure numérique du gouvernement et des services essentiels, accroissant la menace. L'impact économique de la cybercriminalité est déjà de l'ordre de plusieurs milliards d'euros par an et continuera de croître. Le glissement de la criminalité du monde physique vers le monde numérique se poursuit depuis des années, mais semble encore plus prononcé depuis la pandémie de COVID-19. Outre l'augmentation rapide du nombre de cyberattaques à motivation financière, le nombre sans cesse croissant de cyberactions à motivation géopolitique ou idéo-logique, menées par des terroristes, des extrémistes et des activistes (hacktivisme) d'une part, ou des acteurs étatiques d'autre part, suscite une grande inquiétude. Accueillant le siège des institutions de l'UE, de l'OTAN et du Supreme Headquarters Allied Powers Europe (SHAPE) la Belgique est évidemment une cible intéressante pour le cyberespionnage ou le sabotage (diplomatique, académique, industriel et économique). En ce sens, la Belgique court un risque accru par rapport aux pays voisins. Les cyberattaques deviennent plus sophistiquées, plus audacieuses et aussi plus destructrices. En constante évolution, le développement de logiciels malveillants risque de compromettre la résilience face aux cyberattaques. Les technologies et opportunités émergentes telles que la 5G, l'informatique quantique, l'intelligence artificielle, l'apprentissage automatique, les crypto-monnaies, la technologie infonuagique et le big data, entraînent de nouveaux risques de nature tant accidentelle (sûreté) qu'intentionnelle (sécurité). L'évolution vers une interconnexion numérique accrue entre les appareils (Internet des objets) entraîne une multiplication des cibles et des impacts, ainsi qu'un risque cybernétique accru pour chaque utilisateur final. L'origine des cyberattaques et des attaques visant des systèmes d'information reste facile à dissimuler. Le nombre élevé et la diversité des auteurs de ces actes compliquent en effet leur attribution et la mise en place d'une dissuasion efficace. // L'extrémisme, le terrorisme et les terreaux propices au processus de ## Radicalisation Dans un État de droit démocratique, les opinions divergentes ont leur place. Des personnes et des groupes peuvent s'exprimer de manière radicale, du fait de la liberté d'expression. Ils peuvent toutefois également constituer une menace lorsqu'il est question d'incitation à la haine et à la violence. Les manifestations d'extrémisme sont en conflit avec les principes de la démocratie, les droits humains, le bon fonctionnement des institutions démocratiques ou d'autres fondements de l'État de droit. Le terrorisme, avec l'utilisation de la violence, en est la forme extrême. La Belgique a éprouvé le lourd tribut social, économique et humain qu'un attentat peut infliger, en particulier lorsqu'il vise une infrastructure vitale, des personnes exerçant des fonctions-clés ou des espaces publics. La menace intérieure, à savoir des individus qui se radicalisent chez nous et choisissent de commettre des actes violents dans leur propre pays, représente la menace la plus importante tant au niveau du terrorisme islamiste que de l'extrémisme de droite. De manière générale, ces individus agissent seuls. Les « acteurs solitaires » n'ont généralement aucun lien formel ou structurel avec des groupes terroristes, mais sont inspirés par la propagande extrémiste ou terroriste sur Internet ou les médias sociaux. Les influences et les récits étrangers sont adoptés par des groupes ou des individus en Belgique. De manière générale, la menace est devenue plus diffuse, les motivations des auteurs sont désormais plus vagues et plus diverses. Tant les défis sociaux structurels auxquels la Belgique est confrontée que les développements internationaux, y compris les tensions politiques et diplomatiques entre différents pays et continents, peuvent influencer la manière dont la polarisation se construit. Après les revers de l'État islamique dans sa base de repli en Syrie-Irak, la situation sécuritaire instable au Moyen-Orient, le difficile processus de reconstruction et le mécontentement social et politique ainsi que l'ingérence extérieure ne sont que quelques-uns des facteurs qui peuvent conduire à une résurgence de l'EI ou de groupes terroristes similaires. Une surveillance étroite de l'impact du retour du régime des talibans en Afghanistan s'impose. Al-Qaïda reste également actif dans le djihad mondial. L'augmentation des activités des groupes terroristes djihadistes sur le continent africain, en particulier, peut avoir à terme certaines répercussions sur la sécurité. Plusieurs attentats d'extrême droite ont déjà eu lieu, tant en Europe qu'en dehors de ses frontières. Dans le monde entier, le racisme est lié dans les médias sociaux à toutes sortes de théories complotistes évoquant l'idée d'un grand remplacement ou une guerre raciale imminente. Les appels à l'action se multiplient. La pandémie de COVID-19 et les développements politiques internationaux ont donné lieu à un foisonnement de théories du complot et de la désinformation, notamment dans les médias sociaux. Certains acteurs étatiques en dehors de l'UE jouent un rôle actif dans la diffusion de ce type de messages. Ces développements sont susceptibles d'éroder la confiance dans les pouvoirs publics et dans la politique et conduisent, dans certains cas, à une forte polarisation et à la violence. L'extrémisme de gauche ainsi que le cyberterrorisme/extrémisme pourraient également mobiliser davantage notre attention au cours des prochaines années. ## // Menaces Liées Aux Évolutions Naturelles Et Climatiques Le changement climatique frappe plus durement et plus rapidement que de nombreux observateurs l'avaient prévu. Face au défi climatique, deux risques peuvent être distingués : les risques physiques et de transition. Le changement climatique dans notre pays entraînera des étés plus chauds et plus secs et des hivers plus doux et plus humides. Les risques physiques aigus incluent la fréquence et l'intensité accrues des vagues de chaleur, des sécheresses, des conditions météorologiques extrêmes, la détérioration de la qualité de l'air, les phéno-mènes naturels incontrôlés, l'augmentation des précipitations saisonnières et des inondations. Ces phénomènes auront un impact négatif majeur sur la productivité du travail, le commerce international, les services écosystémiques et le secteur de la santé, suivis de près par les infrastructures et l'agriculture. En outre, les groupes vulnérables de la société sont touchés de manière disproportionnée par les réper-cussions du changement climatique. Les risques de transition sont les risques socio-économiques découlant du défi que représentent la décarbonisation de notre société et, à terme, sa neutralité clima-tique. En effet, la transition vers une société climatiquement neutre nécessitera des changements structurels profonds touchant de nombreux secteurs vitaux en Belgique tels que le transport et la mobilité, le logement, les modes de production et de consommation. Le changement climatique constitue également une crise planétaire qui menace la stabilité mondiale et amplifie un certain nombre de risques à prendre en compte dans les analyses de sécurité. Ces risques portent notamment sur la sécurité alimentaire, les conflits, les migrations de masse, le droit et la gouvernance internationaux, la santé publique et la perte de biodiversité. ## // Les Risques Sanitaires Dans Un Monde Globalisé La mondialisation accrue facilite la propagation des maladies à potentiel pandé-mique comme la COVID-19 et des maladies transmissibles entre l'homme et l'animal. Une maladie contagieuse parmi les animaux de rapport n'aura pas seulement un impact financier majeur, elle peut également menacer la santé humaine. Pour certaines de ces maladies, un traitement ne sera pas encore disponible ou les vaccins nécessaires seront indisponibles. La pandémie de COVID-19 a démontré l'ampleur de l'impact sur les intérêts sécuritaires tels que la sécurité physique, la stabilité sociale et politique et la sécurité économique. Cela implique d'emblée des risques accrus pour les compatriotes en voyage ou qui résident à l'étranger. Ainsi, la pandémie de COVID-19 a contraint le gouvernement à rapatrier plus de 11 000 compatriotes. Des maladies liées au secteur des soins peuvent également survenir. Il s'agit notamment des infections associées aux soins, où les bactéries multirésistantes sont particulièrement préoccupantes. Outre la résistance aux antibiotiques, des formes de tuberculose résistantes aux médicaments font également leur apparition, consti-tuant une menace sérieuse pour la santé publique. Entre autres pour des malades chroniques, la sécurité d'approvisionnement en médicaments est cruciale. L'intégrité de la chaîne alimentaire peut être compromise par divers incidents susceptibles d'entraîner des répercussions en matière de santé publique et de sécurité alimentaire. Enfin, les animaux, végétaux et micro-organismes invasifs devraient constituer une menace croissante en raison de la mondialisation et du changement climatique. La prolifération de ces espèces chez nous peut nuire à la biodiversité et à l'économie. ## // Cbrne - Armes De Destruction Massive Le risque CBRNe est un enjeu important pour la Belgique. Ces dernières années, les menaces (transnationales) liées aux agents chimiques, biologiques, radiologiques et nucléaires, éventuellement combinés à des explosifs (CBRNe) ont augmenté. Outre l'origine intentionnelle ou criminelle, les incidents CBRNe peuvent également être de nature accidentelle. Pour les deux catégories, le risque est estimé à faible probabilité mais impact potentiellement élevé pour la santé publique, l'environnement et l'économie. Dans un contexte de tension internationale croissante, les courses aux armements régionales réapparaissent et certains États se sentent de moins en moins liés par les accords multilatéraux de contrôle des armements. Une menace supplémentaire réside dans l'application des développements technologiques aux systèmes d'armes, qui réduisent le temps de réponse et augmentent l'imprévisibilité. Les progrès de la science biologique ouvrent la voie à des applications potentiellement dangereuses. Une attaque recourant à des agents CBRN nécessite des connaissances spécifiques mais l'accès à l'information (via internet) réduit cet obstacle. Des organisations terroristes ou des extrémistes appellent à mener des attaques utilisant des agents CBRN. La présence d'infrastructures et de réseaux critiques peut accroître considérablement l'impact d'une attaque CBRNe. La Belgique, et notamment Bruxelles en tant que carrefour diplomatique majeur, peut constituer une cible. Un incident CBRNe peut également se produire en l'absence d'intention malveillante. Malgré les progrès technologiques et le renforcement des mesures de sécurité, l'erreur humaine reste l'un des facteurs les plus importants à l'origine d'accidents. L'erreur humaine, les défaillances techniques ou les causes naturelles peuvent être une source de risques dans les installations nucléaires, les installations chimiques « Seveso » (les unes et les autres largement présentes en Belgique) ou dans le secteur des transports. ## // Perturbation Des Infrastructures Vitales La perturbation ou la défaillance d'infrastructures vitales qui fournissent à la société des processus ou des fonctions d'importance vitale pourrait entraîner de graves perturbations sociales ou constituer une menace pour la sécurité nationale. Les risques et les menaces qui pèsent sur ces infrastructures vitales peuvent être d'origine humaine (espionnage, attaques ou sabotage et cybercriminalité avec impli-cation interne et/ou externe) ou technologique. Les tempêtes solaires et autres phénomènes météorologiques extrêmes peuvent également provoquer de graves perturbations. Les technologies spatiales sont utilisées dans de nombreuses applications technologiques dont la société est de plus en plus tributaire, telles que la communication et le géo-positionnement. Leurs évolutions rapides ont créé de nouvelles opportunités, mais aussi des vulnérabilités si l'accès aux services liés à l'espace est intentionnellement ou accidentellement coupé. Dans un monde où technologies et sociétés sont de plus en plus imbriquées, et compte tenu de l'interdépendance des fonctions dans ces secteurs vitaux, il est primordial que ceux-ci soient suffisamment sécurisés, protégés et résilients. C'est dans ce contexte que les alliés de l'OTAN se sont engagés en 2016 à Varsovie à accroître la résilience en poursuivant sept exigences de base1. ## // Une Pression Croissante Sur Les Valeurs, Les Normes Et La Coopération Internationales Un ordre international fondé sur des règles est essentiel pour nos intérêts vitaux. Le cadre multilatéral permet de réduire l'imprévisibilité des relations internationales et de prévenir les conflits et l'instabilité. Cependant, les tensions géopolitiques et géo-économiques croissantes entre les grandes puissances mettent le système à rude épreuve. Ces perturbations peuvent prendre diverses formes, allant de l'utilisation abusive du droit de veto au sein du Conseil de sécurité au retrait de certains pays d'accords et d'engagements internationaux. L'interruption de la coopération dans des domaines tels que la santé, la sécurité, la non-prolifération ou le climat a une incidence directe sur notre économie et notre rôle international, mais également un impact immédiat sur les citoyens belges à l'étranger. Dans le monde globalisé d'aujourd'hui, le périmètre national s'étend au-delà des limites physiques de notre pays. Les citoyens belges, les entreprises et, en particulier, nos postes diplomatiques et consulaires, sont exposés au risque d'actions violentes en raison de leur lien avec la Belgique, ses valeurs et ses positions, si les normes internationales en vigueur ne sont pas respectées. L'UE, l'OTAN et l'OSCE ne sont pas à l'abri des pressions exercées sur le système international. D'une part, des puissances extérieures tentent activement de saper leur cohésion et leur force, par le biais de nombreuses actions hybrides. D'autre part, les gouvernements de certains membres de ces organisations se détournent également du multilatéralisme. La remise en cause ponctuelle par certains États membres de l'UE des valeurs et principes fondamentaux sur lesquels repose le projet d'intégration européenne, dont l'État de droit, fragilise non seulement le rayonnement international de l'UE mais aussi ces mêmes fondements qui sont essentiels à la prospérité de notre économie ainsi qu'à la sauvegarde de notre sécurité, et au respect des valeurs individuelles et collectives. Les stratégies organisées visant à manipuler les opinions au moyen d'une diffusion massive de *fake news* et de l'exploitation d'algorithmes inhérents au fonctionnement et à la programmation actuels des médias sociaux exercent une influence crois-sante et risquent de déséquilibrer les sociétés en façonnant l'opinion publique ou en interférant dans les processus électoraux. 1 Les sept exigences de base sont : 1) garantie de la continuité des pouvoirs publics et des services publics essentiels ; 2) résilience des approvisionnements énergétique ; 3) aptitude à gérer efficacement des mouvements incontrôlés de personnes ; 4) résilience des ressources en vivres et en eau ; 5) aptitude à gérer un grand nombre de victimes ; 6) résilience des systèmes de communication civils ; 7) résilience des systèmes de transport civils. ![24_image_0.png](24_image_0.png) 05 # Orientations Politiques En réponse aux risques et menaces identifiés, la Belgique mènera une politique intégrée visant à renforcer la résilience de notre pays à tous les niveaux afin de préserver les intérêts nationaux de la Belgique. Cette politique constitue l'une des conditions préalables nécessaires à un déploiement stratégique actif tant dans notre pays qu'à l'étranger, afin de contribuer à un environnement sûr. De même que les risques et les menaces sont le résultat d'événements et de développements internes et externes étroitement imbriqués, notre réponse exige tant des mesures énergiques à tous les niveaux politiques qu'une action à l'étranger, de concert avec des partenaires, notamment dans le contexte de l'UE. Cette approche intégrée s'applique à tous les domaines abordés ci-dessous. Tous les domaines, quelle que soit la façon dont ils sont regroupés par la suite, sont interconnectés et la stratégie doit donc être considérée comme un tout. 01 ![25_image_0.png](25_image_0.png) Protéger la démocratie et l'État de droit 02 Sécurité économique 03 Renforcer la résilience 04 Responsabilité internationale Tant les politiques qui répondent actuellement déjà aux besoins existants que les nouvelles orientations y figurent. De cette manière, la présente stratégie de sécurité nationale offre un large cadre stratégique, non seulement pour la politique existante - comme le Plan national de sécurité, la Note stratégique Extrémisme et Terrorisme, la Note-cadre Sécurité intégrale ou encore la Stratégie Cybersécurité Belgique 2.0, mais aussi pour de nouvelles initiatives politiques. ## 01 Protéger La Démocratie Et L'État De Droit // Sauvegarde de notre démocratie et de nos valeurs et lutte contre la ## Polarisation Dans l'UE, comme dans le reste du monde, la démocratie, les principes de l'État de droit et les valeurs fondamentales sont soumis à une pression croissante. La Belgique doit également se montrer vigilante à cet égard. Le processus de renouvellement démocratique initié par des autorités fédérales, fédérées et locales repré-sente une étape importante à cet égard. L'UE se montre également particulièrement attentive à ces développements. Le Plan d'action pour la démocratie européenne de la Commission européenne vise à renforcer la résilience des démocraties au sein de l'UE et à apporter une réponse aux vulnérabilités majeures des systèmes démocratiques et des citoyens. Ses objectifs incluent notamment l'intégrité des processus électoraux, la promotion de la participation au processus démocratique, le renforcement de la liberté des médias, le pluralisme des médias et la lutte contre la désinformation. En ce qui concerne la lutte contre les menaces, le plan met fortement l'accent sur la consolidation de la position du citoyen et de la société civile. Pour ce qui est de la lutte contre la désinformation, la proposition de législation européenne sur les services numériques organisera un environnement en ligne plus sûr et responsable. Les mesures destinées à garantir les droits humains et l'égalité au sein de la société font partie des missions du gouvernement et représentent un facteur essentiel dans la lutte contre la polarisation. La préservation du contrat social entre les autorités et les citoyens en constitue un volet essentiel. La Belgique poursuivra ses efforts dans ce domaine et véhiculera l'importance de nos valeurs démocratiques au niveau international. Ainsi, elle œuvrera au sein de l'UE en faveur du respect des valeurs fondatrices de cette dernière. // Une approche multidisciplinaire de l'extrémisme, du terrorisme et des ## Terreaux Propices Au Processus De Radicalisation Des investissements se poursuivront dans une approche multidisciplinaire axée sur la gestion des risques, en mettant l'accent sur la détection précoce, l'échange d'informations, l'analyse continue des menaces individuelles et, sur cette base, les mesures adéquates adaptées à chaque individu. Le but ultime est toujours, d'une part, la réintégration dans la société, d'autre part, la protection de cette société. Des mesures spécifiques ont été élaborées dans la Note stratégique Extrémisme et Terrorisme et la Note-cadre Sécurité intégrale. À cet égard, une approche locale est importante. Au sein des task forces locales, on s'accorde sur le choix des services les mieux placés pour prendre les mesures les plus appropriées. Ces mesures peuvent aussi bien être proactives, plutôt sécuritaires ou répressives, que préventives ou axées sur la réintégration sociale. Pour ces derniers aspects, les Cellules locales de sécurité intégrale en matière de radicalisme, d'extrémisme et de terrorisme, au niveau des villes et des communes, jouent un rôle crucial. Pareille approche multidisciplinaire offre les meilleures garanties pour limiter les effets néfastes de la radicalisation. Ces dernières années, outre l'approche prioritaire du phénomène des combattants terroristes étrangers (*Foreign Terrorist Fighters*, FTF), une attention constante a été portée aux diverses formes d'extrémisme idéologique et de terrorisme. Cette approche nous permet d'assurer le suivi de toute forme d'extrémisme ou de terrorisme et de réagir rapidement aux nouveaux développements. Dans certains cas, l'ouverture d'une enquête pénale sera la seule solution possible afin de protéger la société contre certaines activités terroristes, comme celles de réseaux dans lesquels sont recrutés des jeunes en vue de faire le djihad, de groupes qui ont l'intention de commettre des attentats terroristes ou d'acteurs dits isolés (*lone actors*). Notre législation prévoit un arsenal suffisamment large de moyens d'investigation et de dispositions de droit pénal pour lutter contre le terrorisme. Toutefois, il convient de veiller en permanence à la présence de capacités spécialisées suffisantes au sein des services de police et de renseignement et de l'Organe de coordination pour l'analyse de la menace (OCAM), notamment à des fins de surveillance et de lutte contre les contenus nuisibles sur internet, ainsi qu'au développement de la coopération entre tous les partenaires. Par ailleurs, les terreaux propices au processus de radicalisation doivent demeurer un point d'attention dans les plans d'action et les plans stratégiques élaborés par les autorités des entités fédérées responsables en matière de prévention. Le travail commence par les domaines politiques traditionnels tels que l'enseignement, le bien-être, le marché du travail, l'intégration et l'éducation civique. Il existe également un lien important avec le thème de la polarisation. Toutefois, une approche nationale ne peut être couronnée de succès que si elle s'inscrit dans le cadre des efforts européens et internationaux. Au niveau de l'UE, ces efforts incluent le programme de lutte contre le terrorisme proposé en décembre 2020 pour renforcer la résilience de l'UE face aux menaces terroristes, ou encore une participation active de la Belgique au sein du Réseau de décideurs pour la prévention (*Prevent Policy Makers Network*). La coopération sur toutes les dimensions du terrorisme par le biais d'Europol et d'Eurojust, ainsi que par des contacts bilatéraux, sera renforcée. Au niveau des Nations Unies, l'action de la Belgique s'inscrira dans le cadre de la Stratégie antiterroriste mondiale et des résolutions pertinentes du Conseil de sécurité. Compte tenu du grand nombre de FTF liés à la Belgique qui se trouvent encore à l'étranger, nous renforcerons nos propres capacités en matière de renseignement et de diplomatie ainsi que la coopération bilatérale avec nos partenaires afin de continuer à surveiller les régions concernées. La lutte contre le terrorisme exige un effort global à long terme. La Belgique continuera donc à contribuer avec loyauté à la lutte internationale, où que ce soit dans le monde, dans le prolongement du déploiement actuel en Irak et au Sahel. Le déploiement des forces armées belges, dans des formations ad hoc ou dans le cadre d'opérations ou de missions de l'UE ou de l'OTAN, requiert une approche intégrée avec une coordination étroite entre les départements (Affaires étrangères et Défense). En effet, la lutte contre le terrorisme constitue l'effort civilo-militaire par excellence dans le cadre duquel une solide contribution locale et le soutien aux gouvernements locaux afin de les aider à assurer leur propre sécurité et stabilité se révèlent essentiels. ## // Une Lutte Énergique Contre La Criminalité Organisée Des approches complémentaires au sein de la chaîne de sécurité (police, justice, partenaires de sécurité, etc.) sont indispensables afin d'apporter une réponse plus efficace aux réseaux criminels, de plus en plus internationaux, mobiles, durables et poly-criminels, qui utilisent toutes les contre-stratégies possibles (corruption, infiltration de l'économie légale, réseaux sociaux, etc.) pour maximiser leurs profits. Les orientations politiques pour une approche intégrée et globale de la criminalité organisée par tous les acteurs pertinents de la sécurité en Belgique sont incluses dans la Note-cadre sur la sécurité intégrale 2022-2024 et le Plan national de sécurité 2022-2025. Des efforts sont consentis en faveur d'une approche judiciaire intégrant toutes les possibilités d'exécution administrative afin d'empêcher l'implantation d'organisations criminelles et la formation d'interconnexions entre activités légales et illicites. Le recours à l'innovation numérique et à des techniques d'enquête innovantes spécifiques (accordant une attention particulière au potentiel du big data et de l'in-telligence artificielle), assorti des garanties nécessaires entre autres en matière de droit à la protection de la vie privée, s'avère tout aussi important. Mener une lutte déterminée contre la criminalité organisée implique non seulement un engagement résolu à arrêter les criminels, mais aussi certainement une attaque financière contre le patrimoine criminel selon le principe *follow the money*. Les nœuds de transport essentiels étant souvent utilisés par les organisations criminelles comme plaque tournante de leurs activités, les autorités compétentes et les partenaires de la sécurité doivent fournir tous les efforts nécessaires pour les sécuriser. Une coopération judiciaire renforcée tant en Europe qu'au niveau mondial doit contribuer à la cartographie des réseaux criminels et à une intervention coordon-née. Les pays d'origine ou les pays dans lesquels les profits criminels sont investis sont sensibilisés et stimulés au moyen d'accords bilatéraux avec des pays tiers et de la politique européenne de sécurité. Au niveau européen, la stratégie de l'UE en matière de lutte contre la criminalité organisée constitue le cadre pour la période 2021-2025. Notre pays contribuera activement à la mise en œuvre de cette stratégie. L'échange international d'informations doit être renforcé, par des canaux directs tels qu'Europol, Eurojust, Interpol et le réseau CARIN pour le recouvrement des avoirs, qui s'appuiera sur le nouveau Parquet européen. La mise en place de réseaux opéra-tionnels d'échange d'informations, tels que GloBE dans la lutte contre la corruption, revêt une grande importance. Au niveau du Benelux, la ratification et la mise en œuvre correcte du nouveau Traité de police Benelux constituent une priorité importante. ## // Une Application Efficace Et Correcte De La Loi L'application de la loi contribue à une société plus juste, plus humaine et plus sûre. Pour chaque crime constaté, une réaction proportionnée et socialement pertinente doit être donnée dans un délai socialement acceptable. À cet égard, il convient de tenir compte de l'intérêt des victimes et de la protection de l'intérêt général, de l'ordre public et des justiciables, qui bénéficient d'une protection particulière de la loi en raison de leur position vulnérable. L'accessibilité de la justice joue un rôle important dans la confiance en l'État de droit. La détection et la poursuite des crimes de manière objective, humaine et indépen-dante, dans le respect de la loi et des droits et libertés fondamentaux, d'une part, et la définition et la mise en œuvre d'une politique pénale mûrie et réaliste répondant à toutes les évolutions de la société, d'autre part, en sont deux composantes essentielles. À cette fin, la politique pénale doit faire l'objet d'ajustements constants et d'une évaluation de son application sur l'ensemble du territoire. La lutte contre l'impunité des crimes graves au regard du droit international est essentielle pour renforcer l'État de droit au niveau international, rendre justice aux victimes et garantir une paix durable. La coopération entre les États, mais aussi entre les États et les tribunaux pénaux internationaux et d'autres mécanismes d'enquête, est indispensable pour atteindre ces objectifs. La Belgique y attache une grande importance et en fait une priorité de sa politique étrangère. Sur le plan interne, la gravité intrinsèque de ces crimes, qui portent atteinte non seulement à l'ordre public belge mais aussi à l'ordre public international, nécessite qu'un traitement prioritaire soit réservé aux enquêtes portant sur des violations graves du droit international humanitaire, en particulier celles portant sur des crimes de génocide, des crimes contre l'humanité et les crimes de guerre les plus graves. ## 02 Un Engagement Plus Marqué En Matière ![29_Image_0.Png](29_Image_0.Png) De Sécurité Économique La sauvegarde des éléments essentiels qui permettent la survie et le développement optimal de notre modèle socio-économique nécessite une approche globale s'articulant autour des éléments clés suivants : un environnement international libre, sûr et équitable pour les acteurs économiques ; l'autonomie stratégique des économies belge et européenne, c'est-à-dire un accès garanti aux ressources énergétiques, aux matières premières, aux capacités de production, aux technologies et aux marchés ; la sécurité des infrastructures critiques ; la sécurité alimentaire et l'approvisionnement en médicaments ; et enfin la sécurité des produits de la recherche scientifique et de la recherche et développement. Les compétences en matière d'économie sont réparties entre les niveaux fédéral et régional. La coopération et la coordination sont donc cruciales pour garantir cette sécurité économique. Il est important de disposer d'une liste uniforme de secteurs stratégiques dans lesquels la coopération avec des pays tiers ou l'apport de capitaux étrangers peuvent présenter un risque pour notre sécurité économique. L'uniformité de l'approche doit permettre une protection optimale du potentiel économique et scientifique de notre pays contre les menaces de pays tiers, telles que l'espionnage, la déstabilisation économique et l'ingérence. ## // Un Environnement International Libre, Sûr Et Équitable Pour réussir, les entreprises belges doivent pouvoir opérer dans un environnement économique équitable, fondé sur des règles transparentes. L'Organisation mondiale du commerce joue un rôle clé dans ce domaine. Au niveau international, la Belgique est favorable à un renforcement des engagements contraignants et exécutoires mutuels en faveur du développement durable, y compris le respect des normes environnementales, climatiques et sociales. Cette approche contribue tant à une meilleure gouvernance mondiale qu'à des conditions plus équitables pour la concurrence internationale. Lorsque des marchés nationaux sont cloisonnés unilatéralement, une certaine forme de réciprocité doit être possible, sans tomber dans le protectionnisme. En plus des instruments de défense commerciale existants, l'UE a proposé une boîte à outils (toolbox) de mesures diverses pour mieux protéger nos acteurs économiques et nos gouvernements. Citons par exemple le cadre de screening des investisse-ments étrangers directs, la boîte à outils pour la cybersécurité de la 5G, l'instrument international de passation de marchés publics et le règlement sur les subventions étrangères qui faussent le fonctionnement du marché intérieur. La Belgique doit non seulement contribuer à la création de ces instruments, mais aussi les appliquer en temps utile et, le cas échéant, les transposer dans sa législation nationale. L'UE doit encore renforcer sa résilience face aux crises financières et monétaires. Le système européen intégré de surveillance de la capacité économique et financière des États membres et des institutions financières, ainsi que leur solidarité face à la spéculation agressive, sont essentiels à cet égard. Le parachèvement de l'union bancaire, un approfondissement du marché des capitaux, ainsi qu'une plus grande autonomie du système financier de l'UE vis-à-vis des centres financiers non européens, constituent autant d'éléments indiqués. La Belgique soutient également la réflexion en cours sur la manière dont l'UE peut s'armer économiquement et financièrement contre les conséquences négatives des décisions prises par d'autres acteurs, telles que les barrières commerciales ou les effets extraterritoriaux de sanctions unilatérales. De nouvelles formes de protection des opérateurs économiques européens doivent être explorées, de même que le renforcement de l'euro dans le commerce mondial. ## // Renforcement De L'Autonomie Stratégique Il n'existe pas de consensus au niveau de l'UE, du moins à ce stade, sur le degré d'autonomie, le champ d'action des secteurs concernés et la résilience requise. En tout état de cause, le concept d'autonomie stratégique « ouverte » ne doit pas conduire au protectionnisme. Au travers d'accords de partenariat, de la politique commerciale extérieure et de la coopération au développement, l'UE doit gérer son interdépendance avec le reste du monde. Il est important de concrétiser cet objectif par rapport aux principaux partenaires commerciaux de l'UE, mais aussi par rapport à ses voisins et au continent africain. Tout comme la Commission européenne, dans la stratégie industrielle européenne révisée en 2021, a identifié les produits spécifiques des écosystèmes économiques sensibles pour lesquels l'UE est fortement dépendante de pays tiers, la Belgique doit également identifier les secteurs stratégiques pour sa propre économie, analyser leurs vulnérabilités et désigner les responsables de la constitution des stocks dans les secteurs stratégiques afin que les entreprises améliorent leur propre résilience. Sur cette base, nous devons travailler avec nos partenaires européens pour diver-sifier les chaînes de production et d'approvisionnement, établir des stocks straté-giques et promouvoir la production et les investissements en Europe. À cet égard, nous devons tenir compte de la spécificité de notre tissu économique belge et en particulier du rôle des PME dans celui-ci. L'accent sur l'économie circulaire contribue également à réduire la dépendance vis-à-vis de certains biens et services. Concernant la sécurité énergétique en particulier, l'accent sera mis sur une électrification poussée, une interconnexion européenne et des investissements dans les technologies durables, flexibles et renouvelables ainsi que sur la poursuite de la numérisation du secteur énergétique. ## // Soutien Et Protection De La Recherche Et Du Développement L'innovation est l'un des principaux catalyseurs de la création de richesse dans notre pays. Le soutien à la recherche scientifique et au développement industriel et technologique est crucial, y compris au niveau européen. Lorsque cela s'avère possible et approprié, la Belgique peut se joindre aux initiatives et alliances euro-péennes en matière d'industrie et de recherche qui favorisent la coopération dans ces secteurs de haute technologie en vue de renforcer les chaînes de valeur indus-trielles européennes. Pareille coopération internationale peut également s'avérer utile avec des pays tiers, sans pour autant verser dans la naïveté quant aux risques associés tant au niveau de l'autonomie stratégique que de la propriété intellectuelle des acteurs européens. Un mécanisme de suivi des coopérations internationales y contribue, en particulier pour la recherche financée par des fonds publics et en portant une attention particulière aux informations situées au début de la chaîne, comme les demandes de visa. Par ailleurs, une bonne coopération et un échange d'informations entre services de sécurité et de renseignement et centres de recherche sont essentiels pour protéger la propriété intellectuelle et le potentiel d'innovation présents dans notre pays. De manière générale, un nouveau cadre législatif devrait permettre une coopération plus systématique entre le monde de l'entreprise et les services de sécurité et de renseignement. Le secteur maritime revêt une importance économique croissante. La Belgique doit continuer à apporter sa contribution dans les différentes organisations multilatérales pour protéger le système de navigation international, y compris la liberté de navigation. Les routes maritimes du Nord devenant de plus en plus accessibles, tant l'obtention d'un statut d'observateur au sein du Conseil de l'Arctique qu'une analyse des opportunités et menaces émanant de la région arctique sont recommandées. Certains intérêts économiques exigent également une action politique dans le domaine de la transition énergétique. Des entreprises belges comptent parmi les acteurs mondiaux dans le domaine de l'énergie éolienne côtière et de la production d'hydrogène. Une stratégie maritime élaborée de concert avec les acteurs économiques peut permettre à la Belgique de jouer un rôle actif dans la protection de ses intérêts économiques. ## 03 Renforcer La Résilience ![31_Image_0.Png](31_Image_0.Png) // Résilience Des Services Essentiels En complément du programme européen pour la protection des infrastructures critiques la législation belge renvoie de manière explicite aux secteurs du transport, de l'énergie, des finances, de la communication électronique, approvisionnement en eau potable, de la santé publique, des infrastructures numériques et de l'espace, au sein desquels une erreur, un incident ou une attaque peuvent avoir de graves conséquences pour des fonctions vitales. Les exploitants de ces infrastructures critiques sont tenus d'établir un plan de sécurité, de désigner un point de contact, d'organiser des exercices et des inspections, de signaler les incidents et de prendre des mesures complémentaires en fonction du niveau de la menace après une analyse menée par les services compétents. Le concept de résilience nationale ne se résume pas à la simple sécurité physique des infrastructures critiques. À cet égard, l'identification des risques au moyen d'une analyse précise des risques est systématiquement liée aux entités critiques et suivie de l'adoption de mesures appropriées et préventives pour limiter les risques. Son importance est reconnue tant par l'UE que par l'OTAN. La transposition de la directive européenne sur la résilience des entités critiques dans la législation nationale vise à rendre les services critiques plus résilients. Les mesures à prendre comprennent, entre autres, la sécurité physique, la cybersécurité, la capacité de screening du personnel, la notification des incidents, les mesures d'adaptation au changement climatique, les mesures de continuité des activités et l'identification d'autres chaînes d'approvisionnement. Les sept exigences de base de l'OTAN reflètent les besoins fondamentaux susceptibles d'être affectés lors d'une situation d'urgence ; une société ou une nation doit s'y préparer dans le but d'augmenter la résilience du pays et de rendre le plan d'urgence national plus opérationnel. L'accent est mis sur les structures, les ressources et les services civils comme première ligne de défense. Afin de mettre en œuvre la première exigence de base, la Belgique œuvre déjà en vue de l'élaboration d'un cadre pour la protection des personnes occupant des postes clés ; un plan formalisé est également prévu pour garantir la continuité du gouvernement et des services publics essentiels. Pour les autres exigences de base, une analyse des lacunes en matière de sûreté (gap analysis) est en cours, laquelle permettra d'examiner comment accroître la résilience dans les secteurs concernés, en coopération avec les autorités des départements. ## // Changement Climatique Depuis 2010, dans le cadre de la Stratégie nationale d'adaptation, la Belgique analyse l'impact attendu du changement climatique et repère les secteurs vulnérables. Cette démarche a débouché sur le plan national d'adaptation 2017-2020. En juin 2021, une nouvelle stratégie européenne d'adaptation (2021) a été adoptée qui sert de cadre aux politiques nationales et fédérales. Cette stratégie, fondée sur des données et des analyses de risques solides, est axée sur une adaptation plus rapide et sur une approche plus systémique, cohérente de la résilience climatique dans tous les secteurs et domaines d'action et à tous les niveaux politiques. D'autres analyses de risques sont nécessaires afin d'élargir le champ de connaissances concernant l'impact précis du changement climatique sur les services sociaux dans les secteurs essentiels. Entre-temps, les premières discussions ont été entamées en vue de l'élaboration d'un nouveau plan national d'adaptation portant sur des mesures structurelles visant à limiter les risques et à amorcer une transition climatique vers des secteurs essentiels plus résilients, ainsi que des fournisseurs de services essentiels et une économie et une société plus résilientes en général. Les compétences en matière de politique climatique en Belgique étant très forte-ment imbriquées entre le niveau fédéral et les régions, l'harmonisation est une condition absolue pour mener une politique climatique et de sécurité efficace et efficiente. La transition vers une société neutre sur le plan climatique d'ici 2050 nécessitera des changements structurels profonds qui exigeront des investissements importants de la part de tous les acteurs - pouvoirs publics mais aussi ménages et entreprises –, notamment dans les infrastructures. Le verdissement des flux financiers (tant publics que privés) constituera un élément essentiel de la transition. Le développement d'une stratégie belge de financement durable a récemment débuté, tant au niveau des investissements publics qu'au niveau du rôle des acteurs du marché financier. La politique belge visant à réduire les émissions de gaz à effet de serre est définie dans le Plan national pour l'énergie et le climat horizon 2030 et dans la Stratégie à long terme pour la réduction des émissions de gaz à effet de serre de la Belgique (horizon 2050). Ces deux documents d'orientation ont été élaborés avant l'augmentation du niveau d'ambition européen à au moins 55 % d'ici 2030 et la réalisation de la neutralité climatique d'ici 2050. Ils devront donc être actualisés à la lumière des objectifs européens. Retarder l'action sera plus risqué et plus coûteux que d'agir à temps. Toutefois, le risque de transition peut être considérablement réduit grâce à une vision politique claire, à la cohérence des politiques menées et à leur homogénéité. Une approche intelligente peut même transformer la transition en opportunité socio-économique. Outre ces mesures nationales, la Belgique veillera à ce que sa politique nationale ne favorise pas la déforestation et la hausse des émissions dans les pays tiers, mais contribue à la réponse mondiale au changement climatique, notamment en recou-rant au financement climatique pour soutenir les pays en développement dans leur transition énergétique et en s'armant contre l'impact potentiellement déstabilisant du changement climatique. ## // Santé Publique Une approche intégrée de la santé publique est indispensable. Une meilleure compréhension des risques doit permettre une prévention efficace et l'élaboration de plans d'urgence plus pointus pour une gestion plus efficace des crises sanitaires. En tant que membre de l'Organisation mondiale de la Santé (OMS), la Belgique a intégré dans sa législation nationale les accords conclus en matière de déclaration et de lutte contre les maladies infectieuses. Dans ce contexte, des plans de préparation ont été élaborés pour les crises sanitaires générales et, plus spécifiquement, pour les pandémies. Ils constituent la base de la création d'un stock stratégique national d'équipements de protection et de médicaments. D'importantes leçons au niveau de l'optimisation de ce processus seront certainement tirées de la crise de la COVID-19. En tant que point de contact national, le SPF Santé publique est chargé de la surveil-lance, de l'analyse et de la gestion des risques pour les maladies transmissibles, les maladies nouvelles ou inconnues et les crises sanitaires biologiques, chimiques et nucléaires ayant des conséquences internationales. L'Agence fédérale pour la sécu-rité de la chaîne alimentaire veille à l'intégrité sanitaire et phytosanitaire de la chaîne alimentaire. La cybersécurité est un élément essentiel de la limitation des risques dans le secteur des soins de santé, tant concernant la protection des données des patients que la sûreté et la sécurité des équipements médicaux. Au sein de l'UE, la Belgique prend activement part à des initiatives destinées à renforcer l'action de coordination des États membres en faveur de la lutte contre les maladies infectieuses et de l'amélioration de la résilience. Le Centre européen de prévention et de contrôle des maladies joue également un rôle important dans ce domaine. La crise de la COVID-19 a montré la nécessité de renforcer la coopération euro-péenne et internationale. À cette fin, la Commission européenne a entrepris de créer une Union européenne de la santé qui doit permettre d'améliorer la protection, la prévention, la préparation et la riposte aux menaces pour la santé humaine. La Belgique, avec son système de santé avancé et son savoir-faire reconnu, entre autres, dans la recherche et la production de médicaments, contribuera à ces objectifs. Au niveau multilatéral, la Belgique soutient une OMS plus forte dans les situations de crise, dans le cadre d'une approche « *One Health* » qui rassemble les canaux multilatéraux de la santé mondiale, de la santé animale, de l'agriculture et de l'environnement. À la suite d'une proposition de l'UE, des négociations seront entamées en vue d'un traité sur la pandémie. Ce traité doit renforcer les efforts internationaux en matière de sécurité sanitaire mondiale, de préparation et de riposte dans le cadre d'un renforcement horizontal des systèmes de santé, de la couverture sanitaire universelle, de la lutte contre les inégalités et de la promotion des droits humains, y compris la santé sexuelle et génésique. La Coopération belge au développement contribue également, avec nos pays parte-naires, à renforcer les systèmes de santé, à lutter contre les grandes épidémies, à donner accès à des produits pharmaceutiques de qualité et abordables et à assurer la disponibilité d'un personnel de santé suffisant et correctement formé. ## // Un Cyberespace Ouvert Et Sûr La cybersécurité vise à minimiser le risque de perturbation ou d'accès non autorisé aux systèmes d'information et de communication (TIC). La cybersécurité contri-bue à la sécurisation des investissements publics et privés ainsi qu'à la création de nouveaux emplois et opportunités. Il s'agit d'un domaine qui implique un effort conjoint et une responsabilité partagée, auxquels tous les acteurs concernés doivent contribuer. Les citoyens, les entreprises, les services publics et les organisations d'importance vitale pour notre pays sont tous responsables au premier chef de la protection de leurs biens et de leurs systèmes, ainsi que des données qu'ils contiennent. Cependant, le gouvernement doit appor-ter un soutien fort à ces groupes cibles et les aider de manière optimale à assurer leur sécurité. Les différents services publics - depuis les services de renseignement et de sécurité jusqu'aux superviseurs sectoriels - ont chacun leurs propres responsabilités à cet égard, en fonction de leurs domaines de compétence spécifiques. En tant qu'autorité nationale dans ce domaine, le Centre pour la cybersécurité Belgique (CCB) joue un rôle clé dans la coordination de cette approche transversale. La Stratégie de cybersécurité Belgique 2.0 détermine les objectifs stratégiques qui seront poursuivis jusqu'en 2025, allant des investissements dans une infrastructure de réseau sécurisée, en passant par des directives en matière de cybersécurité pour les utilisateurs et les administrateurs, la protection des opérateurs d'importance vitale et des sièges des institutions internationales en Belgique à une coopération publique, privée et universitaire renforcée. Pour être à même de mieux répondre à la cybermenace, l'accent sera mis sur la cartographie de la menace internationale, la dislocation de la cyberinfrastructure criminelle, la mise au point d'une capacité offensive adéquate. Le développement des capacités cyber de la défense s'inscrit dans cette optique, de même que l'attribution coordonnée des cyberattaques à des individus, groupes ou États particuliers. L'identification des responsables d'une attaque est un moyen important de dissua-sion, mais c'est également un exercice technique et politique complexe dans lequel le SPF Affaires étrangères joue un rôle particulier. La cybermenace est mondiale et requiert une cyberdiplomatie active et une coopération au niveau bilatéral et multilatéral. Au niveau européen, la stratégie de cybersécurité de l'UE de décembre 2020 constitue une étape importante vers une résilience collective plus forte. Le CCB collabore avec des organisations partenaires dans d'autres États membres, mais aussi avec l'Agence de l'UE pour la cybersécurité et le nouveau Centre européen de compétences industrielles, technologiques et de recherche en matière de cybersécurité. Une attention particulière sera accordée à l'application de la directive de l'UE sur la sécurité des réseaux et des systèmes d'information, qui, entre autres, renforce les exigences de sécurité pour les entreprises et d'autres entités, se concentre sur la sécurité des chaînes d'approvisionnement, rationalise les obligations en matière d'établissement de rapports et envisage des mesures de surveillance plus strictes pour les autorités nationales. ## // Utilisation Sûre Des Nouveaux Développements Technologiques Outre leurs multiples possibilités, des risques particuliers sont également associés aux technologies émergentes telles que la 5G, ainsi qu'aux technologies émergentes de rupture qui créent ou renforcent de nouveaux moyens d'espionnage, d'ingérence et de sabotage. À cet égard, l'indépendance technologique vis-à-vis de puissances étrangères est cruciale. Par ailleurs, l'utilisation de ces technologies dans notre pays doit se faire en tenant compte des risques et de notre résilience, tant sur le plan technologique que sur le plan sociétal. La Belgique participe donc activement à la concertation sur la nouvelle législation européenne dans ces domaines, en prêtant attention à l'importance de l'innovation technologique, des aspects liés au maintien de la sécurité et de la protection des valeurs fondamentales. Les discussions en cours au sujet de l'utilisation éthique de l'intelligence artificielle et la restriction de l'exploitation d'algorithmes inhérents au fonctionnement et à la programmation actuels des médias sociaux en constituent un exemple. En ce qui concerne la 5G, un effort suprasectoriel est déjà réalisé à travers l'élaboration d'un cadre législatif qui doit permettre à notre pays d'atténuer les risques de sécurité posés par les fournisseurs à haut risque (*High Risk Vendors*). En outre, les conséquences et les risques liés à la composante technologique dans le domaine des nouvelles applications et de l'interconnectivité croissante feront l'objet d'un suivi, essentiellement en ce qui concerne le déploiement de la 5G dans les secteurs essentiels de notre pays. De même, en ce qui concerne les technologies émergentes de rupture, il convient de consolider l'expertise afin de se forger une image correcte des risques associés à ces technologies et de l'impact qu'elles peuvent avoir sur nos intérêts nationaux. Compte tenu de l'importance croissante des applications stationnées dans l'espace, il est essentiel d'améliorer la protection et la résilience des systèmes spatiaux et des services vitaux qui en dépendent. Une approche nationale, comme la création d'une agence spatiale interfédérale, permettrait de renforcer la synergie entre les différents acteurs dans ce domaine et de favoriser le développement d'une stratégie cohérente au niveau national. Enfin, dans le cadre du développement de Galileo, le système européen de navigation par satellite, un service crypté robuste réservé aux autorités publiques, le *Public* Regulated Service, a été prévu. Compte tenu de son importance, il est indispensable d'élaborer une politique claire pour ce service et son utilisation dans notre pays. ## // La Résilience Face Aux Risques Cbrne Et Le Soutien À La Non-Prolifération Et Au Désarmement La création en 2019 du centre d'expertise CBRNe en tant que plate-forme nationale, piloté par le Centre de crise national (NCCN), a constitué une étape importante vers une approche multidisciplinaire des risques CBRNe avec l'intégration des aspects accidentels (sûreté) et intentionnels (sécurité) dans les domaines suivants : prévention et sécurité, opérationnalisation des plans d'urgence liés aux CBRNe, recherche et développement, soutien à la gestion de crise en situations réelles et coopéra-tion internationale sur les risques CBRNe. Cette capacité bénéficiera de nouveaux investissements. Le centre CBRNe est également le point de contact national pour la Commission européenne en ce qui concerne le suivi et la mise en œuvre du plan d'action CBRN de l'UE. En outre, le centre renforce au niveau national la coopération civile et militaire face aux risques CBRNe, conformément aux points d'attention en la matière au niveau de l'OTAN. Au niveau international, il reste important de lutter contre la prolifération et de restaurer le tissu des traités sur le contrôle des armements et sur le désarmement. La Belgique continue à considérer le Traité de non-prolifération (TNP) comme la pierre angulaire en matière de non-prolifération nucléaire et de désarmement. Notre pays jouera un rôle proactif dans la conférence d'examen du TNP de 2022 et étudiera avec les alliés européens de l'OTAN comment renforcer le cadre multilatéral de non-prolifération et comment le Traité des Nations Unies sur l'interdiction des armes nucléaires peut donner un nouvel élan au désarmement nucléaire multilatéral. Un régime international de contrôle des armements efficace et efficient est essentiel pour répondre aux diverses menaces actuelles. La prévention, un contrôle strict et une bonne coopération sont au cœur de cette démarche. La Belgique soutient également d'autres initiatives en matière de désarmement et de contrôle des armements, également en dehors du domaine nucléaire. Notre pays travaille notamment à l'établissement d'un cadre réglementaire pour les systèmes d'armes létales entièrement autonomes et s'efforce d'obtenir une interdiction internationale. ## 04 Une Responsabilité ![36_Image_0.Png](36_Image_0.Png) Internationale // Des efforts accrus en matière de protection et d'assistance aux Belges à ## L'Étranger Compte tenu du nombre croissant de compatriotes qui voyagent, séjournent ou entretiennent des liens familiaux à l'étranger, la responsabilité du gouvernement et les attentes envers notre réseau diplomatique et consulaire augmentent également. Les évacuations répétées et la gestion de crise ont montré à quel point le rôle direct des Affaires étrangères dans la sécurité des concitoyens à l'étranger a évolué. Un réseau diplomatique et consulaire adéquat répondant à des exigences spécifiques en matière de capacités et de sécurité est indispensable. Ces situations ont également révélé l'importance d'une collaboration et d'une communication de qualité entre tous les départements de sécurité concernés tels que l'Intérieur, la Défense, les Affaires étrangères, la Justice et l'Asile et la Migration. Ce contexte a fait ressortir, une nouvelle fois, la nécessité de disposer d'un réseau d'information et de communication sécurisé répondant aux normes internationales. // Une approche renforcée des menaces étatiques conventionnelles et hybrides Une politique de sécurité préventive et réactive est sans aucun doute une respon-sabilité nationale, mais elle dépasse également les capacités nationales. Il est donc logique que la Belgique fasse appel et contribue aux mécanismes multilatéraux de protection et de défense de l'UE et de l'OTAN. La participation à la dissuasion et à la défense collective de l'OTAN est bien plus qu'une responsabilité purement militaire. Elle implique un déploiement coordonné de toutes les ressources de l'État, une répartition équitable des risques et des charges, ainsi qu'une attention portée à l'autonomie stratégique et à la résilience. L'UE n'est pas essentielle uniquement pour renforcer notre résilience. La solidarité entre les États membres a également un effet dissuasif important contre les actions hybrides où un ou plusieurs États membres deviennent la cible, par exemple, d'une cyberattaque ou d'un chantage économique. Le pilier de la défense européenne doit être développé davantage en élargissant les initiatives existantes et en lançant de nouvelles initiatives de coopération capacitaire bilatérale et européenne. L'UE et ses États membres doivent également assumer leurs responsabilités de manière harmonisée et conjuguer leurs actions lorsque des crises en dehors de l'Europe menacent notre sécurité. Afin de rester un allié et un partenaire fiable, la Belgique continue à œuvrer en vue du développement d'une force armée crédible, flexible et rapidement déployable, ce qui doit passer par l'actualisation et la mise en œuvre de la vision stratégique de défense. Depuis la fin de la Guerre froide, l'accent a été mis sur la sécurité collective et les opérations extérieures. Dans l'environnement sécuritaire actuel, la défense collective occupe à nouveau une place centrale. Il faut donc revoir l'éventail de nos capacités. La coopération, la synergie et - lorsque cela s'avère possible et souhai-table - l'intégration, tant au niveau de l'UE et de l'OTAN que sur le plan bilatéral, demeurent indispensables avec des partenaires stratégiques tels que la France, les Pays-Bas, le Luxembourg, l'Allemagne, le Royaume-Uni et les États-Unis. La sécurité a un prix. Ce constat signifie que les ressources financières de la Défense doivent évoluer vers la moyenne des États européens membres de l'OTAN non nucléaires, et qu'il existe une volonté de déployer efficacement la Défense afin de défendre nos intérêts vitaux, par solidarité avec nos alliés et partenaires. L'action belge à l'étranger doit intégrer de manière cohérente une étroite coopération civilo-militaire en soutien de l'ONU, l'UE et l'OTAN et de nos propres actions bilatérales. Conformément à la Note stratégique Approche globale, les options politiques retenues aux différents niveaux de pouvoir et les instruments utilisés doivent être intégrés, sans préjudice de l'objectif spécifique de chaque instrument. Les priorités régionales de cette politique sont les États baltes et la région de l'Europe centrale sur le flanc est, la Méditerranée, le Moyen-Orient, l'Afrique du Nord et de l'Ouest, le Sahel et la région des Grands Lacs sur le flanc sud. Il reste essentiel de protéger, et au besoin renforcer, les processus décisionnels, les institutions et le fonctionnement au niveau politique et administratif, y compris ceux de l'UE et de l'OTAN. Une attention accrue est nécessaire pour lutter contre l'influence étrangère et l'ingérence politique et économique. Dans le contexte du déploiement hybride de différents types de menaces, notre pays doit développer une résilience spécifique dans un certain nombre de domaines prioritaires tels que la désinformation (dans le cadre d'opérations d'information hostiles), les organisations violentes et extrémistes dans le domaine cybernétique, et la protection de notre potentiel scientifique et économique (la base de notre prospérité). Dans ce contexte, la stratégie de l'UE pour l'union de la sécurité fournit des orientations pour une approche intégrée et cohérente pleinement soutenue par la Belgique. Cette stratégie vise, entre autres, à renforcer une coopération policière et judiciaire mieux intégrée au niveau européen, qui tient également compte de l'évolution du contexte technologique. Au niveau national, la mobilisation permanente contre les menaces hybrides néces-site des initiatives de détection, d'analyse, de synthèse et de coordination. Il est donc important que les structures nationales qui en sont chargées continuent à développer leurs capacités dans les domaines de la prévention, de la préparation, de la détection et continuent à développer une riposte. Les menaces hybrides se caractérisant par l'utilisation combinée de méthodes et de techniques, une plate-forme nationale et interdépartementale sur les menaces hybrides a déjà été mise en place afin de garantir une approche coordonnée reposant sur une large assise. Spécifiquement pour la désinformation, des travaux sont menés en vue de la mise en place d'un mécanisme interdépartemental pour la détection, la surveillance, l'analyse et le rapportage d'opérations de désinformation et d'information. En raison de son statut de pays hôte de diverses institutions européennes et du siège de l'OTAN, la Belgique constitue un pôle d'attraction pour l'espionnage et l'in-gérence. Afin de lutter contre cette menace, les services de renseignement visent avant tout à créer un environnement opérationnel hostile (*hostile operating environment*) pour les agents de renseignement étrangers. Les représentants politiques et diplomatiques doivent être pleinement sensibilisés au danger et ensuite être armés contre celui-ci. Une culture de la sécurité voit ainsi le jour au niveau national, qui assure la résilience nécessaire face à la menace d'espionnage et d'ingérence. ## // Une Ue Disposant D'Une Réelle Capacité D'Action L'UE offre à la Belgique, d'une part, le cadre général devenu indispensable pour des domaines politiques importants et, d'autre part, le meilleur instrument pour défendre ses intérêts à l'échelle mondiale. La présidence belge du Conseil de l'UE en 2024 constitue donc une opportunité importante. Il en va de même pour la sécurité nationale de notre pays. Seule l'UE dispose de l'envergure, des compétences et des ressources nécessaires pour mettre en œuvre des politiques adéquates pour la quasi-totalité des menaces pertinentes abordées dans le présent document. À cet égard, la Belgique doit veiller à ce que l'UE intègre de manière systématique et cohérente l'autonomie stratégique et la résilience dans tous les cadres politiques pertinents. Comme pour les autres grands dossiers de politique internationale, le SPF Affaires étrangères est chargé d'organiser et de piloter la concertation entre les autorités fédérales et fédérées, qui aboutit à une position belge sur les dossiers européens et multilatéraux. Le développement d'une capacité scientifique, technologique, numérique, industrielle, monétaire-financière et diplomatico-militaire autonome doit permettre à l'UE d'assurer sa propre défense et d'être un acteur mondial significatif. Partout où cela sera nécessaire pour y parvenir, notre pays plaidera pour un ajustement des pouvoirs et des procédures de décision de l'UE, y compris lors de la Conférence sur l'avenir de l'Europe. Cela vaut déjà pour le passage de la règle de l'unanimité à celle de la majorité qualifiée s'agissant de la procédure de prise de décision pour la politique étrangère et de sécurité commune. Tout cela doit permettre à l'UE d'être plus que jamais un pilier indépendant et fiable d'un partenariat étroit et authentique avec l'OTAN et ses alliés transatlantiques. Dans ce contexte, notre pays mettra également tout en œuvre afin de prendre sa part de responsabilité pour sa propre sécurité et la sécurité commune de l'UE, de l'OTAN et de leurs États membres. Une politique étrangère et de sécurité commune énergique nécessite une capacité autonome adéquate pour évaluer le contexte stratégique, formuler des positions, annoncer des mesures et mener des opérations extérieures. Dans cette optique, le maintien d'une industrie de défense européenne adéquate est également indispen-sable. Dans ce contexte, la Défense continuera à investir dans les « lacunes capaci-taires » (*capability gaps*) européennes et ancrera davantage ses capacités auprès de partenaires privilégiés parmi les États membres de l'UE et dans le contexte de l'UE. À cette fin, notre pays reste actif au sein de la coopération structurée permanente (PESCO), et se montre solidaire dans ses engagements, dont il sera rendu compte sur base annuelle via un plan national de mise en œuvre. Le Fonds européen de Défense, mis en place par la Commission européenne, permettra d'encourager et de cofinancer des projets de coopération pour le développement de capacités militaires. Le gouvernement donnera à nos entreprises les meilleures opportunités à cet égard et un cadre sera élaboré pour l'admissibilité des entreprises. La sécurité de l'UE et de ses États membres, dont la Belgique, est étroitement liée à une stabilité durable dans son environnement immédiat. La Belgique veillera à ce que l'UE mène une politique d'élargissement et de voisinage appropriée pour y contribuer sans affaiblir l'union politique à long terme. Cependant, l'UE et la Belgique elle-même doivent investir en particulier dans les relations avec les pays qui ont une perspective réelle d'adhérer un jour à l'UE. Outre ces préoccupations de sécurité, il convient également d'atténuer les facteurs qui poussent à l'immigration irrégulière vers l'UE. Dans ce contexte, la Belgique continue à œuvrer au niveau européen pour la Politique européenne commune en matière d'asile et de migration qui vise à trouver un équilibre - dans le respect des droits humains - entre les principes de solidarité et de responsabilité et se concentre, entre autres, sur une politique frontalière intégrée, un renforcement de la lutte contre le trafic d'êtres humains et une meilleure coopération avec les pays tiers. ## // Un Bâtisseur De Ponts International 40 Étant donné l'interconnexion de la sécurité intérieure et extérieure, la diplomatie fait partie intégrante de la politique de sécurité nationale. L'environnement opéra-tionnel multilatéral, avec l'érosion des règles juridiques internationales et le retour de la politique des rapports de force, pose de nouveaux défis. Suivant le principe cooperate when you can, push back when you must, la Belgique continue de s'effor-cer d'impliquer activement tous les pays, y compris les grandes puissances, dans la coopération multilatérale pour relever les défis communs. Un ordre mondial inclusif est le plus efficace. Notre influence dans la politique internationale constitue par conséquent un facteur déterminant pour la sécurité et à la prospérité de notre pays. Cette influence dépend également de notre crédibilité et de notre rôle actif dans les institutions internationales. Dans le même temps, avec l'élargissement de l'UE et de l'OTAN, le poids spécifique de la Belgique a diminué. Il est donc crucial que la Belgique se donne les moyens d'une plus grande présence et d'un plus grand engagement au niveau international afin de contrer le risque systémique d'un déclin progressif de notre influence internationale (et par extension de celle de l'UE), et d'une nette érosion du consensus international sur les valeurs essentielles à notre modèle de société. Notre pays est depuis longtemps intégré dans un vaste réseau d'institutions multilatérales. L'efficacité et l'efficience de ces institutions sont une préoccupation constante. À cet égard, notre pays a été membre du Conseil de sécurité de l'ONU (CSNU) pour la 6e fois au cours de la période 2019-2020, une expression concrète de notre engagement multilatéral dans le domaine de la sécurité. Toutefois, l'engagement multilatéral de la Belgique est beaucoup plus large et couvre presque tous les domaines politiques, notamment la sécurité, la prospérité, le soutien à la démocratie, la lutte contre l'impunité et le changement climatique. La Belgique continuera à jouer un rôle actif au sein des Nations Unies après le mandat du CSNU et nourrit des ambitions pour un certain nombre de mandats spécifiques, tels que l'élection au Conseil des droits de l'Homme en 2023-2025. La Belgique promeut également activement la prévention des conflits, le contrôle des armements et le désarmement au sein des organisations concernées (UE, OTAN, OSCE, Organisation pour l'interdiction des armes chimiques) et prend des initiatives diplomatiques à cette fin avec des pays partageant les mêmes idées. La politique de développement contribue également à la stabilisation et à la sécuri-té au-delà de nos frontières. La note stratégique Approche globale (Comprehensive Approach) a attribué au SPF Affaires étrangères un rôle central dans une politique étrangère belge cohérente avec des task forces géographiques et thématiques spécifiques. La politique en matière de commerce et d'investissement y contribue également, notamment en assurant notre connectivité aux marchés mondiaux et en maintenant des normes et des standards. Notre pays doit agir de manière plus proactive et plus affirmée pour assurer la présence de la Belgique à des postes de premier plan dans les organisations priori-taires (UE, ONU, OTAN, OSCE). Le rôle de Bruxelles en tant que capitale internationale doit également être renforcé de toute urgence par une politique de siège coordonnée et dynamique. Le multilatéral doit pouvoir s'appuyer sur un solide réseau de relations bilatérales. Plus que jamais, nos représentations diplomatiques dans l'UE et dans les pays tiers et nos représentations permanentes auprès des organisations internationales restent essentielles pour défendre les intérêts belges et européens, promouvoir nos valeurs et identifier et signaler de manière proactive les tendances et les risques potentiels. Photo | 25.08.2021 | Une famille débarque sur le tarmac de l'aéroport militaire de Melsbroek après avoir été évacuée de Kaboul, la capitale de l'Afghanistan, dans le cadre de l'opération d'évacuation "Red Kite". ![41_image_0.png](41_image_0.png) 06 # Suivi Et Organisation ## // Principes Une stratégie de sécurité nationale apporte une contribution importante à une « culture de la sécurité » qui propose, comme point de départ des politiques menées, de coupler une prise de conscience accrue des risques et des menaces, d'une part, et la défense explicite des intérêts, d'autre part. En effet, une stratégie de sécurité nationale fournit un cadre à la fois pour la prospective stratégique et la planification, pour la concertation et l'action politique, et pour l'orientation des moyens. Cette approche sécuritaire dynamique, qui examine systématiquement le triangle « intérêts - menaces et risques - politique », nécessite un renforcement de la dimension transversale. Afin d'ancrer cette dernière dans la pratique, cette stratégie met l'accent sur la résilience et sur une politique intérieure et étrangère proactive dans le cadre d'une approche intégrée. ![42_image_0.png](42_image_0.png) La résilience s'entend comme un ensemble cohérent de mesures permettant à notre société de continuer à fonctionner grâce à la mise en place d'une protection et d'une réaction aux incidents qui menacent ses intérêts vitaux et ses valeurs fondamentales, même lorsque des crises de grande ampleur les menacent directement ou les mettent en danger. Cet objectif exige de la résilience de la part de l'individu, de la société, des entreprises et du gouvernement. Toutefois, la résilience au niveau national ne suffit pas. Il est essentiel que la politique se concentre également sur le renforcement de la sécurité dans notre envi-ronnement au sens large et dans la zone d'intérêts de l'UE et de l'OTAN. Il convient de s'attaquer aux risques et aux menaces le plus tôt et le plus efficacement possible. Par conséquent, une approche intégrée efficace combine les quatre éléments suivants : Approche pangouvernementale Interne / externe ![43_image_0.png](43_image_0.png) ![43_image_1.png](43_image_1.png) ![43_image_2.png](43_image_2.png) ## Approche Pangouvernementale 01 Dans le cadre d'une approche pangouvernementale, la sécurité est considérée comme une mission essentielle indivisible de tous les gouverne-ments de notre pays. Cela suppose une coordination au niveau fédéral des perspectives, des intérêts et des contributions des différents départements ainsi qu'une coopération efficace avec les entités fédérées afin de parvenir à une politique efficace, cohérente et efficiente. ## Interne / Externe 02 De même que les risques et les menaces résultent de facteurs et d'évolutions internes et externes étroitement imbriqués, nos intérêts en matière de sécurité peuvent rarement être défendus par une approche purement interne ou externe. Une politique étrangère, de développement et de défense active est donc indissociablement liée à la sécurité intérieure. ## Gestion Des Risques 03 Il est nécessaire de mettre en place un système générique de gestion des risques et des crises qui prenne en compte l'ensemble du cycle du risque et associe toutes les parties concernées. Dans une vision globale de la gestion des risques, il est essentiel de se concentrer non seulement sur la gestion de crise, mais aussi sur la détermination et l'analyse des risques, ainsi que sur les aspects préventifs et préparatoires. Pour chaque scénario de menace, il convient de préciser qui doit remplir quel rôle, par analogie avec les plans d'urgence nationaux pour les menaces CBRNe ou terroristes. 04 Approche pansociétale La sécurité ne se limite pas au gouvernement. Chacun a un rôle à jouer, depuis le gouvernement fédéral, en passant par les entités fédérées, jusqu'aux entreprises, aux partenaires privés et au monde académique, jusqu'à la société elle-même, et à chaque citoyen. Ces interactions doivent être clairement établies à l'avance et s'appuyer sur une stratégie de communication publique axée sur la maximisation de la confiance des citoyens dans les pouvoirs publics et leur adhésion aux valeurs fondamentales de notre société. Une communication stratégique crédible nécessite une coordination entre tous les acteurs impliqués dans la politique de sécurité nationale. ## // Une Approche Renforcée Une stratégie de sécurité nationale n'est pas une démarche ponctuelle mais un processus devant faire l'objet d'un suivi rigoureux. La stratégie de sécurité nationale propose une vision à long terme sur dix à quinze ans, qui requiert toutefois une actualisation périodique. Au début de chaque législature, une évaluation minutieuse sera réalisée pour déterminer si les développements dans l'environnement sécuritaire ayant des répercussions sur notre résilience nécessitent des adaptations de l'agenda stratégique. En outre, le Comité de coordination du renseignement et de la sécurité assurera le suivi de la mise en œuvre de la stratégie de sécurité nationale. Les mesures suivantes sont prévues en vue de soutenir ce processus : » Le Conseil national de sécurité (CNS) ainsi que les comités préparatoires (Comité stratégique du renseignement et de la sécurité (CSRS), Comité de coordination du renseignement et de la sécurité (CCRS), demeurent le principal mécanisme par lequel le gouvernement définit la stratégie de sécurité nationale et supervise sa mise en œuvre. Au sein du SPF Chancellerie, une capacité de coordination restreinte sera développée afin d'assurer le suivi et une coopération interdépartementale et interfédérale suffisante. Une attention particulière sera prêtée aux moyens permettant de mettre en œuvre la stratégie de sécurité nationale de manière structurelle de concert avec des parties prenantes qui ne sont pas membres du CNS/CSRS/CCRS. Outre les autres SPF, l'implication des entités fédérées est particulièrement importante dans ce contexte. Il faut également créer un cadre dans lequel le secteur des entreprises et les services de sécurité coopèrent plus étroitement. » L'analyse prospective stratégique (*Strategic Foresight Analysis*) sera renforcée et deviendra un élément permanent dans l'élaboration des politiques, pour permettre de traduire en temps utile l'évolution de l'environnement de sécurité mondial, européen et national en scénarios d'avenir crédibles, de sorte que la stratégie de sécurité nationale puisse être adaptée le cas échéant et gagner en durabilité. Le suivi des nouvelles technologies en sera une composante impor-tante. Les réseaux de connaissances au sein desquels le monde académique, le secteur des entreprises et les pouvoirs publics associent leurs réflexions autour de thèmes spécifiques englobant tendances, menaces et risques, apportent une valeur ajoutée importante à cet égard. » Étant donné le caractère multidimensionnel de la sécurité, où différents éléments interagissent et se renforcent mutuellement, une coopération plus étroite et des équipes interdépartementales pour l'élaboration et la mise en œuvre des politiques sont nécessaires. Ce mode de fonctionnement existe déjà sous la forme des *task forces* de la CCRS, des groupes de travail thématiques et géographiques pilotés par le SPF Affaires étrangères dans le cadre de l'approche globale, mais il sera davantage développé et encadré. » Le cadre des plans d'urgence nationaux et de la gestion des crises, y compris le cadre législatif, fera l'objet d'une évaluation avec pour but de renforcer la chaîne de commandement et de contrôle, dotée de canaux et de moyens de communication rapides, autonomes, fiables et sûrs. D'importantes leçons seront tirées de l'expérience de la COVID-19 et des récentes inondations catastrophiques. On déterminera dans quelle mesure une plate-forme de concertation, sous la forme d'une cellule de sécurité nationale regroupant les autorités sectorielles, pourra contribuer à la sensibilisation des secteurs et à la diffusion rapide des informations et des bonnes pratiques. Une proposition de canevas de plan d'urgence sectoriel peut contribuer à une approche harmonisée. Les crises et les catastrophes naturelles à l'étranger touchant des ressortissants ou des intérêts belges nécessitent une approche spécifique. » Un écosystème de communications sécurisées, répondant aux normes UE et OTAN, doit être mis en place pour faciliter l'échange de renseignements, d'informations spécifiques et d'autres éléments sensibles. » Aucune de ces options ne sera possible ou réalisable sans une culture de la sécurité à tous les niveaux des différents services publics. La formation, l'entraînement et les exercices constituent des facteurs clés de gestion des crises nationales et internationales. » La stratégie de sécurité nationale crée le cadre des initiatives politiques et de l'orientation des moyens dans la mise en œuvre d'une politique de sécurité globale et intégrée. ## Crédit Photo p. 03 | © Belgalmage NICOLAS MAETERLINCK p. 08 | © Belgalmage POOL ERIC HERCHAFT p. 17 | © Belgalmage LARKERERER p. 17 | © Belgalmage EARKERMAEM p. 42 | © Reuters ![46_image_0.png](46_image_0.png) Éditeur responsable | Peter Moors, chef de cabinet du Premier ministre pour la Cellule stratégique Sécurité et Relations internationales, président du Comité stratégique du Renseignement et de la Sécurité, 16 rue de la Loi, 1000 Bruxelles ![47_image_0.png](47_image_0.png)